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Critiques filtrées sur 5 étoiles  
Merveilleux récit de l'histoire de trois générations de femmes, une saga familiale qui se déroule durant la période des années cinquante à l'an 2000.
Tout commence avec l'arrivée de Man'yô, une enfant d'à peine trois ans, déposée par ceux des montagnes pendant l'été de 1943. Ces gens qui vivent cachés au fin fond des montagnes descendent au village lorsque quelqu'un est mort hors de propos, terme pour désigner les suicidés ; alors, ils les emportent pendant la nuit dans des boîtes carrées en bois. Man'yô est recueillie et élevée par un jeune couple qui, ensuite aura d'autres enfants dont elle s'occupera.
En haut du village résident les Akakuchiba, la famille propriétaire des aciéries ; en bas, au bord de la mer, ce sont les Kurobishi, la famille propriétaire du chantier naval ; parmi les familles ouvrières, deux clans, les Rouges d'en haut et les Noirs d'en bas.
Kazuki Sakuraba est célèbre pour sa série de mangas, Gosik mais également pour ses romans récompensés par de nombreux prix.
Je constate que La légende Akakuchiba, à ce jour, est le seul roman traduit en français, dommage !
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J'ai toujours fait confiance aux jeunes dans leur sélection de romans lorsqu'il s'agit de les récompenser : Leurs choix sont justes, judicieux et tous les romans primés par de jeunes lecteurs se sont toujours avérés de sacrées bonnes histoires.
Une fois encore, avec La légende des Akakuchiba / La légende des filles rouges, roman primé par des lycéens, cela pour moi s'est vérifié.
Ce roman retrace la chronique de la famille des Akakuchiba dans ce Japon de l'après guerre mondiale qui va subir d'énormes transformations après être resté comme immobile pendant des siècles dans les traditions.
La société japonaise va, elle aussi, subir ces transformations. C'est à travers les yeux de trois générations de femmes dans cette famille que nous allons être les témoins de cette évolution : Man'yô, la "voyante", la petite fille qui vient de la montagne et a été recueillie par une famille d'ouvriers de Benimidori, va voir son destin basculer en devenant un des pivots de cette dynastie - Kemari, la rebelle, à la tête de son gang de motardes "les Iron Angels", refusera toujours de devenir une adulte, même lorsqu'elle deviendra célèbre mangaka. - Tôko, la petite dernière, celle qui se qualifie de "dérisoire et insignifiante petite fille de Man'yô", vivra la seule histoire d'amour révélée et nous accompagnera dans le Japon d'aujourd'hui.
Une splendide saga, avec un grand esprit romanesque, truffé de personnages hors du commun qui nous raconte ce Japon qui cherche à trouver sa voie dans le monde moderne malgré son attachement à ses traditions séculaires, implantées dans la mythologie de ce pays.
J'ai passé un excellent moment en compagnie des ces personnages et vous le recommande fortement!
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Man'yô n'a que trois ans lorsque ‘'ceux de la montagne'' l'oublient ou l'abandonnent, un jour de 1943, dans la petite ville de Benimidori. Recueillie par un jeune couple, la fillette se distingue par sa peau mate, son incapacité à apprendre à lire et ses dons de voyance. Pauvre mais heureuse dans sa famille d'adoption, elle n'imagine pas un instant que Tatsu, la grande dame d'en haut, l'a choisie pour devenir l'épouse de son fils ainé. Et pourtant, contre toute attente, le mariage est célébré et Man'yô intègre la puissante famille Akakuchiba, les rois de la ville, à la tête des aciéries du même nom. Ils sont ‘'les rouges'' opposés aux Kurobishi, ‘'les noirs'' des chantiers navals.
Entre le riche héritier et l'étrange bru, l'union est harmonieuse. Il n'est certes pas l'homme qu'elle rêvait d'épouser enfant, celui qui lui était apparu borgne et volant alors qu'elle n'avait que dix ans, mais elle apprécie son nouveau mari. le couple aura trois enfants : le très sérieux Namida, appelé à diriger un jour les aciéries, la rebelle Kemari qui prendra la tête d'un gang de motardes et la petite dernière, Kaban, qui se rêvait star de la danse.
Et pendant que la famille Akakuchiba s'agrandit, pleure ses morts et règne sur Benimidori, la société japonaise évolue et les aciéries avec elle.
C'est Tôko, fille de Kemari et petite-fille de Man'yô qui entreprend de raconter l'histoire de sa famille et de la ville, et la sienne aussi.

