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Lorsqu'un producteur propose au narrateur, metteur en scène avant-gardiste, de monter un spectacle autour d'Odette, LA célèbre accordéoniste, celui-ci, bien que flatté, n'en est pas moins sceptique, tant un gouffre artistique sépare l'organisateur de théâtre de la reine déclinante du piano à bretelles.
Quelques heures plus tard pourtant, à la fin d'une représentation, le metteur en scène croise Odette au restaurant où il est allé dîner avec sa troupe. Cette drôle de coïncidence fait office de détonateur. le « metteur » y voit un signe du destin, une injonction venue de loin, il accepte le projet, il va travailler avec la star de variété octogénaire à accordéon et cheveux rouges.

« L'étoile et la vieille » narre cette rencontre improbable, la réunion de l'icône de la musique populaire avec la musique savante, de la vieille dame kitsh et du « metteur » intello.
En mettant en présence deux personnes à des années-lumière l'une de l'autre, Michel Rostain ordonne un festival de bonne humeur animé d'émotions vives et contrastées.

La première partie, joviale et enjouée, offre des moments piquants, empreints de sourires et de badinages. le metteur est sous le charme, devenu satellite, en apesanteur autour de l'astre Odette. Son extraordinaire présence scénique et artistique, sa fascinante personnalité, opèrent chez l'homme incertain et un brin indolent, un puissant magnétisme.

Malgré leurs différences, personnelles, générationnelles ou musicales, les deux artistes apprennent à se découvrir, à s'apprécier, à s'aimer.
Entre eux, ça crépite de tendresse et de respect, mais ça fait aussi des étincelles, ça crée des turbulences atmosphériques, ça occasionnent des télescopages inattendus dans une mise en scène colorée. Puis peu à peu le décor s'assombrit, la partition se joue sur les accords dissonants d'une boîte à chagrins. L'air de musette s'empreint de nostalgie.
Car Odette est une vieille étoile, proche de la disparition. Passée en mode alternatif, elle ne brille plus que par intermittence, elle clignote et papillote comme une enseigne lumineuse en voie d'imploser, son noyau dur fait des siennes, ses neurones s'emballent, Odette décline, et chaque jour qui passe, le metteur doute de plus en plus qu'elle puisse assurer le spectacle.
Le compte à rebours affiche le grand âge d'une étoile affaiblie à l'éclat voilée. Sa musique embrouillée, son esprit confus, ne révèlent plus la star adulée mais plutôt la vieille dame qui se rapproche dangereusement du trou noir, aux prises avec un temps désormais assassin.
Le spectacle pourra-t-il avoir lieu ? « The show must go on » dit-on, oui mais…quand une étoile n'émet plus que des rayons diffus, que faut-il faire? Jouer ou annuler? Tenaillé entre empathie et évidence, le metteur, tout comme le lecteur, compte les heures qui le séparent du lever de rideau…

Après le récit autobiographique « Un fils », Prix Goncourt du premier roman 2011, l'auteur s'inspire à nouveau de la réalité pour relater ce rendez-vous artistique teinté d'humour tendre aussi étonnant qu'inattendu.
Malgré l'inutilité de casser le rythme du roman en dévoilant de façon saugrenue, en plein milieu de récit, la source d'inspiration du texte et imposer ainsi de façon radicale le nom de la célèbre accordéoniste Yvette Horner derrière le personnage d'Odette, « L'étoile et la vieille » est un sympathique et émouvant roman sur la passion musicale, sur les affres de l'âge, sur le douloureux déclin de l'artiste.
S'il y a ça et là quelques couacs harmoniques, quelques longueurs et inégalités, l'on prend toutefois plaisir à écouter vibrer « le branle-poumon » d'Odette/Yvette sur la scène imaginaire de Michel Rostain.

