Kentukis

Avoir ou être, c'est un sacré dilemme qui peut devenir un cadeau empoisonné dans un sens comme dans l'autre.

Imaginez un monde futuriste (quoi que) où les êtres pourraient choisir d'avoir un Kentukis, entendez par là, une peluche de 30 cm munie d'une caméra et d'une carte de données. Derrière cette peluche se cache n'importe qui. Un enfant du divorce italien, une retraitée de Lima, une jeune femme allemande . D'Italie, du Japon, de la France, de Calcutta, quelqu'un vous regarde, vous suit à la trace, épie vos moindres faits et gestes.
Mais vous pouvez aussi choisir d'être un Kentukis. D'être l'anonyme qui regarde et assoiffe sa curiosité. Imaginez alors pour l'enfant du Guatemala la magie que pourrait procurer la vision d'un paysage enneigé en Norvège. Quand tout se déroule sans encombre... sinon vous voilà immergé dans un hospice et advienne que pourra...

Bien loin de ma zone de confort, ce roman aux frontières du thriller et de la science-fiction m'a passionnée du début à la fin. Car il soulève de multiples réflexions sociétaires et existentielles. Dans un monde de plus en plus seul, jusqu'où sommes nous prêts à aller pour vivre sa vie à travers celles d'autrui.

Aucun temps mort dans ce livre que j'ai dévoré d'une traite qui pousse le lecteur au plus près de l'intime, dans un réalisme à coupé le souffle, autant aventurier, émouvant, interpelant, drôle, effrayant. Une palette émotionnelle complète qui se rejoint pour former sens et offrir un roman des plus haletants, captivants, questionnants et imaginatifs rarement lus jusqu'à l'heure.

Dans la dystopie imaginée par la romancière argentine Samanta Schweblin tout le monde s'arrache les Kentuki, cette sorte de mignonne petite peluche téléguidée en forme de dragon, de panda, ou de lapin, équipée d'une caméra qui peut se déplacer partout dans votre appartement et observer absolument tous vos faits et gestes.

Les kentukis ne disent pas un mot, ils ne font que bouger et observer selon les ordres d'un autre.

Car en effet, deux solutions s'offrent au fan du kentuki : on peut soit se procurer un kentuki et le laisser déambuler dans notre maison comme bon nous semble, soit en acheter un mais pas pour nous, en souscrivant à un abonnement permettant de contrôler un kentuki au hasard dans le monde.

Et vous alors, vous préférez être celui qui observe ou celui qui se vante d'en posséder un ?

Autrement dit, que préférez vous pour combler votre solitude, le voyeurisme ou l' exhibition?

C'est une dystopie, aussi formidable qu'un bon épisode de Black Mirror, sur la manipulation du monde ultra connecté que nous propose Samanta Schwerin et les décidemment excellentes "Gallimard Monde entier," qui pour leurs 90 ans d'existence, frappent vraiment fort (après le très beau roman du vétéran Graham Swift dont a récemment parlé)

Cette histoire remet en question les limites diffuses de notre intimité tant ces petites peluches qui se promènent dans votre maison et observent votre quotidien sont bien moins inoffensives qu'elles ont l'air .

La romancière argentine utilise la forme du roman choral pour multiplier les points de vue sur cette humanité complexe, en manque d'affection et de contact , tentant par tous les moyens mis à sa disposition d'échapper à son isolement.

Le roman ausculte de façon plus chaleureuse que clinique la relation si ambivalente que l'individu d'aujourd'hui entretient avec les nouvelles technologies, acceptant de se laisser contrôler par un tiers simplement par manque de connexion avec autrui et peur de la solitude .

Si l' intrigue se déroule dans une vingtaine de pays différents, l'intrigue reste dans l'habitacle des maisons, donnant à cette ambiance confinée une résonance avec notre période actuelle qui rajoute au trouble du lecteur.

A la lisière de la science fiction, mais en conservant toujours une approche très réaliste et humaniste de son monde pas si imaginaire que cela, ce livre de l'autrice argentine Samanta Schweblin est aussi terrifiant que d'une grande intelligence!
Un incontournable de la littérature étrangère de ce début 2021.
Lien : http://www.baz-art.org/archi..

