L'hiver du mécontentement

Le chaos, c'est quand tout devient possible.

"Il n'y a qu'à regarder des enfants. L'amour, les romans, la tragédie, la vie c'est pour les filles.
Les garçons, ils jouent."

Y a pas que les princesses qui ont le droit d’être connes, dit Candice. Elle dit ça gentiment, dans deux ans elle adorera Lady Di.

La comédie, ce n'est que ça, le jeu pour le jeu, le divertissement, les cabrioles. D'ailleurs, on peut dire comédie pour dire théatre. Et les couples se font et se défont. Les amants rentrent dans les placards, les squelettes en sortent.
Dans les romans c'est autre chose. Les romans, on les lit tout seul, on les lit dans la tête, avec sa voix à soi, alors ils résonnent. Ils ne sont pas vertueux, ils ne donnent pas de leçons de morale, ils ne rassemblent pas des gens dans une salle pour les édifier, les faire rire du spectacle de nos ombres portées. Ils ne parlent pas de la société, ni des rôles qu'on y joue.... Dans les romans l'amour est tragique.

Ils se trimballent dans des bagnolles qui valent un appartement, alors que toi, tu n'arrive pas à payer ton loyer. Mais c'est normal, ils possèdent des quartiers entiers. Des quartiers entiers de Londres ! Ils possèdent le terrain depuis le XVIIe siècle. Ils doivent être moins d'une vingtaine, tous plus ou moins cousins de la reine. C'est indécent. Un jour, si ça continue, ils achèteront carrément des avions pour se déplacer. C'est immoral.

Et ils débouchent dans une pièce moins vaste que la première et le bar, où trône un tel bloc d'obsidienne le grand piano à queue aux arêtes brillantes, couvercle ouvert, lyre et pieds sculptés, masse inquiètante et plus noire que la nuit qui l'entoure, reflétant depuis les profondeurs de sa laque parfaitement lisse, comme des éclairs dans une eau calme, la moindre lumière des chandeliers posés au sol autour de lui. Aussitôt la musique résonne, assourdissante. L'air de la pièce en est saturée. On dirait que les flammes des bougies ocillent en cadence.

Elle(*) a demandé ce qu'on jouait et elle a semblé apprécier que les filles s'attaquent à Richard III. Elle n'est pas comédienne. C'est une femme politique. Elle dit qu'en politique aussi ça change pas mal de choses d'être une femme.
"C'est au café que Nancy nous a dit qui c'était : la chef du parti Conservateur. C'est pour ça qu'on l'avait vue à la télé. Elle prenait avec des comédiens de "la Royal" des cours de diction pour les discours, pour gommer un accent pointu qu'elle avait, un accent qui faisait populaire [...] Il parait qu'elle était fille d'épicier.

(*) Margaret Thatcher

Ça n'a pas de fin, cette histoire. On dirait que les familles sont faites pour ça. Elles créent des règles, des rôles, des interdits et des silences infranchissables . Tu deviens un individu, mais dans la famille non, tu dois tenir un rôle, respecter des règles, ne pas transgresser, te taire. C'est tout ce qu'on attends d'elle , et c'est justement ce qu'elle ne sait pas faire. À la fin c'est toujours à elle qu'on en veut - Tu sais bien comment est ton père - Un sale con - Candice, c'est Noël, fais le pour moi - Pour toi, maman.

Ça lui fait toujours une drôle d'impression de repasser devant tous les coins qu'elle a fréquenté dans son enfance; son ancien lycée, puis son ancienne école, la mairie, l'épicerie au coin de la rue et de la salle de boxe, la bourse alimentaire dans les locaux de l'Armée du Salut, qui sentait l'eau de Javel et la sauce de viande, et parfois l'oeuf dur bien sûr, ce qui faisait un drôle de mélange, et puis les maisons, les maisons des copains, les terrains vagues qui étaient comme des îles au trésor dans ce quartier de Islington pareil à une étendue marécageuse

Depuis janvier, les Sex Pistols n'existent plus......Les Clash sont des révolutionnaires, mais leur musique devient commerciale....Adam and the Ants a la folie des débuts, sa voie dérape dans les aigus mais ça n'a pas la puissance des Pistols. Dans ses chansons il parle d'embouteillages et de collégiennes crades malgré leurs chaussettes blanches.