Un roman très riche qui couvre une période allant de 1953 à 2000 et, outre une saga familiale, est aussi un fabuleux portrait sociologique de la société japonaise. de l'industrialisation à marche forcée d'après-guerre au désenchantement des nouvelles générations, c'est tout un pays que l'on voit courir après le progrès, au détriment de la planète. Tout un pays qui voit dans les usines la chance de sortir de la misère d'après la défaite. le travail paie. Les ouvriers quittent leurs masures pour des appartements plus fonctionnels, les patrons s'enrichissent. La désillusion viendra avec la modernisation des chaînes de production. Les fils d'ouvriers quittent les campagnes pour Tokyo et ses bureaux climatisés. Ceux qui restent ne veulent pas s'user la santé dans les aciéries. La jeunesse se révolte, se marginalise. Les bandes de voyous pullulent avec pour seul but que de crier leur mal-être à la face du monde. Les filles découvrent que leur corps est un moyen de gagner de l'argent. Quand ces jeunes rebelles rentrent dans le rang, leurs enfants peinent à prendre la relève. Libres de leurs choix, nés dans une société qui ne risque plus rien, ils ont du mal à trouver une cause à défendre, un but à poursuivre.
Entre croissance, bulle économique, choc pétrolier et spécificités de la mentalité japonaise, Kazuki Sakuraba nous promène dans un pays qui s'est jeté avec frénésie dans une course au progrès, abandonnant certaines de ses valeurs pour en créer d'autres, tout en conservant un fond de traditions bien ancrées dans les esprits.
Ces trois générations de femmes attachantes, adaptées chacune aux problèmes de leur époque, sont sublimées par l'écriture de l'autrice qui nous promène entre onirisme et réalité brute, prouvant que le réalisme magique n'est pas l'apanage des auteurs d'Amérique latine. A découvrir absolument.
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Le Japon est un pays que son histoire condamne aux mystères, ceux que peuvent susciter les transformations brutales, sur ce que la mémoire collective garde encore du passé.
« La légende des filles rouges » nous fait sillonner la deuxième moitié du vingtième siècle, des lendemains de la guerre au tournant du 21ème siècle, à travers la saga de trois générations de filles d'une même famille, comme autant de miroirs de l'évolution économique et sociale du pays, dans une fuite en avant sans retour possible sur le Japon ancestral des mythes et des légendes. Structuré en trois parties autour de ces trois figures, la narration traduit avec chacune d'elle, la permanence et la force du passé, les ruptures profondes, et l'acceptation finale du Japon contemporain dans ses failles et ses doutes.
Nous voilà donc transportés dans une plaine étroite, coincée entre les Monts Chugoku et la mer du Japon, dans le village de Benimidori, microcosme des transformations du pays tout entier. Many'o a dix ans quand commence le récit, sa présence au village est un premier mystère car le peuple des montagnes, l'y a déposé un matin. Ce peuple figure le Japon des légendes, invisible et pourtant présent, dans la prise en charge de la mémoire des morts que la société rejette, cette part de magie, Many'o la fait vivre à sa manière avec ses visions hallucinées qui lui laissent entrevoir des petits morceaux de l'avenir de ceux qui l'entourent. Ses visions d'avenir, toujours violentes, éclatent dans une société qui s'éloigne doucement des fondements du Japon d'hier. le village de Benimidori voit ainsi se développer les chantiers navals qui transforment la région côtière et l'aciérie, plus haut sur les pentes, qui petit à petit fait mourir les vieilles traditions de fabrication du fer. le beau personnage de l'ouvrier Toyo figure lui aussi ces transformations. Les grandes familles propriétaires des usines encadrent ainsi en rouge et noir le petit peuple des ouvriers qui va passer des maisons de bois aux cités de béton. C'est le poids de la magie et de la tradition qui fait entrer Many'o dans la puissante famille des Akakuchiba, maîtres des forges et de l'acier rouge. La lignée est lancée. Kemari la première fille de Many'o fait avancer l'histoire du Japon dans ses années de transformation brutale, industrialisation, croissance et mirage de la consommation, une violence sociale que réussit à traduire la littérature des mangas, bien connue par l'auteur elle-même et dans laquelle Kemari finira par se plonger. La violence de Kemari, hurlante sur sa moto à la tête de son gang de filles, est à la hauteur des transformations violentes que le pays connait. La mort de Kemari, celle de Many'o annoncent une troisième période, sous le signe de l'éclatement de la bulle financière, dans une nouvelle phase récente de la croissance japonaise. Toko, la petite dernière se replonge dans le passé de sa grand-mère et semble enfin symboliser le retour à une certaine sérénité.
Une belle découverte que ce récit très vivant où se mêlent le réel et l'imaginaire à la façon d'un Murakami. Je vous invite fortement à tenter l'aventure.
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Ce livre est l'histoire de trois femmes qui, chacune à sa manière, ont bâti la légende de leur famille, le clan Akakuchiba.

