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Citations sur Hymne (58)

Et à l'instar de Chostakovitch qui avait fait éclater des coups de canon dans sa 11e symphonie, Hendrix y fit entendre le vacarme insensé des bombes sur le Vietnam, il y fit entendre le bruit terrible de leurs explosions et les cris d'épouvante devant la mort qu'elles semaient, avec une puissance dramatique que Coppola, quelques années après, essaierait de retrouver dans des images en rouge et noir.
Il fit de The Star Spangled Banner une oraison en forme de fracas, une prière fracassante au ciel et à la terre, un choeur d'anges hurlants qui semblait par instants échapper à tout contrôle, pour revenir, d'un coup, à la raison, puis d'un coup repartir en démence.
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Hendrix s'engagea tout entier dans la musique., c'est-à-dire qu'il fit seulement et jusqu'au bout ce pour quoi il se croyait fait,
puisqu'il était la musique en personne,
puisque la musique le créait, en même temps qu'il la créait.
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Hendrix, l'enfant qui n'avait aperçu en naissant que des visages renfrognés, l'enfant craintif, l'enfant farouche, l'enfant moqué, le mauvais élève et le mauvais fils, l'enfant métis de nègre et d'Indien, l'enfant dont le destin semblait écrit dans l'encre du malheur, devint, quelques années après, le prodige que l'on sait.
Et si le prodige que l'on sait trouva sa voie, c'est, simplement, qu'il osa être lui.
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Hendrix s'accommoda d'être pauvre.
Les privations, la précarité, l'insuccès auxquels il était en butte lui étaient, au fond, peu de chose,
puiqu'il était libre,
puisqu'il avait des rêves que nul ne pouvait lui ôter,
puisque sa guitare électrique était sa femme et sa maison et sa patrie,
puisque sa passion était trop vaste pour qu'il la compromît dans de petites choses,
puisqu'il était doté de cette élégance naturelle que tous lui enviaient, l'élégance d'un dandy black qui associait à la fameuse nonchalance des nègres l'extrême courtoisie des manières, l'incomparable finesse des mains, la recherche sophistiquée des toilettes, et un je-ne-sais-quoi qui s'appelle le charme.
Hendrix fut pauvre mais d'une pauvreté qui l'affecta peu (il manifesta plus tard la même aristocratique indifférence vis-à-vis de la richesse) et qui jamais ne l'amena à abdiquer.
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Trop pittoresque, reprochaient les uns.
Trop osé, s'indignaient les autres.
Trop violent, se récriaient-ils en choeur, car déjà, à cette époque, Hendrix amplifiait les sons jusqu'à les rendre aussi déments que ceux lancés par les Sept Anges sonnant des Sept Trompettes pour annoncer l'Apocalypse. Car c'est l'Apocalypse que Hendrix tentait de mettre en musique, l'Apocalypse d'un présent ravagé par la guerre, et l'Apocalypse redouté des jours futurs. On s'en avisa à Woodstock, le 18 août 1969, lorsqu'il joua, à 9 heures du matin, The Star Spangled Banner.
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Car ce matin du 18 août 1969. à Woodstock, Hendrix fit entendre un cri insoutenable, insoutenablement beau, et paradoxalement libérateur.
Un cri plus fort que tous les mots, un cri d'effroi devant la vie menacée par la folie guerrière et d'espoir increvable devant la beauté.
Un cri qui déchira l'espace, un cri aux accents inconnus, un cri qui était comme une incantation aboyée dans un monde infernal, comme un sanglot terrible.
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Car Hendrix fit ceci : il s'empara de l'hymne américain, lui arracha ses vieilles fringues et les médailles qui cliquetaient sur sa poitrine militaire, et il y introduisit son refus violent d'un monde violent, un refus d'une violence folle, d'une violence cent fois plus violente que toutes les violences qui, çà et là, explosaient.
Hendrix se réappropria une violence que la jeunesse de son époque n'avait fait, jusque-là, que subir.
Il se la réappropria comme une part revendiquée de lui-même,
comme une force de combat,
une force de vie,
démesurée.
Une Furie en lui se dressa contre l'afféterie,
contre le mensonge,
contre la guerre qui est la plus laide des laideurs,
contre les crimes organisés par le gouvernement dont une part de l'Amérique, benoîtement, s'accommodait, contre les passions enragées de la mort chez ceux qui ne risquaient nullement de mourir, je veux parler de ces puissants qui s'obstinaient, les uns par intérêt, les autres par orgueil imbécile, dans une guerre de désastre.
A coups de décharges électriques, il ébranla l'espace et les esprits.
Il eut la violence terrible, implacable, des doux.
Et le calme.
La vérité et la justice exigent le calme, et pourtant n'appartiennent qu'aux violents.
Hendrix usa de sa violence comme on use d'une arme pour imposer la paix.
Puis, cette violence, il la convertit en beauté, car c'esrt la seule conversion qui vaille.
Une beauté extrême, paroxystique, je voudrais trouver des mots neufs. Une beauté chargée d'horreur, insoutenable, j'y reviendrai.
Une beauté monstrueuse.
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Hendrix fit sonner les premières notes de l'Hymne,
et tout l'espace en fut soudain bouleversé,
et ceux qui étaient encore présents à Woodstock, ce jour-là, le 18 août 1969, à 9 heures du matin, ceux qui étaient venus des régions les plus éloignées de l'Amérique pour ces trois jours de paix et de musique comme on les appela, en furent bouleversés comme cela n'arrive que de très rares fois dans une vie.
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Car Hendrix ne mourut pas seulement d'un excès de barbituriques, comme partout il fut écrit.
Il mourut du mal de son époque.
Il mourut du déchirement d'une époque prise entre la fin de l'euphorie idéaliste des années 60 et le surgissement d'un monde autrement plus rapace et brutal, d'un monde happé par l'obsession du calcul économique.
Il mourut du mal de son époque, du mal de son pays et du mal d'une logique qui commençait à s'affirmer, une logique pour laquelle il n'était pas fait, et qui est encore et toujours la nôtre,
une logique marchande, sauvagement marchande, dont son immonde manager Jeffrey fut l'une des pièces maîtresses.
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Hendrix fit entendre à la foule, ce jour du 18 août 1969, à Woodstock, à 9 heures du matin, la terrible dissonance du monde, dissonance dont un philosophe, quelques années plus tard, déclarerait qu'elle était devenue désormais la condition de l'homme moderne. P.173
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