Merci aux éditions Kero et à Babelio pour cette opération Masse Critique.
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Livre émouvant surtout l'avant dernière page , livre un peu inégal , qui mérite 3 , 4 étoiles , certains livres ne se notent pas , ils ne sont pas spécialement bien écrits mais ils dégagent une grande humanité .
J'ai un peu de mal avec Michel Rostain , j'ai lu ˆ le fils ' , déroutant , déjà le titre si court , si impersonnel pour cette histoire si personnelle , et en recevant de Babelio , ce second livre de l'auteur , je me disais ' Mais qu'est- ce qui m'a pris de vouloir lire ce livre ' , et encore une fois l'auteur m'a déroutée et séduite , oui séduite par le mélange assez juste entre propos insignifiants et phrases bouleversantes .
J'avais envie de mettre pleins de citations du livre plutôt que de mettre une critique , difficile de mettre des mots sur l'émotion ressentie , moi qui n'ai pas trop envie de lire en ce moment , ce livre arrive au bon moment pour me redonner envie de lire , évidemment j'allais pas arrêter définitivement de lire ....
Ce que j'ai aimé chez l'auteur c'est sa façon de ne pas se prendre au sérieux , de casser les codes .
Oui c'est honteux de dire qu'on aime ' Odette ' dans certains milieux , il vaut mieux préférer ' Barbara ˋ , comment peut-on aimer ' Odette ' et ne pas être ringard se demande l'auteur , c'est un peu comme si une grande lectrice osait avouer qu'elle rêve de lire des Harlequins , non , non ça ne se fait pas .
Oui il y a des codes sociaux reconnus , ça c'est bien , ça c'est ringard et attention de ne pas s'emmêler les pinceaux , mais les codes sociaux bien établis ne sont-ils pas fait pour être détournes pour notre plus grand bonheur .
Car oui , quand le hasard ? , permet à l'auteur de rencontrer ' Odette ' , il vacille sur ses certitudes , rencontre magique , inattendue mais est-elle vraiment hasardeuse nous demande l'auteur .
Et puis la vieillesse vient brouiller les pistes , ah pauvres mortels que nous sommes .
Désolée si ma critique n'est pas très claire ....
Un livre avec quelques défauts mais avec un côté sublime , oui comme la vie .
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Le langage est musique et, ici, les mots sont les notes disposées sur une portée de 219 pages.
L'auteur a construit son livre comme une suite symphonique émotionnelle, depuis l'ouverture en passant par l'allegro, le scherzo, le fugato et le final, telle la musique savante que le « metteur » – Michel Rostain est metteur en scène d'opéras – , fréquente en érudit et en avant-gardiste (sa description de « l'anarcho-laïcar de type irrespect agressif contre les pouvoirs rassis et les bonnes âmes » le positionne dans le monde artistique puriste, rigoureux, novateur presque mystique, bien loin de la culture de consommation).
Au centre des mouvements, un terme bien connu des émissions de variétés rétro-nostalgie, tant appréciées en notre décennie, surgit décalé : le medley.
Quand la Musique rencontre la musique voire la musiquette ou musique populaire, les deux se dévisagent, s'étreignent et s'écharpent, le soufre de l'une exalte la souffrance de l'autre. S'apprivoisent-elles ?
Un peu, beaucoup, pas du tout, jusqu'à la folie : un véritable mélodrame se joue (autre terme plus théâtral et combien évocateur) hors réalité dans cette rencontre entre Odette l'accordéoniste, ancienne gloire des années 50 n'acceptant pas de n'y être plus, reine déifiée de la musique popu et le « metteur » sollicité pour la mettre en scène.
Dès le début du livre, nous reconnaissons cette femme aux cheveux flamboyants dont on (je) regardait (s) distraitement l'apparition kitsch à la télévision il y a quelques décennies et dont la musique, synonyme peut-être à tort de musette, nous (me) faisait (s) dresser les cheveux sur la tête, un peu comme elle ...
Nous nous reconnaissons dans ce que l'auteur en dit et nous imaginons plus qu'il ne faut ce bazar dans lequel elle vit et cet ego agaçant qu'elle porte en bouclier.
Puis, Michel Rostain introduit dans le scherzo une mise en garde qui nous déroute. Ce qui écarquillait nos yeux s'avère-s'avérerait déformé par la longue vue des années et le grossissement imaginatif de l'auteur.
Notre lecture reprend, différente, et nous tâchons de décoder fiction et réalité ; le doute subsiste...
Qu'importe ! Là n'est pas l'essentiel. La lecture devient de plus en plus ardente, à fleur de sensibilité.
Aime-t-on Odette ? Notre empathie se calque-t-elle sur celle du « metteur » ?
En ce qui me concerne, elle m'apitoie et m'agace, je la scrute et la rejette, je la plains et la maudis, je refuse l'aura si bien décrite par Michel Rostain. Sans doute suis-je trop méfiante ?
Je m'oublie et tente de comprendre la descente aux enfers de la « vieille » qui ne veut pas l'être, étoile qui s'éteint, jetant quelques derniers éclats autour d'elle, avide de conserver cette lumière qui fut l'oxygène de sa vie. Vie qui apporta du bonheur à d'autres vies.
Je frémis devant les doigts qui jouent dans ce vide qui ne l'est que pour nous.
Pitoyable et inébranlable condition de tout être humain : vieillesse et mort.
Toute sa cruauté apparaît dans la perte de ce qui fut, pire que la disparition finale.
La dissection de l'impuissance de tout homme devant ce délitement est présentée précise, sans espoir, en une attente douloureuse si le courage (?) d'en finir lui manque.
Finir. Finale de l'oeuvre. Finale de l'être. L'être et son oeuvre. L'oeuvre qu'est l'être.
Finale du livre en quelques lignes qui font mal mais qui rassurent : nous sommes tous pareils.
Il y a l'étoile et la vieille. Elle a brillé certes un peu plus que les autres, mais toutes s'éteignent et se rejoignent.
Nous suivons avec compassion les affres du metteur en scène qui sait qu'il va droit dans le mur, fidèle-infidèle à ses nobles convictions sur l'acte théâtral et sur l'approche scénique.
Elles éclairent les amateurs de créations artistiques. Elles leur confèrent les lettres de noblesse qui font oublier la médiocrité culturelle ambiante.
Un livre qui touche et le coeur et l'esprit, écrit dans un style naturel.

