Je ne vais pas tourner autour du pot : ce roman n'a pas du tout eu le même effet, le même impact que son petit frère (l'incroyable, le sublime
Les marins ne savent pas nager).
Après un prologue qui a su m'intriguer (à cette étape-là, je m'étais un peu emballée…), ce fut une lecture en dents de scie. Selon les parties (les « carnets » qui découpent le roman), j'ai oscillé entre curiosité, perplexité, indifférence, léger regain d'intérêt. J'ai eu beaucoup de mal à cerner les objectifs de l'autrice et j'ai souffert d'un terrible manque d'implication émotionnelle envers les personnages (spécialement avec la section sur Charles Teasdale qui m'a laissée totalement de marbre… et qui s'est déjà effacée de ma mémoire). Ces derniers sont restés de papier, échouant à éveiller en moi un réel intérêt pour eux.
Un tableau global semblait appelé à se dessiner à travers cette chronologie décousue, ces sauts de puce entre les lieux et les années, et, si c'est bien le cas, le résultat laisse un peu perplexe. On finit avec l'histoire morcelée rassemblée dans notre esprit, mais il manque un peu de lumière sur le tout pour éclairer le propos de Scali et le tout reste terriblement aride.
Cependant, bien que le sentiment rémanent laissé par ce livre ne soit pas enthousiaste, je peux lui trouver quelques qualités.
D'une part, j'ai vraiment apprécié les retrouvailles avec la plume de Scali. Même si elle n'a pas la même force et la même beauté que dans Les marins, j'ai retrouvé ses phrases si bien tournées, avec des saillies originales, des analyses perspicaces. Je me suis régalée avec l'histoire conjointe de Pearl et Russian Bill grâce à l'évolution de leur relation.
D'autre part, les personnages sont loin d'être inintéressants. Bien que conformes aux visages que l'on s'attend à croiser au Far West, l'autrice va plus loin en offrant des portraits extrêmement nuancés. Tous un peu criminels, un peu désabusés… mais néanmoins toujours en quête. Tous lancés dans des recherches qui apparaissent vouées à l'échec. Je regrette d'autant plus mon indéniable désintérêt à leur encontre.
Tandis que l'Ouest que fantasment les personnages se révèle illusoire, c'est également un jeu autour de la vérité et du mensonge qui se met en place. Un récit sur la façon dont se racontent les personnages, dont ils se mettent en scène, sur les histoires qu'ils se racontent – aux autres, mais aussi à eux-mêmes. « L'Ouest est un théâtre » dira le Révérend.
Un récit intéressant sous certains aspects, mais qui pâtit cruellement du manque de clarté quant au propos général et de l'incapacité des personnages à susciter des émotions (quelles qu'elles soient), rendant le tout un peu froid. Finalement, c'est un livre qui, sur le principe – ces personnages broyés par un univers sans considération pour l'autre comme par leur propre tendance à se raconter des histoires – aurait pu beaucoup me plaire, mais il manquait l'étincelle, l'empathie, le lien entre les différentes parties, des éléments qui auraient sublimé l'histoire.
Je dois également reconnaître que j'espérais une lecture qui évoquerait l'intensité, l'immersion, la beauté des Marins, c'est raté. Même si je m'attendais bien à quelque chose de différent, l'expérience de lecture apparait bien faible et c'est sans doute cette comparaison qui nuit le plus à ce roman. Néanmoins, face au gouffre entre son premier et son deuxième roman, je suis impatiente de découvrir le prochain…
Lien :
https://oursebibliophile.wor..