Citations sur Les roses sauvages du maquis (27)
Il taisait l’indicible peur, l’odeur de la mort et celle du sang, se limitant à des « C’était dur ! » et esquivant par « On s’en est sorti, c’est l’essentiel ». Les détails sordides n’avaient plus leur place dans leur existence. La mémoire fécondait l’histoire, mais cette histoire-là n’était plus la sienne. Mariette buvait ses paroles. Elle ne le quittait pas des yeux et, à la moindre occasion, allongeait la main pour le toucher comme pour s’assurer qu’il ne s’agissait pas d’un mirage.
Insensiblement, ils s’étaient rapprochés jusqu’à se frôler. Puis, subitement, tout avait basculé et ils s’étaient enlacés. La passion revenait, les entraînant dans un monde irrationnel, guidés par leurs sens. Elle le précéda dans la chambre et ils s’écroulèrent sur la courtepointe du lit. Vincent s’abandonnait, retrouvait spontanément ses gestes d’antan et une virilité sans défaillance. Il était fort tard quand la fatigue eut raison d’eux.
« On ne fait rien de bien quand on a la tête ailleurs », se répétait-il et il concentrait ses pensées sur Mariette. Ce n’était pas un sentiment d’expiation qui l’enchaînait à son épouse, mais une tendresse incommensurable qu’il ne voulait surtout pas risquer de remettre en cause et dont il était persuadé qu’elle leur permettait d’éloigner une fatalité contre laquelle il pensait pouvoir lutter. Mais le destin en avait décidé autrement.
Un malaise l’envahit à l’idée qu’elle était désormais sortie de sa vie. Il n’avait jamais joué les séducteurs ni recherché les aventures amoureuses. Il ne s’étonna même pas que l’on puisse s’éprendre de deux femmes à la fois. Il n’avait pas l’impression d’avoir trompé Mariette. Toutes les deux lui étaient chères. Il avait simplement découvert autre chose dans les bras de Clarisse. Elles étaient complémentaires, mais son engagement pour l’une l’éloignait de l’autre.
La faim tenaillait les estomacs, et le ravitaillement de ces hommes en cavale s’avérait aléatoire et relevait parfois de l’impossible. Sa vie avait basculé dans l’univers glauque et insensé de la guérilla. Il avait découvert la révolte et la violence, lui qui n’avait toujours aspiré qu’à la paix. Il avait appris à contenir la rage qui bouillait en lui, à rester constamment sur le qui-vive, à ne plus s’abandonner, malgré la fatigue, à un sommeil lourd qui occultait les dangers.
« La vie n’est qu’un miroir et, si tu lui souris, elle te renvoie ton image. »
Bien que les sangs aient la même composition cellulaire, il existe un polymorphisme des divers éléments du sang entre les individus. Ce qui fait que toute transfusion nécessite une compatibilité sanguine entre donneur et receveur.
Au fil des pages, il découvrait la mémoire d’une vie : instants de joie fixés pour l’éternité et qui venaient égayer les moments de nostalgie. On n’y voyait que le bonheur.
Elle était si loin de tout ce qu’il avait tenté de saisir : ce regard en amande d’un bleu océan, assuré et confiant, presque provocateur, ces cheveux dorés relevés en un chignon étudié, ce teint de porcelaine, non, jamais elle ne lui était apparue ainsi. Il découvrait une inconnue paradoxalement fragile et forte.
Le goût sucré de sa peau, ses cheveux épars, ses lèvres qui se collaient aux siennes attisaient le feu qui le rongeait. Dans l’ivresse des sens, il avait perdu la maîtrise de son corps et ne put ralentir le moment de l’orgasme, privant Clarisse de sa jouissance : acte incomplet et unilatéral qui lui laissait un arrière-goût de défaite. Il bafouilla quelques mots d’excuse.