Quelle chose étrange, mes amis, paraît être ce qu’on appelle le plaisir ! et quel singulier rapport il a naturellement avec ce qui passe pour être son contraire, la douleur ! Ils refusent de se rencontrer ensemble chez l’homme ; mais qu’on poursuive l’un et qu’on l’attrape, on est presque toujours contraint d’attraper l’autre aussi, comme si, en dépit de leur dualité, ils étaient attachés à une seule tête
L'abstention de la politique : le rôle du Démon.
« ... Sachez-le bien en effet, Athéniens : si, depuis longtemps, j'avais entrepris de faire de la politique, il y a longtemps que ma perte serait chose accomplie et que je n'aurais pu être utile, ni à vous, ni à moi-même ! Ne vous fâchez pas contre moi si je dis ce qui est vrai : c'est qu'effectivement il n'y a pas d'homme qui doive sauvegarder sa vie, s'il se met en franche opposition à votre égard, ou à l'égard d'une autre multitude assemblée, et qu'il empêche nombre d'injustices et d'illégalités de se produire dans l'État. Il est bien plutôt forcé que celui qui aspire à combattre réellement pour la justice, même, si peu de temps qu'il veuille sauvegarder son existence, la vie d'un simple particulier et non celle d'un homme public. »
"Mais voici l'heure de nous en aller, moi pour mourir, vous pour vivre. Qui de nous a le meilleur partage, nul ne le sait, excepté le dieu."
Anytus et Mélios ont le pouvoir de me tuer, mais ils ne peuvent me nuire.
Crois tu qu'un Etat puisse encore subsister et n'être pas renversé, quand les jugements rendus n'y ont aucune force et que les particuliers les annulent et les détruisent ?
Mourir, en effet, c'est l'une ou l'autre de ces deux choses; car, ou bien la chose est de telle sorte que le mort n'a absolument pas d'existence et qu'il n'a non plus aucune conscience de quoi que ce soit, ou bien, comme on le dit, c'est précisément un changement d'existence, et, pour l'âme, une migration de ce lieu-ci vers un autre lieu.
On ne doit donc pas non plus répondre à l'injustice par l'injustice, puisqu'il n'est jamais permis d'être injuste.
Est ce l'opinion du grand nombre que nous devons suivre et craindre, ou celle du seul juge compétent, s'il en est un ?
Mais peut-être bien n'est-ce pas, cela, Citoyens, qui est difficile, d'échapper à la mort : ce qui est en revanche bien plus difficile, c'est d'échapper au risque d'être jugé méchant, car c'est un risque qui court plus vite.
Car de la mort, nul n'a de savoir, pas même si ce n'est pas précisément pour l'homme le plus grand des biens; mais on la craint, comme si l'on savait parfaitement qu'il n'y a pas de plus grand mal !