L'année 1908 fut marquée par l'apparition du ballet russe que Serge Diaguilev promena depuis lors dans des tournées annuelles sur toutes les scènes d'Europe et d'Amérique. La chorégraphie ne fut pas seule à bénéficier de cette vogue. En même temps que les bonds prodigieux de Nijinski et la grâce de la Rarsavina, triomphaient les décors et les costumes imaginés par Alexandre Benois et Léon Bakst.
L'ignorance ou la méconnaissance de l'art russe s'expliquent surtout par la pénurie dans ce domaine de travaux de recherche ou de vulgarisation scientifique. Nos manuels d'Histoire de l'art les plus récents passent sous silence l'art russe ou ne lui attribuent qu'une place infime et dérisoire. Alors qu'il existe des montagnes de publications d'archives et d'ouvrages critiques sur l'art français, flamand ou italien, tout le bagage d'un historien de l'art russe tiendrait aisément sur quatre ou cinq rayons de bibliothèque. La Russie est restée à cet égard une « terra incognita » ou, pour employer l'expression que le byzantiniste Strzygowski applique à l'Asie Mineure, « un pays neuf de l'histoire de l'art ».