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4,16

sur 2084 notes

Critiques filtrées sur 2 étoiles  
Rarement une chronique m'aura été si difficile à rédiger… j'espère donc trouver les mots justes pour argumenter mon propos, qui n'est qu'un ressenti purement personnel.

Sur la quatrième, ce roman cochait bien des critères auxquels je suis sensible : une histoire de famille, celle d'un père qui après le décès de son épouse, se retrouve seul pour élever leurs deux garçons, et se retrouve confronté à bien des difficultés.
C'est d'ordinaire le genre de thématique dont je me délecte volontiers.

Mais voilà le hic : je ne m'attendais pas à un roman à ce point engagé, à un tel ancrage politique.

Outre le fait que j'ai trouvé ce texte un peu court pour aller au fond des choses, et que j'ai regretté que l'on reste autant en surface des émotions, des ressentis, des états d'âmes, j'aurais toutefois pu m'en contenter, d'autant que l'écriture se prête à aller à l'essentiel, vive, spontanée, sans détours, percutante, déroutante, presque lapidaire parfois.

De même, le parti pris du langage parlé, avec ses particularités régionales spécifiques à la Lorraine, peut-être un peu lourd et peu naturel par moments, ne m'a pas vraiment gênée, et donnait même un certain relief et une certaine authenticité à l'ensemble.

L'histoire en elle-même était également prometteuse, sur le principe d'aborder les ravages que peuvent engendrer le manque de communication et les drames auxquels peuvent aboutir les carences affectives intra-familiales. Quand un parent seul, épuisé et désabusé préfère le calme démissionnaire et lâche du silence et de la fuite, à la tempête de l'affrontement avec son enfant adolescent, qui aurait besoin de cadre et d'opposition pour forger sa propre personnalité, tout peut arriver… et tout est arrivé, effectivement, même le pire.

Tout cela était au départ plutôt engageant et j'imaginais lire une ode à l'amour et à la tolérance, sur fond de résilience et de reconstruction. Il y a eu de ça, en effet, un peu, mais je n'ai pas su en apprécier le traitement fait.

Car ce qui a gâché considérablement ma lecture, c'est mon impression que ce fond de détresse humaine servait en réalité de prétexte à un discours politique démagogique, surfant sur tous les poncifs de la "bien-pensance", et sur tous les clichés gauche-droite les plus basiques que l'on puisse rencontrer.

Là, je me suis crispée et agacée. Ce n'était pas ce que j'étais venue lire. Une fois focalisée sur cet aspect, j'ai eu bien du mal à rester objective sur la globalité de ma lecture.

Je ne suis d'ailleurs pas sûre d'avoir bien cerné le véritable message qu'a voulu porter ce roman… tant le militantisme politique y a pris le pas sur la réflexion psychologique… Qu'a réellement souhaité nous dire l'auteur avec cette histoire de gâchis monumental, avec le parcours de ce père désemparé, perdu, englué dans son idéologie, dont l'orgueil et la honte surpassent l'amour, au point d'en perdre la connexion avec son fils et de le perdre tout court ?

J'y aurais bien entrevu une volonté d'appel à la tolérance, au respect et à l'acceptation de la différence, le souhait d'un rappel de la nécessité de communiquer, pour passer au-delà des clivages et des divergences d'opinions, pour se concentrer sur l'essentiel qui doit rester l'amour entre parent et enfant.
Mais en réalité, je me suis heurtée à un prosélytisme lourd, insistant, intransigeant et violent verbalement, qui m'a totalement perdue par toutes ses contradictions, et qui, selon moi, a fortement desservi l'ensemble.

Alors oui, je l'avoue, j'ai eu du mal à apprécier ma lecture, qui m'a laissée perplexe, mitigée et sur ma faim, avec le désagréable sentiment d'une histoire trop politisée, trop inaboutie, trop pleine d'abattement, de fuite, de lâcheté et de non-dits.
Il m'a manqué chez ce père, dont on n'a que le seul point de vue, une vraie personnalité, une ferveur, un réel engagement, qui à défaut de justifier son attitude envers son fils, aurait du moins pu l'expliquer.
Je pense malheureusement être passée en grande partie à côté de ce roman et ne pas y avoir vu les qualités lui ayant valu l'obtention de tant de prix littéraires.
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C'est toujours un très grand embarras pour moi quand je ne hurle pas avec les loups...