Chronique de Serial Lecteur : Les recommandations de Jean Luc pour Collectif Polar

Samantha Schweblin m'était encore inconnue et depuis j'ai découvert cette histoire surréaliste avec ce roman intitulé « Kentukis »
Ce roman de suite, avec sa quatrième de couverture a attiré mon attention. En effet, il s'agit d'une histoire surréaliste bien de notre temps.
L'idée de base est tout simplement géniale, créer des sortes de petites peluches munies d'une caméra connectées au réseau mobile.
Ces singuliers personnages, les Kentukis, sont pilotés à distance par des inconnus quelque part dans le monde. Ces inconnus ont la possibilité de suivre via une caméra située dans les yeux de ces peluches sur roulettes, les faits et gestes des propriétaires des Kentukis.
Pour un Kentuki, il existe donc un voyeur qui pilote à distance les déplacements et un « observé » consentant.
L'auteure pose des conditions très claires :
– un Kentuki doit toujours avoir sa batterie en fonction sinon il s'éteint définitivement
– quand on achète un Kentuki, on ne sait pas par qui on est observé.
– quand on achète une licence pour observer, on ne sait pas qui on va observer et aussi dans quelle partie du monde on est.
– le Kentuki ne peut pas parler, il peut être déplacer à distance et il est entièrement dépendant de l'observé quant à l'autonomie de sa batterie et donc de sa longévité
Une fois ces conditions posées, l'auteure va imaginer les destins de plusieurs Kentukis.
Dans ce roman, il y a plusieurs histoires avec toujours au minimum deux personnages derrière chaque Kentuki, c'est diablement bien imaginé parce que l'on est à la lisière de la SF et du thriller. Les voyeurs et observés forment toujours des duos improbables, il y a toujours ce lien très fort avec les Kentukis, tant du côté des voyeurs que des observés.
Mais là où ça devient passionnant c'est quand l'auteure imagine des interactions directes entre voyeurs et observés …Elle imagine un monde dans lequel les Kentukis sont omniprésents et surtout s'attarde à imaginer toutes les déviances possibles et au final décrit très bien notre nature humaine avec toutes ses failles.
L'auteure nous propose une vision d'un monde dystopique avec un mode de communication tronqué et aliénant le tout avec une construction millimétrée et brillante.
Kentuki est un roman chorale avec plein de rebondissements, le style est fluide, il y a beaucoup de personnages et il est impossible de décrocher de ces Kentukis.
Pour moi une très belle découverte, qui mériterait d'être scénarisée ….
Lien : https://collectifpolar.wordp..

Vous seriez Plutôt exhibitionniste ou plutôt voyeur ?
Dans ce livre qui pourait être un épisode de Black Mirror ,l'auteur nous interroge sur notre rapport à la technologie à la vie privée.
Dans ce monde les Kentukis, ce petit robot en forme de peluche, doté d'une caméra piloté par quelqu'un d'autre, peuvent observer, se deplacer et suivre la vie de leur propriétaire .

Dans un roman choral à travers plusieurs personnages : une retraitée à l'adolescent un père divorcé , dans différents pays Pérou, Norvège, Italie Guatemala, Samanta Schweblin dresse un panorama des possibles à travers une ambiance et hypnotique à la limite du thriller.

L'auteur nous dresse un portrait dans son livre de la solitude dans un monde interconnecté et globaliser.
Elle nous interroge sur la place de la technologie dans nos vies sur la notion de vie privée et d'exposition .
et si les Kentukis ce n'étaient qu'une personnification des réseaux sociaux ?
Alors plutôt exhibitionniste ou voyeur ?

Lien : https://lestribulationsdunem..

Déroutant !
Le sentiment coupable de regarder par des trous de serrures qui s'ouvrent sur les différentes facettes d'un monde aussi vaste. Des scènes courtes et des personnages attachants dans leurs rêves et solitudes.
Un voyage qui donne parfois le vertige et laisse le lecteur avec des quantités de questions...