Madame de staël avait donné, dans son " de l'Allemagne ", une version simplifiée du " Discours du Christ mort ", laquelle allait influencer non seulement
Gérard de Nerval, qui s'en inspira dans "
Les chimères " et "
Aurélia ", mais aussi
Victor Hugo,
Alfred de Vigny et
Théophile Gautier. Dans ce rêve le Christ apparaît devant une assemblée de revenants et proclame, dans une sorte de fracas étourdissant, tout l'édifice du monde s'effondrant, qu'il n'a vu nulle part de Père, et quand le narrateur se réveille, encore glacé d'effroi, c'est avec joie qu'il retrouve les douceurs du crépuscule et sa foi qui le réconforte, ne pouvant considérer un monde simplement livré au Hasard ou à une froide Nécessité, à un Néant éternel, un monde sans âme dans lequel les vivants ne seraient confrontés qu'à la douleur et la solitude.
Albert Béguin nous présente ici, dans cette anthologie, d'autres rêves, insérés dans les récits de
Jean Paul, ou bien dans ses
poèmes. Si certains ont des accents dramatiques, révélant la peur des ténèbres de son auteur, avec toutes sortes de monstres et d'apparitions jaillissant d'un chaos primordial et renvoyant à la face hideuse des hommes, d'autres exhaltent une nature toute nimbée d'une lumière surnaturelle - nature aimante et créatrice - et nous emportent dans leur extase. On voyage non plus dans les vallées sombres de l'Enfer, mais sous les soleils de Provence ou d'Italie, que chantent des pâtres ou des troubadours. On contemple d'un promontoire sacré une mer calme qui étincelle.
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