Je n'ai pas eu le temps de m'attacher à ce père et ses fils au cours de ces 142 pages (version "Le livre de poche"), que j'ai mis quasiment une semaine à lire.

J'avais beaucoup d'attentes. Elles ont été déçues. Ce livre n'a pas résisté aux comparaisons que j'ai pu faire avec mes autres lectures.

On sait que la mère a été terrassée par une maladie grave, laissant seuls père et enfants. Mais on sait très peu de choses des émotions que cela a entraîné, des difficultés que père et enfants ont dû surmonter. Tout au plus apprend-on finalement qu'il serait possible de reprocher des manquements au père (pour les besoins de la cause, dont je ne dirai pas davantage).

Quant à la thématique de l'extrême droite, elle est survolée. Je n'en ai perçu ici qu'une approche de surface fondée sur une opposition, une réaction au socialisme.

Si le thème de l'extrême droite vous intéresse, je ne peux que vous recommander l'excellent roman "Le coeur à l'échafaud" d'Emmanuel FLESCH. Une vraie pépite !

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Ce qu'il faut de nuit
Au-dessus des arbres,
Ce qu'il faut de fruits
Aux tables de marbre,
Ce qu'il faut d'obscur
Pour que le sang batte,
Ce qu'il faut de pur
Au coeur écarlate,
Ce qu'il faut de jour
Sur la page blanche,
Ce qu'il faut d'amour
Au fond du silence.
Et l'âme sans gloire
Qui demande à boire,
Le fil de nos jours
Chaque jour plus mince,
Et le coeur plus sourd
Les ans qui le pincent.
Nul n'entend que nous
La poulie qui grince,
Le seau est si lourd. - Jules Supervielle, Vivre encore

"J'avais finalement compris que la vie de Fus avait basculé sur un rien. Que toutes nos vies, malgré leur incroyable linéarité de façade, n'étaient qu'accidents, hasards, croisements et rendez-vous manqués. Nos vies étaient remplies de cette foultitude de riens, qui selon leur agencement nous feraient rois du monde ou taulards."

Le titre du 1er roman de Laurent Petitmangin reprend le 1er vers de Vivre encore de Supervielle. À la lecture, on s'apercevra que d'autres vers de ce poème trouvent un écho dans cette histoire qui - inutile de tourner autour du pot - n'a pas réussi à me convaincre.

Je sais aller à contre-courant des avis nombreux et élogieux qui bruissent depuis sa parution à l'été dernier. Et je concède que si ce roman a reçu une belle moisson de prix dont le Prix Stanislas, le Prix Révélation de la SGDL premier roman et le Femina des lycéens, il doit y avoir quelques raisons. Mais que voulez-vous, parfois, la rencontre n'a pas lieu.

Comment mettre des mots sur cette déception ?
Ce qu'il faut de nuit fait partie des romans dont j'ai tellement entendu parler qu'il me semble les avoir déjà lus et mon attente s'en est trouvée changée, comprenez qu'elle s'est aiguisée.

Villerupt, en Lorraine. Une ville et des vies qui somnolent. Un monde d'hommes morne. Un père et ses deux fils, Fus et Gillou, ont enterré la mère quelques années plus tôt. La "moman" n'a jamais vraiment lutté contre son cancer. Oh ! je suis sûre que cela n'aurait rien changé à l'issue, non, ce qui me dérange c'est cette absence de combativité apathique qui jalonne le roman. Par bien des aspects, Ce qu'il faut de nuit semble raconter cette France qui, se croyant d'avance vaincue, se résigne trop docilement à ne pas lutter.

"On ne vaut pas moins que ceux que j'ai croisés, juste on n'y croit pas assez."