La première, Man'yô, abandonnée enfant par les gens de confins, une tribu montagnarde, possède des dons de voyance. Choisie par la matriarche du clan Akakuchiba, pour des raisons qu'elle ne connaîtra jamais, elle épouse l'héritier de cette famille, dont la fortune s'est faite grâce à la sidérurgie. Même si elle restera illettrée jusqu'à sa mort, sa clairvoyance permettra à sa famille de ne pas s'effondrer lorsque le premier choc pétrolier menacera l'économie mondiale.
La deuxième, Kemari, fille de la première et mère de la troisième, née l'année du Cheval de Feu, est à l'image de son signe : fière, fougueuse, flamboyante et rebelle. Elle sera d'abord à la tête d'un gang de motardes puis deviendra une mangaka à succès, ce qui lui permettra de maintenir l'économie familiale alors que la sidérurgie commence à s'essouffler.
La troisième, Toko, fille unique de Kemari et notre narratrice, peut sembler plus pâle quand on la compare à sa mère et sa grand-mère. Sans buts ni convictions, elle est à l'archétype d'une génération sans repères qui cherche à se faire une place. C'est d'ailleurs le moment où le haut fourneau des aciéries Akakuchiba voit approcher sa fin.

Cette saga familiale est aussi l'occasion de découvrir un Japon que l'on connaît peu, un Japon qui a dû s'adapter et changer très vite, d'abord pour se remettre de la Seconde Guerre mondiale, ensuite pour traverser la seconde moitié du XX° siècle et ses crises. Cela explique sans doute le décalage que l'on peut voir dans ce pays, toujours tiraillé entre traditions et modernité, mais réussissant tant bien que mal à faire cohabiter ces deux extrêmes.

Ce livre se lit tranquillement, comme une promenade dans l'histoire du Japon. L'écriture est fluide, le ton reste un peu nostalgique, parfois avec une pointe d'humour, parfois avec une impression de tristesse en toile de fond mais toujours en douceur et jamais dans les extrêmes. Personnellement, je n'ai pas lâché ce livre avant de l'avoir terminé.

En résumé : une lecture captivante, un Japon en pleine transformation et trois femmes très différentes mais partageant la même force insoupçonnée.
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Kazuki Sakuraba dans La légende des filles rouges nous emporte auprès de la famille Akakuchiba, et plus précisément sur trois générations de femmes de cette famille, tout en l'inscrivant dans l'évolution économique, sociale du Japon des années après guerre jusqu'à nos jours.

L'autrice décide de faire démarrer son histoire au lendemain de la Seconde Guerre Mondiale avec Man'yô entre traditions ancestrales, croyances et essor économique de la sidérurgie japonaise.
Alors que les descriptions des vies des ouvriers nous font découvrir la sombre réalité de cet essor économique, Man'yô et ses pouvoirs nous entrainent du côté spirituel.
Par la description de certains personnages comme Tatsu, comparée au Dieu Ebisu, ou bien par des scènes comme celle du mariage et de la montée du palanquin, Kazuki Sakuraba intègre des scènes très visuelles et humoristiques.
La période représentée par Man'yô dépeint une époque où la croyance en la modernisation de l'économie met la population en mouvement dans un seul élan pour participer à l'essor de l'économie japonaise.


