Citations sur Comme un château défait/Syllabes de sable (46)
Le temps est vieux…
Le temps est vieux, le temps est vain,
vieillard impénétrable,
en lui tu respires, tu t’éloignes.
Comme la nuit est longue
et lourde ! et l’encre si noire !
Tu inventes d’autres rumeurs
et le temps parmi d’autres mots obscurs
sème ses ombres sur la mer.
Désir du désir…
Désir du désir jamais rassasié du corps
de l’autre comme d’un horizon qui s’éloigne
à mesure. Ici tout tremble
De volupté, danse qui de toi
te rapproche, rose de chair heureuse
respirée dépliée
sous un plafond d’étoiles
et d’inquiétude.
Un savoir infini…
Un savoir infini coule entre les rives,
tu regardes l’eau chargée du sang des hommes,
tu es uni au fleuve et au ciel.
Et le temps qui te semblait passer
n’est plus du temps.
Tu te souviens de la présence
sans nom des choses comme d’une musique
mentale et proche et presque lisible.
Illisible visage
TU SERAIS UN ARBRE CALME…
Tu serais un arbre calme
modulant feuille à feuille des syllabes
éparses, étranger aux heures,
par un clair après-midi de juillet.
Tu serais l’étreinte de l’eau
et du vent, si proche du chant,
à l’embouchure de quelque fleuve secret,
si frêle aussi à l’horizon d’une voix
Qui cherche le chemin pressenti.
Tu serais ce que tu n’as jamais dit,
jamais vu ni rêvé ni pensé,
Tantôt fouet tantôt silence,
souriant miroir où quelquefois passent,
sur fond d’enfance, des images légères.
Il n'y a pas d'hiver
dans les choses,
ni grilles
ni paroles stagnantes.
II n'y a pas d'énigme
dans le lait, il n'y a
pas de brume dans la pierre,
ni rire dans les nœuds d'angoisse.
Mais il y a des terres enfouies
et qui renaissent,
des récits qui circulent entre
La chair et le souffle,
des cités lyriques entre soleil et pluie
et dans tes yeux le temps fertile.
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Les objets se sont endormis, tu parles
dans leur sommeil, ils tombent
sans retour dans la parole.
Tu écoutes en eux d’obscures clameurs,
des confidences, des énigmes, des colères.
Avec les mots commence le monde
tu es dans le vertige immobile des choses
fixant l’horizon indécis du Temps.
Atteindre …
Atteindre, fût-ce d’en bas,
les points d’or de la voûte, atteindre
l’intarissable silence qui te construit.
Ne te retourne pas comme à l’appel
de la terre ultime, ouverte.
Pour la première fois, promise, la voici,
perceptible, souveraine, l’autre parole
qui, aussitôt, se dissipa.
Écoute au-dessus de ta tête…
Écoute au-dessus de ta tête
passer les mots silencieux ! et tous ces bruits
muets des intimes désastres,
Ces guerres qui n’en sont pas, ces cris
que nul ne peut entendre, ces tragédies
Étouffées dans le sable du désert,
ces prières à la mesure des dieux morts,
ce grand spectacle des paroles mortes !
Visage affamé de l’intérieur…
Visage affamé de l’intérieur,
visage de nuit avec
ces ombres qui palpitent dans leur prison
d’os froids, en lui tu existes
tu te défais.
Ainsi le temps
à pas retenus s’avance
dans l’invisible ardeur.
Y a-t-il au monde quelque chose de plus grave que la blancheur …
Y a-t-il au monde quelque chose de plus grave
que la blancheur ? quelque chose
de plus immobile, de plus achevé
Que la blancheur ? y a-t-il au monde
chose plus proche et plus
Inatteignable dans l’enivrement
toujours de la première fois
et la continuité des choses d’au-delà ?