Citations sur Poètes du XVIe siècle (27)
"Oeil, le seul soleil de mon ame,
De qui la non visible flamme
En moy fait tous les changemens
Qu'un soleil fait aus elemens."
LXIV
Des Montz hautains descendent les ruisseaulx,
Fuyantz au fons des umbreuses vallées
Des champz ouvertz et bestes, et oyseaulx
Aux boyz serrez destournent leurs allées
Les ventz, bruyantz sur les undes sallées
Soubz creux rochers appaisez se retirent.
Las! de mes yeulx les grandz rivieres tirent
En lieux à tous, fors à elle, evidentz.
Et mes souspirs incessamment respirent,
Tousjours en Terre, et au Ciel residentz. »
(p. 96 Maurice Scève)
Chanson VIII
Si de nouveau j’ay nouvelles couleurs,
Il n’en fault ja prendre esbayssement :
Car de nouveau j’ay de nouvelles douleurs,
Nouvelle Amour, et nouveau pensement ;
Deuil et Ennuy c’est tout l’advancement
Que j’ay encor de vous tant amoureuse ;
Si vous supply, que mon commencement
Cause ne soit de ma fin langoureuse.
Pleust or à Dieu, pour fuyr mes malheurs,
Que je vous tinse à mon commandement :
Ou pour le moins, que voz grandes valeurs
Ne fussent point en mon entendement :
Car voz beaulz yeux me plaisent tellement,
Et vostre amour me semble tant heureuse,
Que je languis : ainsi voyla comment
Ce qui me plait m’est chose douloureuse.
(p. 44 Clément Marot)
D’une dame a un importun
Tant seulement ton repos je desire,
T’advertisssant-puis qu’il fault te le dire-
Que je ne suis disposée à t’aymer :
Trouve autre champ, et du mine te retire.
Bref, si ton cueur plus à ce chemin tire,
Il ne fera qu’augmenter son martyre,
Car je ne veulx serviteur te nommer,
Trant seulement,
Tu peulx donc bien avec autre maistresse eslire :
Que pleust à Dieu qu’en mon cueur penses lire,
Là où Amour ne t’a sceu imprimer :
Et m’esbahy-sans rien desestimer-
Comment j’ay pris la peine de t’escrire,
Tant seulement.
(p. 38 Clément Marot)
.
Hélas ! combien de jours ? hélas ! combien de nuits
Ay-je vescu banny doù mon coeur fait demeure !
C'est le vingtième jour que sans jour je demeure,
Mais en vingt jours j'ay eu tout un siecle d'ennuis.
Je n'en veu mal qu'à moy, fortuné que je suis,
Si je souspire et plein, si je lamente et pleure,
C'est que je meslongnay , laissant à la malheure,
La beauté qu’eslongner nullement je ne puis.
Ma face, qui desja de rides labouree
Par les ennuis soufferts, se voit décoloree,
Me fait rougir de honte: ô douleurs inhumaines !
Vous faites grisonner mon poil devant le temps:
Combien que je sois jeune au conte de mes ans,
Las ! je suis desja vieil au compte de mes peines.
(Etienne de La Boétie)
LXIII
« L'Esté bouilloit, et ma Dame avoit chault :
Parquoy Amour vistement se desbande
Et, du bandeau l'esventant bas, et hault,
De ses beaux yeulx excite flamme grande,
Laquelle au voile, et puis, de bande en bande,
Saulte aux cheveulx, dont l'Enfant ardent fume :
Comment, dit il, est ce donc ta coustume
De mal pour bien à tes serviteurs rendre ?
Mais c'est ton feu, dit elle, qui allume
Mon chaste cœur, où il ne se peult prendre. »
(p. 96 Maurice Scève)
LX
« Si c'est Amour, pourquoy m'occit il doncques,
Qui tant aymay, et onq (jamais) ne sceuz haïr ?
Je ne m'en puis non asses esbahir,
Et mesmement que ne l'offençay oncques (jamais) :
Mais souffre encor, sans complainctes quelconques,
Qu’il me consume, ainsi qu'au feu la Cyre.
Et, me tuant, à vivre il me désire,
Affin qu'aymant aultruy, je me desayme.
Qu'est il besoing de plus oultre m'occire (tuer),
Veu qu'asses meurt, qui trop vainement ayme ? »
(p. 95 Maurice Scève)
Chanson XXXIV
« Plus que de vous je n’ay autre visage
Je m’en vois rendre Hermite en un desert,
Pour prier Dieu : si un autre vous sert,
Qu’autant que moy en vostre honneur soit sage.
A dieu, amours ! À dieu gentil corsage !
A dieu ce tainct ! À dieu, ces frians yeulx
Je n’ay pas eu de vous grand advantage :
Un moins aymant aura, peult estre, mieulx. »
(p. 55 Clément Marot)
Chanson XXXIV
Plus que de vous je n’ay autre visage
Je m’en vois rendre Hermite en un desert,
Pour prier Dieu : si un autre vous sert,
Qu’autant que moy en vostre honneur soit sage.
A dieu, amours ! À dieu gentil corsage !
A dieu ce tainct ! À dieu, ces frians yeulx
Je n’ay pas eu de vous grand advantage :
Un moins aymant aura, peult estre, mieulx.
(p. 55 Clément Marot)
Du baiser de s’ayme
En la baisant m’a dit : Amy me blasme
Ce seul baiser, qui deux bouches embasme ,
Les arres sont du bien tant espéré ;
Ce mot elle a doulcement proféré,
Pensant du tout appaiser ma grand’flame.
Mais le mien cueur adore plus elle enflame,
Car son alaine, odorant plus que basme (baume),
Souffloit le feu, qu’Amour m’ a préparé
En la baisant.
Bref mon esprit sans coignossance d’ame
Vivoit alors sur la bouche à ma Dame,
Dont se mouroit le corps enamouré :
Et si la levre eust gueres demouté
Contre la mienne, elle m’eust sucé l’ame
En la baisant.
(p. 34 et 35 Clément Marot)