L'arrivée de Kemari, la fille de Man'yô, correspond à la lente disparition de la spiritualité, de certaines croyances avec en même temps une économie désormais installée mais au cours de cette période c'est la nouvelle génération qui se rebelle et refuse de rentrer dans le rang avec la création de gang de loubards dont l'iconographie et la mythologie restent encore présentes de nos jours.
Si Kemari, incarne la jeunesse rebelle et révoltée, elle finit pourtant par se plier aux règles et rentrer dans le rang pour protéger sa famille. Nous découvrons aussi un nouvel milieu celui du manga et surtout l'envers du décor avec le stress et la pression exercés par les éditeurs sur les auteurs.
Si Kemari est une jeune femme rebelle elle reste une cheffe de gang qui assume son rôle lorsque des actes répréhensibles sont commis par des membres ou d'anciens membres.

A la génération de Kemari se succède une nouvelle génération celle de Toko, la fille de Kemari, une génération désabusée. Après avoir vu l'essor de la croissance économique, un plateau, c'est désormais l'explosion de la bulle économique que nous découvrons où le Japon est désormais en perte de vitesse dans certains secteurs et où trouver un travail devient difficile.
Toko est donc une jeune fille qui peine à s'intégrer au monde car elle ne parvient pas à savoir qui elle est, ce qu'elle souhaite. Elle représente une réalité de ces années là. Mais la dernière énigme laissée par la mort de Man'yô, sa grand-mère, va lui donner un but et qu'elle cherchera à résoudre par amour pour sa grand-mère.

Avec La légende des filles rouges, Kazuki Sakuraba retrace l'histoire du Japon contemporain dans ses aspects culturels, économiques et sociaux. Elle révèle les malaises de cette société cloisonnée par certains principes et codes moraux et son incapacité d'évoluer face aux demandes des nouvelles générations.
Passionnée par le Japon, par sa culture, c'est une lecture que j'ai beaucoup aimé. Voir l'évolution du Japon à travers des personnages originaux, attachants et représentant différentes générations.
Petit bémol mais ne concernant pas ma lecture mais le titre qui a été modifié entre sa version grand format passant de la légende des Akakuchiba à La légende des filles rouges.
Lien : https://autempsdeslivres.wor..
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Très belle découverte que cette fresque familiale et sociale teintée de fantastique, qui déroule sur trois génération l'évolution de la société japonaise, des années 50 à l'an 2000.
À travers l'histoire de trois femmes, on s'immerge dans un Japon vivant et loin des clichés, que l'on découvre par des parcours humains et émouvants, confrontés aux aléas de leurs générations respectives. le roman brasse beaucoup de thématiques différentes et très actuelles : les liens familiaux, la place de la femme, la façon d'envisager les études et le travail, la modernisation galopante, l'essor et les échecs de la vie économique, l'évolution des mentalités, la difficulté des individus à s'adapter et à trouver leur place… Mais il laisse également la place au rêve et à un surnaturel d'autant plus ensorcelant qu'il n'est jamais expliqué. J'ai été particulièrement touchée par la plume de l'autrice, à la fois poétique, visuelle, évocatrice, sensible et réaliste, qui allie à merveille une réalité authentique et terre-à-terre à un parfum de magie et de vieilles croyances, conférant ainsi au récit une dimension de mythes ancrée dans la vie de ses personnages et dans la terre du Japon.
C'est beau, vivant, humain. Une très chouette lecture.
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Premier titre lu du mois de juin, premier coup de coeur. La légendes des filles rouges est un magnifique roman composé par l'auteure japonaise Kazuki Sakuraba. C'est une auteure qui a commencé par écrire ce que l'on nomme « light novel », il s'agit d'une catégorie de romans japonais destiné à un public de jeunes adultes, composés d'un style différent de ceux destinés aux adultes et garnis d'illustrations, sans pour autant être des Mangas. Ce roman é été lauréat des prix japonais Mystery Writers of Japan ainsi que le Eiji Yoshikawa Literary Newcomer Award. Il est sorti en poche en mars dernier, publié avant cela par la maison d'édition Piranha. J'ai commencé ce roman avec toujours cette même appréhension lorsque j'aborde la littérature asiatique, pour le peu de titres que j'ai pu en lire car il est parfois dur de décrypter les codes de la culture japonaise, en ce qui nous concerne dans ce cas. Mais le style de l'auteure est ici étonnement clair et compréhensible que savoureux. J'en aurais volontiers dévorer quelques centaines de pages en plus.


