Citations sur Cinq doigts sous la neige (24)
Un amour d’adolescent est-il mort à jamais ? N’y a-t-il pas des flammèches qui courent encore, sous la surface de la peau et des sentiments refroidis, jusqu’à ce qu’un souffle les réveille de leur engourdissement ?
- Maintenant dégage, que je me rhabille. Il faut que j'aille bosser du côté de la gare. Je suis pas mal demandée, en ce moment. L'automne, c'est un truc qui fout le moral des mecs dans leurs chaussettes. Moi, je suis juste là pour le remonter jusqu'au slip. Pour le reste, vous vous démerdez. Allez, file.
(p. 89)
Les mathématiques n'avaient jamais été son fort, depuis le collège et jusqu'au lycée. Cependant, s'il y avait bien une chose qu'on lui avait rabâchée, lorsqu'il était à l'école de police, et plus tard quand il avait intégré l'équipe du commissaire Marceau, c'était qu'en matière d'affaires criminelles, le hasard n'existe pas. Parce que si vous commencez à croire à ce genre de connerie, c'est que vous n'êtes tout simplement pas fait pour être flic.
Il brancha la bouilloire... [ électrique ? en 1974 ? ]
La bouilloire chanta. Il coupa le feu [ donc gazinière ? faudrait savoir ! ] ...
(p. 62-63)
Devenir un homme c’est , c’est être capable de métamorphoser ce qui vous blesse en autre chose qui vous construit.
Un homme qui ne doute jamais n'est pas, contrairement à ce qu'il croit, un roc dans la tempête. C'est exactement l'inverse : un navire qui trace sa route tout droit dans la brume et finira par se briser sur le récif qu'il s'imagine incarner.
Coincé entre sa violence intrinsèque et la conscience dont il doit éviter de se servir pour ne pas se nuire à lui-même, Bruno Paoletti représente pour lui un fragile équilibre entre la brute et l'homme de lettres. Et l'adjudant-chef ne l'avouera jamais à personne -même sous la torture- mais ce Paoletti est l'unique soldat de son affectation qu'il craint comme la peste. Il n'y a rien de plus inquiétant qu'un combattant qui détient le pouvoir des mots. Il y en a notamment eu un en Allemagne, il n'y a pas si longtemps, et cela s'est soldé par des millions de morts partout sur la planète.
- Elle est belle, n'est-ce pas ? (...)
- Magnifique. Mercedes ?
- Oui. Une 280 SE W114. 180 chevaux. Une tonne et demie de ferraille. Mon péché mignon. Vous vous intéressez aux voitures ?
- Pas vraiment, non. (...)
(...) elle se promit qu'elle allait revenir sonner à cette porte jusqu'à ce que [cet homme] lui appartienne.
Même si elle devait apprendre par coeur la revue technique de cette foutue voiture.
(p. 33)
La magie de l’écriture, la façon dont une histoire prend naissance dans les méninges d’un romancier, fascine les foules depuis toujours. Malgré le succès qui ne démentait pas, année après année, il considérait que cette relation avec son travail était ambiguë.Lorsqu’il était totalement honnête avec lui-même - c’est à dire hors caméra, la plupart du temps -, il n’y entrevoyait qu’un moyen d’extraire la noirceur de ses propres ténèbres et certainement pas plus de génie que les harmonies fragiles et lumineuses d’un musicien ou d’un peintre . L’écriture était son piano à lui . Son pinceau et sa toile .
p.198.
Jonathan Keller opine en silence. L'armée... Il avait conservé un souvenir très désagréable de son année de service. Pour lui, cela s'apparentait tout juste à un ramassis de brutes et de crétins, et parfois des deux dans la même personne. Déracinés de leurs familles, de leurs habitudes et de leur petit confort, de nombreux appelés craquaient au bout de quelques semaines, voire quelques jours seulement, et ils pourrissaient la vie de tous les autres comme une tache de moisissure s'étale dans un panier de fruits. Avec la meilleure volonté du monde, partager un an de promiscuité avec des abrutis pareils avait été la pire expérience de son existence.