Elle aurait dû savoir pourtant, comme il l'avait lui-même toujours su, qu'entre un homme et une femme qui s'aiment, la confiance, l'estime et la fidélité étaient aussi obligatoires et nécessaires que le plaisir physique.
Ce n'est pas sur un défaut qu'on se blesse mais sur l'absence d'une qualité
Exergue
Face aux rideaux apprêtés
Le lit défait vivant et nu
Redoutable oriflamme
Son vol tranchant
Éteint les jours franchit les nuits
Redoutable oriflamme
Contrée presque déserte
Presque
Car taillée de toutes pièces pour le sommeil et l’amour
Tu es debout auprès du lit.
PAUL ELUARD
les meilleurs victimes font les pires bourreaux.
Tu es tombé sur une bête sauvage, dit-il. C'est une femme qu'il faut aimer moins qu'elle ne vous aime. Ou en tout cas, il faut faire semblant. Tu pars battu.
(p. 60)
Comme il était étrange aussi de penser que cet amant si éperdu, ce garçon si bien élevé écrivait des pièces, et que ces pièces avaient du succès auprès des plus difficiles critiques dans cette ville déjà si difficile.
Et quand elle regardait de près, de très près cet homme, si visiblement, si passionnément occupé d'elle, elle se demandait dans quelle soupente cachée dans sa tête, sous ces cheveux si doux, ces cheveux d'enfant, pouvait bien se dissimuler cette force inconnue, bizarre, peut-être malsaine, mais qu'elle respectait instinctivement : la possibilité d'écrire. (p. 52)
Je n'ai pas d'amis, disait elle à Édouard qui s'en étonnait. " je n'ai jamais eu envie d'avoir des amis, Ni le temps. J'ai mon métier et mes amants. Cela suffit amplement."
Les écrivains, enfin les gens qui créent quelque chose, savent très bien régenter leur cœur et leur corps. Ils nourrissent l’un et l’autre, dès qu’ils écrivent, avec la même désinvolture.
Il était revenu, il était à elle, il justifiait le cours de sa vie, il était la réponse à la grande question, l'affreuse question, celle qui la hantait depuis son enfance: "Est-ce que je plais?".
il y a une grande différence, dit Jolyet, c'est que toi, en jouant, tu cherches à t'oublier. alors que lui, édouard, en écrivant, il cherche à se trouver. de plus, toi, de même que les musiciens qui entendent leurs accords ou les peintres qui voient leurs couleurs, tu as des échos, des preuves immédiates de ton talent : les silences de la salle et ses bravos, tu as des plaisirs immédiats et physiques, sensuels même, qu'un écrivain n'a jamais. sauf parfois, à l'aube, quand il a l'impression de découvrir ce qu'il savait déjà, mais c'est un plaisir abstrait et inconnu des autres.