Citations sur À la recherche du temps perdu - Intégrale (177)
Je compris qu'il avait une arrière-pensée, qu'il m'en prêtait une, qu'il ne servirait mon amour qu'à moitié, sous la réserve de certains principes de moralité, et je le détestai.
- Comment m'ennuyer, mais voyons ! "joie ! pleurs de joie ! félicité inconnue !"
Les lieux fixes, contemporains d'années différentes, c'est en nous-même qu'il vaut mieux les trouver.
La résurrection au réveil - après ce bienfaisant accès d'aliénation mentale qu'est le sommeil - doit ressembler au fond à ce qui se passe quand on retrouve un nom, un vers, un refrain oubliés. Et peut-être la résurrection de l'âme après la mort est-elle concevable comme un phénomène de mémoire.
Ce qu'on aurait fait le jour, il arrive en effet, le sommeil venant, qu'on ne l'accomplisse qu'en rêve, c'est-à-dire après l'inflexion de l'ensommeillement, en suivant une autre voie qu'on n'eût fait éveillé. La même histoire tourne et a une autre fin.
Je regardais sur lui avec envie ces traits caractéristiques des Guermantes, de cette race restée si particulière au milieu du monde, où elle ne se perd pas et où elle est restée dans sa gloire divinement ornithologique, car elle semble issue, aux âges de la mythologie, de l'union d'une déesse et d'un oiseau.
Alors, que le malade lise, et les pages se tourneront silencieusement comme si elles étaient feuilletées par un dieu. La lourde rumeur d'un bain qu'on prépare s'atténue, s'allège et s'éloigne comme un gazouillement céleste. Le recul du bruit, son amincissement, lui ôtent toute puissance agressive à notre égard [...]
Alors j'entendis le tic-tac en un lieu fixe d'où il ne bougea plus. Je croyais l'entendre à cet endroit-là ; je ne l'y entendais pas, je l'y voyais, les sons n'ont pas de lieu.
Françoise en un sens était moins domestique que les autres. [...] Sa présence dans notre maison, c'était l'air de la campagne et la vie sociale dans une ferme, il y a cinquante ans, transportés chez nous, grâce à une sorte de voyage inverse où c'est la villégiature qui vient vers le voyageur.
[...] mes regards se sentirent croisés par l'incandescence involontaire et les feux des yeux de la princesse, laquelle les avait fait entrer à son insu en conflagration rien qu'en les bougeant pour chercher à voir à qui sa convive venait de dire bonjour, et celle-ci, qui m'avait reconnu, fit pleuvoir sur moi l'averse étincelante et céleste de son sourire.