Le temps de lire, comme le temps d'aimer, dilate le temps de vivre.
Au lieu de quoi, nous autres qui avons lu et prétendons propager l’amour du livre, nous nous préférons trop souvent commentateurs, interprètes, analystes, critiques, biographes, exégètes d’œuvres rendues muettes par le pieux témoignage que nous portons de leur grandeur. Prise dans la forteresse de nos compétences, la parole des livres fait place à notre parole. Plutôt que de laisser l’intelligence du texte parler par notre bouche, nous nous en remettons à notre propre intelligence, et parlons du texte. Nous ne sommes pas les émissaires du livre mais les gardiens assermentés d’un temple dont nous vantons les merveilles avec des mots qui en ferment les portes : «Il faut lire ! Il faut lire !»
Jusqu'à un certain âge, nous n'avons pas l'âge de certaines lectures, soit. Mais, contrairement aux bonnes bouteilles, les bons livres ne vieillissent pas. Ils nous attendent sur les rayons et c'est nous qui vieillissons
.....Comptez vos pages .
On commence par s'émerveiller du nombre de pages lues, puis vient le moment ou l'on s'effraie du peu qu'il reste à lire. Plus que 50 pages! Vous verrez...Rien de plus délicieux que cette tristesse-là : la guerre et la paix, deux gros volumes... Et plus que 50 pages à lire.
On ralentit, on ralentit, rien à faire.
Natacha finit par épouser Pierre Bezoukhov, et c'est la fin. (p122/123)
Ainsi découvrit-il la vertu paradoxale de la lecture qui est de nous abstraire du monde pour lui trouver un sens.
Le devoir d'éduquer, lui, consiste au fond, en apprenant à lire aux enfants, en les initiant à la Littérature, à leur donner les moyens de juger librement s'ils éprouvent ou non le « besoin des livres ». Parce que, si l'on peut parfaitement admettre qu’un particulier rejette la lecture, il est intolérable qu'il soit - ou qu'il se croie - rejeté par elle.
On ne force pas une curiosité, on l'éveille...
Un livre, c'est un objet contondant et un bloc d'éternité.
Relire, ce n'est pas se répéter, c'est donner une preuve toujours nouvelle d'un amour infatigable.
Oui… La télévision élevée à la dignité de récompense… et, par corollaire, la lecture ravalée au rang de corvée… c’est de nous, cette trouvaille…