Merci à Babelio et aux Editions Kero de m'avoir permis cette découverte en avant-première.
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Surprise! A plusieurs niveaux! Même si l'on retrouve en sourdine la même facture de style, discrètement mélancolique mais sans pathos, le thème est beaucoup plus léger que pour «Le fils». La vieillesse n'est pas la mort, elle est le cours des choses. Elle est aussi à l'image de ce que fut la vie, bien ou mal remplie.

Autre énorme surprise : l'identité de l'étoile héroïne! Jusqu'à ce que l'auteur le confirme, l'on doute que ce soit possible. D'autant qu'il est difficile d'associer l'auteur et cette musicienne populaire. Même en regardant quelques vidéos en ligne (tout en reconnaissant comme le dit Michel Rostain que seul le spectacle, en live, permet la présence ensemble et la communion). Certes je me souviens d'une sorte de fascination éprouvée lors d'un reportage consacré à la dame, qui assume totalement son image, l'amplifie, en joue, la recrée sans relâche, et avec une honnêteté qui confine à l'innocence...Mais quand même!

Le récit est mené comme un thriller : aura t-il lieu ou pas ce fichu spectacle; jusqu'à la fin le suspens est conservé, car on l'a bien compris, malgré les ans, elle est capable de tout, notre vedette, du pire comme du meilleur, du fiasco au sublime.

Ecrit avant ou après «Le fils»? c'est la question qui me taraude. J'aimerais que ce soit après.

