Kabyles de la Chapelle et des quais de Javel
Hommes des pays loin
Cobayes des colonies
Doux petits musiciens
Soleils adolescents de la porte d’Italie
Boumians de la porte de Saint Ouen
Apatrides d’Aubervilliers
Brûleurs des grandes ordures de la ville de Paris
Ebouillanteurs des bêtes trouvées mortes sur pieds
Au beau milieu des rues
Tunisiens de Grenelle
Embauchés, débauchés
Manœuvres désoeuvrés
Polaks du Marais et du Temple des rosiers
Cordonniers de Cordoue
Soutiers de Barcelone
Pêcheurs des Baléares et du cap Finistère
Rescapés de Franco
Et déportés de France et de Navarre
Pour avoir défendus en souvenir de la vôtre
La liberté des autres
Esclaves noirs de Fréjus
Tiraillés et parqués, au bord d’une petite mer
Où peu vous vous baigniez
Qui évoquiez chaque soir
Dans des locaux disciplinaires
Avec une vieille boite à cigares
Et quelques bouts de fils de fer
Tous les échos de vos villages
Tous les oiseaux de vos forêts
Et ne venez dans la capitale que pour fêter au pas cadencé
La prise de la Bastille le quatorze Juillet
Enfants du Sénégal
Dépatriés expatriés, et naturalisés
Enfants indochinois
Jongleurs aux innocents couteaux
Qui vendiez autrefois aux terrasses des cafés
De jolis dragons d’or faits de papier plié
Enfants trop tôt grandis et si vite en allés
Qui dormez aujourd’hui
De retour au pays, le visage dans la terre
Et des bombes incendiaires labourant vos rizières
On vous a renvoyé la monnaie de vos papiers dorés
On vous a retourné vos petits couteaux dans le dos
Etranges étrangers
Vous êtes de la ville, vous êtes de sa vie
Même si mal en vivez, même si vous en mourrez.
Une minute de printemps
dure souvent plus longtemps
qu'une heure de décembre
une semaine d'octobre
une année de juillet
un mois de février
Dans un ruisseau de larmes
une fleur s'est noyée
Dans un ruisseau de sang
le soleil s'est couché
quelque chose de pourri voulait le consoler.
Exilé des vacances
dans sa zone perdue
il découvre la mer
que jamais il n'a vue
La caravane vers l'ouest
la caravane (...) vers l'Etoile du Nord
ont laissé là pour lui
de vieux wagons couverts de rêves et de poussière
Voyageur clandestin enfantin ébloui
il a poussé la porte du Palais des Mirages
et dans les décombres familiers de son paysage d'ombres inhospitalières
il poursuit en souriant son prodigieux voyage
et traverse en chantant un grand désert ardent
Algues du terrain vague
caresssez-le doucement.
Grand Bal de Printemps
la musique de son nom
à toutes les lèvres est suspendue
Comme un jardin perdu qu'on vient de retrouver encore plus beau qu'avant
Et encore plus vivant
Arbres
grands arbres de Londres
comme les derniers bisons vous êtes relégués
très loin derrière les grilles
de vos grands parcs réservés
Arbres
grands arbres de Londres
vous êtes en exil
vous attendez l'orage quelqu'un à qui parler
du Règne végétal aujourd'hui menacé
Mais des enfants arrivent
courant vers l'oasis de fraîcheur de lumière
laissant loin derrière eux
les fumées de la ville et ses déserts de pierre
Vacances de printemps
Trêve verte de l'été
Arbres de Londres vous souriez
car les enfants vous aiment comme vous les aimez
sans chercher à comprendre ce qu'ils ont deviné
Arbres de Londres
chefs -d'oeuvre du vieux musée des eaux et des forêts .
Mais l'amour est l'amour
N'écoutez pas mr Loyal
N'écoutez pas mr Légal
aimez-vous dès maintenant
et ne faites pas semblant aimez-vous tout de suite
et quand l'heure sonnera quittez vous bons amants
et puis retrouvez vous si le coeur vous le dit
bons amis pour longtemps, très longtemps dans la vie.
Même si vous ne le voyez pas d'un bon oeil
le paysage n'est pas laid
c'est votre oeil
qui peut-être mauvais.
si le chat joue avec la souris
c'est pour lui laisser sa chance
Dans la rue de Venise y a pas de gondoliers
et pas assez de roses dans la rue des rosiers
Mais dans la rue d'la Lune
très souvent elle y est