J'ai été déconcertée de ne pas être happée par ce récit pourtant écrit à la 1re personne, par ce qu'a à nous dire ce père quasi aboulique et qui, à mon sens, n'est pas de taille à porter ce roman, de même qu'il n'est pas de taille à remplacer la mère pour s'occuper de ses enfants.

"Fus a commencé à moins bien travailler. À piocher. À ne pas aller en cours. Il avait des excuses toutes trouvées. L'hôpital. Sa mère. La maladie de sa mère. Les rares embellies dont il fallait profiter. Les derniers jours de sa mère. le deuil de sa mère. Trois ans de merde […] où il m'a vu totalement impuissant. […] Plus capable de m'asseoir à côté de lui, quand il était en larmes sur son lit […]"

Le fils est-il le seul à avoir des excuses toutes trouvées ?

Fus va s'occuper de presque tout à la maison, des corvées comme de son frère plus jeune. Et le père d'avouer faire ce qu'il peut, mollement. C'est tout aussi mollement d'ailleurs qu'il continue de militer au sein de la section locale du PS dont les réunions rassemblent des encartés, un peu revenus de tout eux aussi, autour du gâteau de Lucienne. Les médiocres résultats scolaires de Fus l'orientent naturellement vers l'IUT de Metz, pas trop loin. Gillou, par contre, est promis à un meilleur avenir à Sciences-Po. C'est Fus qui le pousse à faire des études. C'est encore Fus qui a les paroles que devrait avoir le père :

"C'est Fus qui m'a sauvé la mise : "Déconne pas Gros, qu'il lui avait dit, vise haut ! Tu as la chance d'avoir Paris, tu prends Paris. Pa et moi, on se démerdera bien pour ta piaule.""

Beaucoup de choses pèsent depuis beaucoup d'années sur les frêles épaules de cet aîné, enfant grandi trop vite. Quand il commence à fréquenter l'extrême-droite et à tracter pour le FN, le père est certes anéanti, mais il ne sait lui opposer que son silence, ce silence qui augure, on le sent, le drame à venir et dont je ne vous dirai rien.
L'ennui est que ces relations taiseuses qui préfèrent l'esquive à l'affrontement peinent à habiter la page. J'ai eu beaucoup de mal à entendre la voix de ce père, Laurent Petitmangin n'étant pas toujours conséquent quand il lui donne la parole.

"Août, c'est le meilleur mois dans notre coin. La saison des mirabelles. La lumière vers les cinq heures de l'après-midi est la plus belle qu'on peut voir toute l'année. Dorée, puissante, sucrée et pourtant pleine de fraîcheur. Déjà pénétrée de l'automne, traversée de zeste de vert et de bleu. Cette lumière, c'est nous. Elle est belle, mais ne s'attarde pas, elle annonce déjà la suite. Elle contient en elle le moins bien, les jours qui vont rapidement refroidir."

"Déjà pénétrée de l'automne…" Difficile d'assortir le langage familier du père, fait de phrases courtes et factuelles, un peu molles elles aussi, à de telles envolées sans que cela sonne faux. Pourtant, je l'ai vu être juste ce père quand il nous parle de ses garçons :

"Ils étaient beaux mes deux fils, assis à cette table de camping. […] Ils étaient assis dos à la Moselle, et j'avais sous les yeux la plus belle vue du monde."

Quoique restant à la lisière de bien des sujets, ce roman pose plusieurs questions essentielles, celles de l'amour paternel, des espoirs déçus, des blessures cachées, de la dévastation des silences, de la difficulté du pardon, tout en en laissant autant en suspens. On ne saura rien, ou si peu, de ce "fil de nos jours Chaque jour plus mince" de Supervielle, on ne saura rien des ressorts intimes des personnages dont certains auraient mérité d'être plus fouillés. Je pense à Fus, évidemment. Qu'est-ce qui le pousse à gagner les rangs du FN ? Est-ce le désoeuvrement ? le besoin de mettre de la vie dans sa vie ? une réaction envers et contre ce père mollasson encarté au PS dont Fus rejette le modèle ? L'a-t-on approché ? Est-ce de sa propre initiative ? Est-ce par amour pour sa petite amie "issue d'une famille de polaques" ? On saura bien peu de choses de l'affection qu'il a pour Gillou son cadet qu'au passage on aimerait apprendre à connaître et, au final, on saura bien peu de choses de ce père taiseux qui, après avoir perdu sa femme, est en passe de perdre son fils aîné.