Lien : http://kittylamouette.blogsp..
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Une lecture qui m'a semblé facile par l'écriture de l'auteur mais à laquelle, paradoxalement, je n'ai pas beaucoup accroché: le thème de la vieillesse qui, a priori, ne m'emballe pas, l'entremêlement de l'histoire romancée avec l'évocation d'une vedette qu'on a l'impression de reconnaître, la façon qu'a l'auteur de désigner ses personnages de façon répétitive par leur prénom (Odette) ou leur fonction (le metteur)... ont fait que je n'ai pas éprouvé beaucoup d'empathie pour cette vieille dame qui n'accepte pas le temps qui passe.

Bien sûr, son déclin m'a fait mal au coeur mais il ne m'a pas bouleversée; je suis restée un peu extérieure, spectatrice du gala qui se prépare tout au long du compte à rebours du livre, sans avoir jamais vraiment l'impression de connaître les personnages.

Quoiqu'il en soit, un grand merci à Babélio et à Masse critique, ainsi qu'aux éditions Kero pour cette découverte que je ne regrette pas!

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Merci à Babelio et aux éditions Kero de m'avoir proposé ce roman de Michel Rostain.

La lecture de « L'étoile est la vieille » m'a un peu déroutée. Au fil des pages, mon intérêt a été inégal, et si j'ai passé un moment agréable en compagnie du roman, et il s'en est fallu de peu que je ne me perde en route.
L'auteur est metteur-en-scène, et je trouve que son roman est davantage mis en scène qu'écrit, en ceci que certaines scènes sont mises en lumière avec outrance quand d'autres émergent à peine de la pénombre, que la théâtralité déborde malgré le très peu de dialogues, et, pour tout dire, que le style m'a paru très confus, hésitant parfois entre la poésie et le burlesque. Après tout, la rupture de ton peut être un choix tout à fait acceptable, mais il ne m'a pas paru maîtrisé, et desservi par une forme un peu nébuleuse.
Michel Rostain nous propose un récit opératique, ouverture, allegro, etc… A l'intérieur de cette forme musicale, le récit se fragmente encore avec la dramaturgie propre du compte à rebours des répétitions d'un spectacle, récit dans le récit.
Par ailleurs, après 59 pages de lecture au cours de laquelle l'identité d' « Odette », étoile et vieille, n'aura échappé à personne, l'auteur nous explique, dans un scherzo, qui elle est, pourquoi il a choisi de ne pas donner les vrais noms à ses personnages. le fait qu'il ait choisi d'écrire un « roman » était déjà une première indication, mais cet « avertissement » m'a semblé maladroit, dissertant comme on pouvait s'y attendre sur le problème de la vérité et de la fiction, débat vieux comme le monde.
Tout le monde sait que se souvenir est déjà se mentir, alors fictionner ses souvenirs resterait le choix pour l'écrivain de tenter de se réapproprier une vérité qui émergerait à travers le travail de la création. J'ai trouvé ce passage inutile, parce qu'incongru à cet endroit du récit, et révélateur d'une impasse.
Michel Rostain aurait pu gagner en simplicité en proposant cette exégèse puisqu'il en ressentait le besoin au tout début du roman. Au lieu de ça, il casse sa narration, puis continue comme si de rien n'était. Je n'ai pas compris où il voulait en venir.
Malgré ces réserves, j'ai aimé le personnage d'Odette, tour à tour admiré et malmené, personnage de sa propre gloire, assumant celle-ci avec un cabotinage consommé, n'ayant eu de toute façon pas d'autre choix depuis son plus jeune âge, star inégalable et inégalée de son instrument, prêtresse d'un kitsch élevé au niveau du grand art. le « metteur », comme il s'appelle, est un peu moins flamboyant avec ses atermoiements sempiternels sur la valeur artistique d'une musique dite populaire qui lui semble indigne de son talent raffiné, de ses goûts avertis d'artiste évoluant dans les sphères élitistes. Là encore, vieux débat, qui a convoqué dans ma mémoire Gainsbourg et Béart (qu'est-ce qu'un art majeur, ou mineur ?), ou certaines scènes réussies du « Goût des autres » de Jaoui et Bacri, preuve que le roman avait du mal à monopoliser toute mon attention.
Je n'ai ressenti que peu d'émotion en lisant ce roman, si ce n'est à la toute fin, quand le récit devient pathétique. Michel Rostain trouve enfin un souffle, dépasse l'anecdote pour mettre à nu ses personnages hantés par le spectre de la mort. Peu importe qui est Odette, qui est le « metteur », le décor s'épure, le jeu est minimaliste, et la lectrice en moi s'est enfin sentie concernée et remuée.