Man'yô personnage central du roman est racontée par la voix de sa (future) petite fille, Akakuchiba Tôko. Enfant trouvée par une famille modeste du village de Benimidori de la région de San'in située à l'ouest de l'île d'Honshū, elle a le teint mat du peuple qui vient des montagnes « les gens du confin ». Ce serait l'histoire de n'importe quelle petite fille japonaise si l'auteure n'annonçait pas, de façon allusive, au moyen de prolepses le destin singulier qui sera le sien au sein de la famille très ancienne Akakuchiba, et donc très importante, qui domine le village aussi bien sur le plan concret que symboliquement. L'écriture de Kazuki Sakuraba est extrêmement riche en images, en détails descriptifs, qui sont par ailleurs au moins aussi importants que le récit de Tôko. On ne peut pas passer à coté de ces nombreuses évocations soigneusement et délicatement détaillées sur la topographie du village, du bas, du haut du coté de ces filles rouges justement ! Sur les jardins de la maison rouge, de l'usine environnante.

Man'yô ne connaît pas une vie ordinaire dès le départ, jeune orpheline qui n'apprendra jamais à lire et tellement différente de ses parents orphelins, qui deviendra l'une des figures remarquées de la très respectueuse famille grâce au pouvoir de prédilection qui lui vaudra le surnom de « la voyante des Akakuchiba ». On retrouve ce fameux trait de réalisme magique qui épice bien souvent cette littérature japonaise, où les chats se mettent à s'exprimer comme Kafka dans le rivage de Haruki Murakami où les forets qui prennent vie comme dans Conte dans la première lune de Keiichirô Hirano. Que l'on aime ou pas, cela apporte une touche de mysticisme certes religieux et de poésie, décidément bien nippone – je repense à ces descriptions du village sous la neige et des pétales qui s'envolent – que l'on savoure avec délectation. le talent de conteuse est presque envoutant, on s'attache à chaque personnage dont elle trace les caractères avec perfection, et là où une narration banale ou languissante aurait pu être plombée par les nombreux noms et prénoms japonisants, pour celles et ceux qui ont très peu l'occasion de côtoyer la langue, je n'ai ici pas eu de problème du tout à les mémoriser facilement. le récit de la vie de Man'yô et de la famille Akakushiba dans laquelle elle rentre par son mariage, est réellement captivant d'autant qu'on y découvre, outre les drames qui sont les siens, le fonctionnement d'une société clanique japonaise totalement millimétré et qui ne tolère aucun écart.

On n'y découvre pas seulement le fonctionnement de cette famille, mais l'évolution de ce Japon très traditionnel, le Japon d'après-guerre de l'enfance de Man'yô, jusqu'à devenir ce Japon très modernisée, celui des années deux-mille de la petite-fille. Les traditions du japon si elles sont totalement inhérentes à leur culture ne sont pas tellement différentes dans le fond : celle du mariage arrangé est l'une de ces traditions universelles, ce Japon ou l'art ancestrale des artisans s'est peu à peu oublié au profit de l'industrialisation en masse et étourdissante.

Et ce que j'ai le plus aimé, c'est la dextérité avec laquelle chacun des personnages prend vie sous la plume de l'auteure japonaise, évidemment. Man'yô le personnage le plus complet, mais aussi ses enfants et petits-enfants, chacun dans leur personnalité et les problèmes existentiels insolubles qui les enferme dans une existence sans sortie. Plus que l'idée de perpétuer la famille, il y a avant tout cette importance de faire vivre l'entreprise familiale, qui elle sait s'adapter aux changements de méthodes de travail, au marché économique à travers ses présidents successifs. C'en est très troublant, si l'entreprise arrive à survivre, au prix de nombreux sacrifices et drames humains, la transmission familiale est sur la voie du déclin. Accidents, suicides qu'ils nomment mort hors de propos, se transmettent comme une malédiction à travers un individu sacrifié au nom du clan et de l'économie. L'amour, en tout cas ce que l'auteure nomme « amour occidental » y a peu de place.

