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Critique de cathcor


Honnêteté. Tolérance. Approfondissement. Ces trois mots résument à mes yeux l'attitude de Michaël de Saint-Chéron dans son essai " Les écrivains français face à l'antisémitisme de Bloy à Semprun".
Dès le prologue "Pourquoi ce livre?", son but est clairement annoncé: rappeler aux lecteurs que, depuis cent ans, des auteurs non-juifs - chrétiens, agnostiques, athées - ont ponctué notre littérature pour parler du peuple juif, de leur rapport avec le destin de celui-ci, avec l'injustice et la violence qu'il a subie depuis des millénaires, ainsi que de leur rapport au Livre et aux textes. le dessein de Michaël de Saint-Chéron a vu son urgence renforcée par les odieuses manifestations antisémites qui eurent lieu en France durant l'été 2014, et par les horribles attentats perpétrés au nom de l'Islam dans les bureaux de Charlie Hebdo.
Il a choisi 9 écrivains: Léon Bloy, Péguy, Claudel, Mauriac, Sartre, Bernanos,Marguerite Yourcenar, Maurice Blanchot, Jorge Semprun. Certains étaient antisémites au départ (Bernanos) ou ont fait le jeu des antisémites (Bloy) Tous ont évolué. Seul Céline, à qui un chapitre a également été consacré, persista dans sa haine du juif.
Avec un très grand souci de probité, Michaël de Saint-Chéron casse certaines fausses accusations. Ainsi lave-t-il Péguy de l'épithète calomnieuse de "graine de fasciste", qui lui fut accolée dans les années 80, Péguy dont le dialogue avec le peuple juif fut constant et qui lui accorda une place capitale dans son oeuvre.
Avec une admirable rigueur, il se fait un devoir de juger chaque écrivain, chaque homme, sur la totalité de ses écrits et de son parcours, et considère comme absurde de lire un écrivain "à l'aune de sa compréhension positive par rapport aux juifs".
Même hauteur de vue face au cas Céline: tout en condamnant ses déchaînements haineux, il dégage ce qu'il a pu avoir de salutaire, en nous obligeant à réfléchir et à regarder en face l' innommable qui est peut-être tapi au plus profond de nous.
Les analyses de Michaël de Saint-Chéron sont fortement argumentées, étayées par des citations percutantes et extrêmement approfondies. Dans le chapitre consacré à Sartre, il envisage ses trois positionnements par rapport aux juifs, les pages concernant Yourcenar contiennent une intéressante exploration de son intérêt pour le hassidisme.
Surtout, l'auteur dégage la spécificité du positionnement de chaque écrivain, jusqu'au rêve fou de Claudel, suggérant de confier à Israël la garde des Lieux Saints...en Palestine arabe.
J'ai beaucoup appris sur l'affection et le rôle essentiel de Mauriac face au jeune Elie Wiesel, sur l'immense modestie de Maurice Blanchot et sa fidélité envers Levinas, sur Semprun et son dialogue avec Malraux.
Merci donc à Babelio, aux éditions Salvator et à Michaël de Saint-Chéron pour ce beau et émouvant travail.



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