Lien : http://parures-de-petitebijo..
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Je remercie Babelio et les éditions Kero pour cette lecture !

Odette est une star, une étoile. Virtuose de l'accordéon, elle connaît un succès sans faille et chaque nouvelle représentation renforce sa popularité. Même âgée, elle continue à être admirée. Les forces du destin vont la mener au metteur. Son style très avant-gardiste n'a rien pour lui plaire. Leurs univers sont aussi éloignés que la terre et le soleil. Amateur de musique classique et des plus grands compositeurs, il va néanmoins devoir monter un spectacle avec cette femme, cette vieille, dont le jeu ne lui inspire pas de bonnes vibrations.

L'étoile et la vieille, c'est donc la rencontre entre deux êtres, aux univers divergents mais qui vont apprendre à collaborer et à se découvrir. le metteur nourrit une forme de fascination pour elle, cette vieille aux goûts en matière de décoration démodés, qui semble avoir fait son temps.
L'auteur nous transporte entre confusion, amitié, inquiétude, admiration et incertitude dans une valse à trois temps: la découverte, la prise de conscience et la perdition. A la fin, la vieille entraîne l'étoile qui entraine le metteur. L'histoire d'une chute... dans la musique. Ne pas se rappeler des notes d'une partition peut sembler important à une personne extérieure. Mais quand jouer est la seule chose que vous savez faire et que vous êtes reconnu pour ça, pourquoi arrêter?
Michel Rostain nous embarque aux côtés de ses personnages, partiellement fictifs, dans l'histoire d'une rencontre où les univers se rencontrent. La passion qui se dégage de ce livre est saisissante. Mais il est bon de croire que la musique peut être le dernier point de rattachement d'un homme, au dernier stade de sa vie. Si l'on pouvait choisir sa mort, nul doute que se laisser emporter jusqu'à la folie dans la musique en serait une belle.

Michel Rostain manie les mots avec beaucoup de poésie pour nous présenter des héros touchants voir bouleversants. L'étoile et la vieille, c'est le drame d'une vie, mais d'une belle vie. Devrait-on dire deux vies, car Odette existe parce que le metteur nous en a offert le souvenir. Cette histoire n'est ni plus ni moins qu'une partition bien ficelée qu'on lit comme on écouterait un opéra.
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Lorsque l'on propose au metteur en scène Michel Rostain – ici le narrateur – d'organiser en 2002 un spectacle avec la grande accordéoniste Odette, le premier réflexe de celui-ci est de refuser : comment passer de Bach au musette ? Comment passer du rock de sa jeunesse à une valse ?

« Pas de valse donc, ni d'Odette, ni d'accordéon dans son capital génétique. le metteur étant de la génération d'après, il s'est construit autrement – pétards, manifs, rock, pop et cheveux longs. »

Et pourtant, il suffit d'une rencontre inattendue entre ces deux personnages pour que le courant passe, en tout cas du point de vue du metteur en scène, qui raconte cette période clé de sa vie. Une rencontre qui est à l'origine de ce roman.

La voix d'Odette, on ne l'entend pas, on ne la voit que par les yeux de ceux qui l'entourent. Or Odette se voit toujours comme la grande star qu'elle a été, des années auparavant – connue et reconnue partout où elle passe. Pour elle, elle est toujours l'étoile. Mais aujourd'hui elle a 80 ans et quand elle joue, elle oublie des notes, elle se fatigue vite. Pour les autres, elle est la vieille.