La légende des filles rouges est une lecture totalement addictive, une fois que le charme de son langage, de son histoire et de ses personnages vous a envoûté, vous parvenez bien difficilement à interrompre votre lecture. Kazuki Sakuraba a une façon tellement naturelle de transmettre l'histoire de son pays, une telle puissance créatrice combinée à une langue si évocatrice, que je l'ai lu avec avidité jusqu'à sa toute fin. Quel roman formidable !
Lien : https://tempsdelectureblog.w..
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Avis : FOISONNANT
Man'yô, Toko, Yôgi, Tatsu, Yasuyuki, Kemari, Namida, Yutaka, Kodoku et les autres... Pourquoi ces prénoms japonais ? Car ils donnent le ton d'un magnifique roman aux couleurs de feu et à la trame historique bien tissée.
Tout y est pour mon plaisir : le dépaysement absolu puisqu'au pied des Monts du Chûgoku, les mots d'ailleurs qui environnent ma lecture, les actualités des périodes traversées ( de 1953 à nos jours), l'activité industrielle du Japon surtout sidérurgique et surtout tous les petits secrets d'une société et d'une famille sur trois générations. J'aime apprendre en me distrayant ; ici, rien ne m'a été enlevé.
La petite Man'yô, fille des montagnes, est recueillie par une famille d'ouvriers vivant avec les gens des « Noirs d'en bas », et regarde souvent la grande résidence rouge des Akakuchiba, propriétaires prospères des aciéries de la région, tout en haut de la zone habitable. La crise industrielle frappe le Japon alors que Man'yô qui ne sait ni lire ni écrire, est devenue la maîtresse de maison des « Rouges d'en haut ». Elle a le don de voyance et il lui réservera le pire puisqu'il ne pourra pas modifier le destin des gens qu'elle aime. Tout au long de la vie des femmes fortes de la famille, nous suivrons pas à pas les détails foisonnants qui nous sont donnés pour suivre les aventures littéraires de l'une, motardes de l'autre ou tout simplement familiales et sociétales. Toko, l'arrière-petite-fille nous fait entrer dans ses souvenirs.
J'ai beaucoup aimé la traduction qui a parfaitement suivi l'écriture de l'auteure ou qui a amené un environnement particulier, parfois avec des mots ou des expressions enfantines et décalées ; je ne saurais le déceler. En tout cas, cela rajoute un plus intéressant et qui allège le récit.
Ce livre est comme une gourmandise élégante que l'on déguste lentement, au gré des effeuillements discrets et d'une pudeur japonaise légendaire n'autorisant pas à dire les choses brutalement. C'est grandiose et époustouflant d'intelligence. La place de la femme au sein de la Société nippone et l'évolution d'une société rurale pétrie de croyances confrontée au fossé des générations et de la modernité technologique, forment la trame d'un roman sociétal de belle facture.
Ce n'est pas toujours facile à lire, un peu long parfois tellement c'est fouillé mais le fond romanesque fait que le charme et le suspense jamais ne se rompent. Si vous aimez la culture et l'évasion, la légende des filles rouges est un livre écrit pour vous.
Je remercie la Fondation Orange et les Éditions Folio pour l'envoi de ce roman en Service Presse.

Lien : https://www.facebook.com/Lya..
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un roman étonnant, avec trois parties bien différentes. Nous suivons l'historie du Japon dans ses grandes lignes à travers le parcours de vie de trois femmes très différentes.
- la grand-mère, Man-yô, est une enfant trouvée déposée par le peuple des montagnes qu'on ne verra jamais vraiment. Petite fille, elle réalise qu'elle a des visions, elle peut prévoir comment mourront les personnes qu'elle rencontre. Man'yô épouse le riche fils de la famille possédant la sidérurgie du village. La 1ère partie est la plus intéressante à mon goût. Cette manière de mêler naturellement la réel et le surnaturel m'ont rappelé l'écriture de Gabriel Garcia Marquez malgré la distance dans le temps et l'espace!
- la fille, Kemari, est une rebelle; chef d'un gang de motarde, elle s'assagit pour devenir une célèbre mangaka et finit par se marier
sa fille Tokô enquête sur les morts de sa famille et revient sur des circonstances; certains mystères sont éclaircis
des personnages hauts en couleurs et intéressants, même parmi les personnages secondaires; une image du Japon réel ou rêvé...
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