À mon sens, beaucoup de ces écueils trouvent leur explication dans le choix de confier la narration à ce "je" bien largué, qu'il faut tout le temps prendre par la main et qui ne sait qu'ânonner une longue litanie de constatations qui le ramène très souvent à lui-même et où l'émotion perce trop rarement.

"Est-ce qu'on est toujours responsable de ce qui nous arrive ? Je ne me posais pas la question pour lui, mais pour moi. Je ne pensais pas mériter tout ça, mais peut-être que c'était une vue de l'esprit, peut-être que je méritais bel et bien tout ce qui m'arrivait et que je n'avais pas fait ce qu'il fallait."

J'aurais aimé ressentir ce "Ce qu'il faut d'amour Au fond du silence" qu'écrit Supervielle. L'occasion était belle, pourtant.
Au moment de dire les derniers pas qui rapprochent ce père de ses enfants après des années de dérive loin les uns des autres, l'auteur choisit l'ellipse, me frustrant plus encore, si tant est que ce soit possible. La fin tombe, assez peu conventionnelle, un bon point soit, mais ambiguë. Elle aurait dû me surprendre, elle m'a seulement donné l'impression que Laurent Petitmangin ne savait plus comment rallier le point final de ce roman décidément trop court.

1er roman, lu pour la session 2021 des #68premieresfois

Lien : https://www.calliope-petrich..
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J'ai découvert Ce qu'il faut de nuit dans le cadre du Prix des Lecteurs U 2022, il est l'un des six romans en compétition. Je n'en avais jamais entendu parler avant de le recevoir, je n'avais donc aucune attente dessus, surtout que c'est le premier roman de l'auteur. Malgré une intrigue prometteuse, je n'ai pas particulièrement aimé ma lecture, je ne l'ai pas détestée non plus ; elle ne m'a fait ni chaud ni froid.

L'histoire se déroule en Lorraine, où un homme élève seul ses deux fils depuis la mort de sa femme. Les années passent, les garçons grandissent, et ils prennent chacun leur propre route. La relative tranquillité familiale se brise lorsque Fus, le fils aîné, se rapproche d'un groupe de jeunes affilié à l'extrême-droite. C'est une trahison pour le père, qui a soutenu toute sa vie le parti socialiste : il ne sait plus comment se comporter avec Fus et communiquer avec lui.

Si j'ai eu du mal à rentrer dans l'histoire, c'est notamment parce que je ne me suis aucunement attachée aux personnages. Ni au père, ni aux fils ! Les personnalités des uns et des autres ne sont pas assez creusées à mon goût, je n'arrivais pas à les cerner pour mieux comprendre leurs comportements. C'est surtout l'attitude du père que j'ai eu le plus de mal à comprendre. Car malgré la différence d'opinion politique, Fus reste un bon garçon, qui travaille, qui prend soin de son frère. J'ai du mal à envisager qu'on puisse à ce point s'éloigner de ses enfants pour des divergences politiques.

La plume ne m'a pas touchée non plus, je ne prenais pas de plaisir à découvrir l'histoire de cette famille à travers les « môman », « le Jérémie » et autres formules qui ne mettent pas en valeur les personnages… Enfin, la fin est venue un peu trop vite à mon goût, j'ai eu une impression de bâclé. Ce roman m'a fait penser au Goncourt 2018, Nos enfants après eux de Nicolas Mathieu, que je n'avais pas du tout aimé. Je ne suis peut-être pas faite pour ce genre de roman ! Même si je suis passée à côté de cette lecture, j'ai vu que le roman a gagné plusieurs prix et je suis contente qu'il ait trouvé son public.
Lien : https://laulettee.blogspot.c..
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Je ne lis jamais les critiques avant de lire un livre car j'ai peur d'être influencé. En les lisant après coup, je me dis que je suis passée à côté de ce livre....
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