Tout le roman va se construire sur cette dichotomie, avec des moments de doute de chaque côté : des moments de grâce pour les auditeurs, quand Odette est de nouveau la grande Odette – et le spectacle peut se faire ; des moments de dépression intense quand Odette prend conscience qu'elle n'y arrivera pas. Et entre ces hauts et ces bas, une histoire se déroule, celle de la relation entre musique classique et musique populaire, celle de la relation entre le metteur en scène et l'ancienne star, et celle du dernier spectacle – avorté – de la grand Yvette Horner. Finalement ce spectacle importe peu, seul compte l'arrêt sur image de cette grande star. Une star qui parle d'elle-même à la troisième personne, qui n'écoute pas les autres, raconte sa vie d'une manière brillante, bref une étoile qui devient vieille …

Mais Michel Rostain nous fait surtout passer l'histoire d'une passion, celle d'une grande dame pour un instrument associé aux bals populaires et à la valse musette. « Si je ne fais plus de musique, je meurs » lui déclare Odette. Ou comment voir autrement l'accordéon …

J'avoue que j'ai entamé ce roman d'une manière dubitative. La quatrième de couverture ne m'avait pas préparée à ça, mais dès les premières pages, dès que j'ai rencontré Odette, j'ai été subjuguée. Ce n'est pas le roman du siècle, mais ici le support importe peu, ce qui importe c'est l'histoire qui est racontée – et elle l'est fort bien. Je regrette simplement le passage en trop, dès le deuxième chapitre, où il est dit que c'est une histoire vraie, et où les noms sont dévoilés. Cela aurait pu venir en épilogue plutôt que comme un cheveu sur la soupe.

Malgré ce détail, un bon moment de lecture, et une rencontre unique avec cette star que je connaissais pas et dont j'apprends aujourd'hui l'instrument. Sur ce, je vous laisse terminer votre lecture en musique … et rencontrer Odette à votre tour …

https://www.youtube.com/watch?v=70komeBheZY

Après avoir remporté la Coupe du monde de l'accordéon en 1948, Yvette Horner obtient le Grand Prix du disque de l'Académie Charles-Cros en 1950. Elle établit sa popularité en accompagnant la caravane du Tour de France à onze reprises. Durant sa carrière, longue de 70 ans, Yvette Horner donne plus de 2 000 concerts et réalise 150 disques, dont les ventes cumulées s'élèvent à 30 millions d'exemplaires. Elle a aujourd'hui 90 ans.
Lien : http://missbouquinaix.wordpr..
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Michel Rostain avait marqué la scène littéraire en recevant le Goncourt du Premier Roman à près de 70 ans pour le fils, chronique émouvante et très personnelle sur le travail de deuil qu'il avait du accomplir suite au dècès de son fils, mort d'une méningite foudryante à 21 ans. Si le livre ne m'avait pas totalement convaincu, j'avais apprécié la pudeur et l'élégance de sa plume.

Deux ans plus tard, alors même qu'il a été pendant près de 15 ans directeur de la Scène nationale de Quimper, il publie un second roman qui sort le 25 mars prochain, et que j'ai eu la chance de découvrir, sans savoir de quoi il en retournait, grace à Babelio et son opération Masse Critique.

Là encore, l'auteur va prendre comme point de départ de sa fiction une aventure qui lui est arrivé personnellement, puisque L'étoile et la vieille nous raconte la rencontre autour d'un projet musical commun entre un directeur de théatre breton et metteur en scène ( les coiencidences avec un prix goncourt du premier roman sont assez troublantes) et une star populaire et plus très jeune, dont les titres de gloire sont d'être considérées comme la reine de l'accordéon et d'avoir les cheveux oranges!!!

Même si on n'est pas forcément fou d'accordéon, n'importe qui aura deviné au bout de 2 pages que cette star sur le déclin n'est autre qu'Yvette Horner, cette star de l'accordéon, que je voyais beaucoup à la télévision pendant mon absence et qui effectivement, bien que cela doit faire au moins 15 ans que je n'avais plus entendu parler d'elle, traine derrière elle tout un aspect de la culture populaire, à des années lumières de l'image qu' a une scène théatrale subventionnée.

