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Citations sur Revenir à toi (149)

Elle se demande comment elle a pu tenir sans savoir, comment elle a survécu une fois que ses questions se sont épuisées, une fois que que son père les a quittés, lui aussi, quand elle n'avait plus la rengaine de Marcelle et les yeux abattus de son grand-père.
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Magdalena étudiait sans relâche, avec un soin et une exigence irréprochables. Pas pour être la meilleure, simplement pour tenir, surnager au-dessus de cette eau profonde qui pouvait la happer dans un tourbillon.
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Le poudrier s'ouvre et se referme dans un pli de la mémoire de Magdalena.
Et ça lui revient d'un coup. A ce moment précis, ça lui explose au visage, ça crève ses sens, ça donne un coup d'arrêt au fil de ses pensées. Comme le souffle d'une explosion : le parfum de la poudre de ma mère.
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(Monologue du chœur – Antigone, de Jean Anouilh)
Et puis, surtout, c’est reposant, la tragédie, parce qu’on sait qu’il n’y a plus d’espoir, le sale espoir ; qu’on est pris comme un rat, avec tout le ciel sur son dos, et qu’on n’a plus qu’à crier, - pas à gémir, non, pas à se plaindre, - à gueuler à pleine voix ce qu’on ne sait peut-être pas encore. Et pour rien ; pour se le dire à soi, pour l’apprendre, soi.
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Elle ferme les volets, mais laisse la porte grande ouverte. Larmes dans
les yeux de Magdalena. Je m’en fous qu’elle ne me parle pas, tant qu’elle
me garde près d’elle.
Elle la suit.
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Magdalena devrait s’enfuir à cet instant même. Elles se sont vues.
C’est fait. Rien d’autre à ajouter, sauf clocharde. Clocharde près du canal.
Mais elle est clouée sur place par une insondable colère. Une colère
épaisse faite d’abandons, d’amertumes, de tout ce qui n’a pas été prononcé,
de toute l’insouciance dont elle a été privée, son adolescence lestée de rêves
sombres, des masques agrafés au visage au fil des rôles, des rencontres
amoureuses manquées. Elle lui en veut de cette porte claquée, de son
indifférence, encore, de son ignorance, d’être si laide, si vieille. Affreuse
moche dégueulasse. Elle a soudain l’impression de sombrer, d’être
contaminée par ce royaume qu’elle croyait miraculeux, et qui maintenant la
désosse, la détruit, s’effondre sur lui-même.
Elle jette le pull et va chercher une pierre. Elle en trouve une belle à
côté du pont. Elle casse un carreau avec, passe son bras, actionne la poignée
intérieure de la fenêtre de la cuisine, et escalade le chambranle. Elle est
dedans.
Dedans, tu ne m’échapperas pas.
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Apollonia se dirige maintenant vers la maison. Elle est à portée de
main et Magdalena, d’un geste furieux, lui arrache le pull bleu. Apollonia
alors se retourne et, dans une rotation de tête qui s’apparente à celle des
rapaces, vient planter ses yeux dans ceux de sa fille. Soudain, figée.
Paralysée devant l’autorité maternelle qui, l’instant suivant, lui claque la
porte au nez.
Le pull reste dans la main de Magdalena. Elle cogne son front contre le
battant de bois en entendant la clé tourner dans la serrure. Ce son remet son
esprit en marche, une idée après l’autre. Magdalena pose le pull sur ses
épaules, en se disant qu’il pue.
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Quand elle rouvre les yeux, elle voit deux jambes. Deux jambes toutes
proches recouvertes d’un jean sale. Magdalena hasarde un bonjour. Pas de
réponse. Elle se redresse, passe la tête en dehors de la tente. Elle est là.
Apollonia.
Apollonia, plantée devant elle.
Chemise à carreaux tachée, le pull humide dans le poing.
Magdalena bondit, fait face à sa mère. Dans son cerveau se percutent
des images, des mots. Elle voudrait la toucher, la prendre dans ses bras.
Mais Apollonia a fait un pas en arrière, ne la regarde toujours pas, fixe le
pull.
Magdalena dit, maman.
Doucement, le premier.
Maman, appellation oubliée, enterrée pendant des décennies, à
l’instant prononcée.
Apollonia s’est retournée, elle est venue récupérer ce qui lui
appartient.
Cheveux blancs hirsutes, bouche pincée, visage fripé, regard d’acier,
colère sourde.
Magdalena voit ce corps frêle d’une vigueur inattendue se diriger à
grands pas vers le terrain. Porte et volets de la maison sont ouverts.
Magdalena enfile ses baskets et la suit en disant de plus en plus fort,
maman.
Apollonia ne lui répond pas. Apollonia ne parle pas. Elle marche vite,
penchée en avant. Jambes fines et rapides, équilibre instable, dynamique
intense et tendue, exacerbée par une connaissance aiguë de l’espace, chaque
pas sait où il se pose.
Apollonia s’arrête à d’invraisemblables endroits, se hisse sur le tas de
détritus, fait une halte devant un des murs de la maison, le visage à
quelques centimètres du crépi, monte sur une chaise en plastique qui ploie
sous son poids, rejoint le canal, puis tourne autour des ruches plusieurs fois.
Elle suit un parcours bien défini, ritualisé, automatique.
Derrière la mère, il y a la fille sidérée qui tremble du genou, qui n’en
croit pas ses yeux, qui l’appelle, qui n’a plus de voix, qui voudrait la
toucher, qui n’y arrive pas. La fille a perdu sa superbe, ni éclat ni grâce. Elle
suit sa mère comme une enfant folle, une impossible enfant qui tend les
bras pour arrêter l’élan, mais retient son geste de peur que l’apparition ne
disparaisse et que l’enchantement ne se rompe.
Le corps de Magdalena se tasse, se recroqueville autour de la brisure
de son enfance, se racornit autour de son angoisse. Magdalena zigzague
derrière le jeans sale, remarque les pieds nus dans les sabots en plastique.
Elle talonne Apollonia, continue de l’appeler, comprend qu’elle n’obtiendra
aucune réponse, ses jambes à elle sont lourdes, elle a du mal à avancer.
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Sur le chemin du retour, elle écoute le bruit dans les feuilles, les
brindilles qui craquent sous ses pas, les mouvements à peine perceptibles de
l’eau, la grenouille qui plonge, elle regarde les pelures jaunes et grises de
l’écorce des platanes se défaire. Elle sourit, se sent légère. Son allure est
vive. Elle ne saurait dire pourquoi après la sidération, le voyage,
l’inquiétude, la tristesse de la porte close, la présence de Jordan, le sommeil
profond, pourquoi la joie la saisit à cet instant, une forme d’insouciance
retrouvée alors qu’elle est dans le giron de l’absente, mais la beauté du
territoire qu’elle découvre ce jour – souligné d’arbres, un canal entre deux
mers, des champs à perte de vue, des villageois heureux –, ce royaume la
bouleverse.
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Des mois à vociférer, grogner, maudire ses grands-parents, à ignorer
son père lors de ses rares visites, et Magdalena s’était tue pendant presque
deux ans. Elle lâchait un oui, un non, un merci, les yeux au ciel le plus
souvent. Le silence chez Marcelle&Michel était à couper au couteau. La
grand-mère tentait de lui parler, consolider les digues, bâtir un pont, ce qu’il
faudrait pour vivre plus sereinement. Marcelle en voulait à Magdalena. Elle
considérait qu’ils avaient fait beaucoup d’efforts, Michel et elle, qu’ils
avaient secouru cette famille déchirée.
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