Il y a des ordres, peu importe l'époque, qui vous font douter de vous et de vos capacités. Cependant, le désir d'un roi est un ordre car y « circonvenir » pourrait coûter cher, très cher. Celui qui désobéit pourrait perdre ses privilèges, voire sa vie. Arcimboldo, un peintre, a reçu un ordre de l'empereur: choisir l'oiseau le plus laid de la terre et l'embellir le plus possible. Tout cela en cinq nuits car cet oiseau sera le symbole du carnaval. le peintre se désespère. Comment faire tout cela en si peu de temps ? Y arrivera-t-il ? Comment faire ? Et si c'était un piège ? Arcimboldo rechigne et peste. L'artiste prendra-t-il le pas sur l'homme ?
Dans une prose très poétique, nous suivons le récit de cet artiste et de la commande extravagante qu'il a reçue. Les descriptions des scènes ressemblent à des tableaux qui sont décryptés. Même les états d'âme du peintre ressemblent à des saynètes, de longs monologues. le récit est fait par l'oiseau qui a été choisi. Ce dernier raconte son incompréhension, sa perplexité et ne perd pas une miette de ce qui se déroule sous ses yeux. Cet oiseau est le symbole d'une folie de l'empereur. Arcimboldo relèvera-t-il le défi ? Les mots décrivent le bégaiement des esquisses, des gestes, du soliloque de l'homme. Folie ou excitation ?
Le tableau commandé par l'empereur fait perdre le sommeil à l'artiste peintre Arcimboldo. Un tableau à livrer en cinq nuits et six jours. Folie. Démence. Utopie. Mais, les désirs d'un empereur sont des ordres. Comment faire ? Comment respecter les différentes étapes ? Les gestes de l'artiste sont théâtraux comme ses colères contre son aide, Tomas. Et cet oiseau… Il l'épie de son coin. Il écoute les élucubrations du maître. Il admire le ballet des gestes et des pinceaux. Création ? Délire ? Folie ? Pourquoi pas ? Et l'oiseau doute. Il s'effraie tout en ressentant une curiosité sans nom. Il assiste, impuissant, à la lutte du maître avec son inspiration. Une lutte féroce qui le mènera peut-être à la folie. Peut-être à la mort. Est-ce son dernier tableau ?
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Pour l'artiste c'est cinq jours d'insomnie pour le lecteur (ou la lectrice) c'est un parcours onirique, au merveilleux pays de la création, picturale pour Arcimboldo, littéraire pour l'auteur.
Par le miraculeux pouvoir du rapprochement de mots, inattendus mais parfaitement accordés, il nous semble être devant une de ces oeuvres picturales aux couleurs parfois improbables , et qui pourtant nous émeuvent jusqu'au fond de l'âme.
En entrant dans ce livre, le lecteur entre paradoxalement dans un roman à suspens, qui ne peut que bien se terminer, pour ce qui est au moins de l'oeuvre.
Pour le reste il y règne une atmosphère douce-amère de fin de vie, du renoncement progressif qui caractérise la vieillesse, de la hiérarchisation consciente ou inconsciente de ce qui est essentiel, de la trace que l'on laisse en définitive de sa vie.
Reste la symbolique du corbeau, presque évidente pour ce qui est d'Arcimboldo, plus mystérieuse de la part du commanditaire Rodolphe II, au demeurant passionné d'ésotérisme, pouvant donner lieu à toutes les interprétations pour ce qui est de l'auteur, s'il ne s'agissait d'un rêve, où tout est possible…
Françoise ROUCH
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Il but, coup sur coup, deux nouveaux verres de vin épicé qu'il s'était servi lui-même, tremblant, oubliant d'y ajouter un peu d'eau (...)