Bref, après une petite cinquantaine de pages de mise en place de cette rencontre, Michel Rostain quitte les rails de sa fiction pour nous dire que, si cette Odette pourrait faire penser à Yvette Horner ( ouf, j'étais pas complétement à coté de la plaque), avec qui il a effectivement travaillé, il y a dix ans, autour d'une pièce qui n'a jamais vu le jour, ce n'est pas vraiment cette histoire qu'il raconte, mais une fiction très romancée de cette collaboration avortée.

Malgré cette mise en garde dont le timing est assez surprenant ( on s'attend généralement à avoir ce genre d'observations à au début ou à la fin d'un roman et pas en plein milieu), je n'ai pas pour autant changé ma facon de voir le roman, et me dire que cette rencontre artistique entre la si populaire Yvette Horner et ce metteur en scène intello sentait quand même énormément le vécu et l'authenticité, et que Rostain n'avait pas du changer grand chose à son récit de départ.

Et c'est d'ailleurs cet aspect des choses qui rend le livre crédible et interessant, même s'il faut dire qu'au départ j'étais parti prenante, vu que le milieu du théatre est un domaine qui me passionne et voir la cuisine interne d'une préparation d'une pièce ne pouvait que me séduire a priori .

Par ailleurs, cette rencontre de deux univers radicalement différents est souvent bien vue et croquignolesque à souhait, tant le metteur en scène fait montre de tact et de délicatesse pour ne pas s'agacer devant les caprices et les sautes d'humeur de notre diva.

Une diva, qui, malheureusement, et c'est le principal bémol de ce livre, n'apparait pas aussi attachante que Rostain aimerait nous la peindre. Malgré l'excuse de l'âge et de la maladie, cette Odette nous semble en effet bien vite acariatre et caractérielle et ne nous fait pas changer d'avis sur l'image de mégalomane que véhiculent si souvent les stars.

Mais malgré ce peu d'empathie qu'on a pour la star ( et également pour le metteur en scène, Rostain ne s'épargnant pas forcément non plus), le livre reste un très interessant - et parfois quand même touchant- témoignage sur le processus créatif et sur le déclin lié à l'âge, a fortiori lorsqu'on a affaire à une célébrité.
Lien : http://www.baz-art.org/archi..
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Un livre tout en paradoxes: un "metteur" (dieu que j'ai détesté cette appelation)en scène est chargé de mettre au point le dernier spectacle d'Odette, gloire française de l'accordéon. L'auteur trace deux portraits avec le style employé:
- pour le metteur-en scène, phrases qui montent et retombent assez brutalement, symbolisant je pense l'artiste bobo-chic-avant-gardiste-un brin intello mais pas reconnu à mesure de son talent ou de ce qu'il voudrait;
- Odette partagée entre la vieille dame qui cache ou ignore les signes de l'âge et son personnage de monument de l'accordéon, dont elle parle à la 3ème personne avec une grandiloquence en décalage avec la réalité.

Ce livre est le récit d'une catastrophe annoncée. Séduit par le personnage, le metteur en scène accepte donc ce spectacle. Passée la découverte mutuelle tout va de mal en pis car les étoiles du spectacle ne sont que des êtres humains. Culpabilité aussi de détromper ceux pour qui l'étoile brille encore.

L'auteur nous laisse entendre qu'il s'agit là de la version romancée, revue et corrigée, d'une expérience proche avec Yvette Horner. Il ne manque pas d'audace et d'autodérision dans la manière dont il présente son propre personnage. le traitement du personnage d'Odette me laisse plus dubitative j'y vois plus l'ironie que la tendresse annoncée.

Pas de coup de foudre, mais une rencontre littéraire intéressante qui me donne envie de lire d'autres ouvrages de l'auteur (le fils).
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