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Critique de motspourmots


Se sachant condamné par la tuberculose et à la veille de s'éteindre en juin 1924, Frantz Kafka avait réaffirmé son désir que soient brûlés tous ses textes non publiés. Une dernière volonté non respectée, on le sait et une mort prématurée qui laisse finalement aux autres - lecteurs, traducteurs, critiques, intellectuels en tous genre - la charge de présenter voire expliquer son oeuvre. J'ai cru voir là le coeur du roman de Laurent Seksik qui donne la parole à trois personnages parmi les plus proches de l'écrivain et met ainsi en évidence un Kafka quelque peu idéalisé par leurs regards respectifs.

Robert Klopstock est un jeune étudiant en médecine féru de littérature lorsqu'il rencontre Kafka dans l'établissement où il vient soigner sa tuberculose. C'est lui qui l'accompagnera tout au long de sa pénible agonie quelques années plus tard, tout comme il soutiendra moralement Dora Diamant, la dernière compagne de Kafka, la seule avec qui l'écrivain aura réussi à partager une véritable intimité matérielle. Enfin, Ottla, la jeune soeur de Kafka est aussi celle qui ne surmontera jamais la perte de ce frère vénéré. A sa mort, Kafka n'a publié que deux textes courts, sa notoriété est restreinte et ce sont ses amis comme Max Brod qui oeuvreront à le faire connaître. Dans ce roman, ce sont autant les personnages que l'époque qui intéressent l'auteur car la personnalité de Frantz Kafka est fortement marquée par son appartenance à ce territoire d'Europe centrale aux frontières sans cesse remises en question. Un territoire où selon les influences on peut être porté aux nues ou méprisé voire assassiné. Tout en suivant les parcours De Robert (jusqu'en Amérique où il deviendra un spécialiste réputé de la tuberculose), de Dora (que de péripéties !) et d'Ottla (qui sera assassinée dans un camp), l'auteur orchestre le débat autour de l'oeuvre de Kafka au rythme des spasmes géopolitiques qui agitent l'Europe. Et j'avoue que c'est la facette qui m'a le plus intéressée, les tentatives d'interprétation et autres discussions autour de l'essence de l'oeuvre. Avec notamment une scène désopilante d'interrogatoire de Dora à la Loubianka autour du roman le Procès... Rien que pour ce passage je ne regrette pas ma lecture.

On retrouve ici des thèmes et des ancrages chers à l'auteur, sa sympathie confraternelle à l'endroit De Robert - médecin et homme de lettres - est très perceptible tout comme cette volonté de continuer à explorer l'épicentre du fracas du monde. le schéma narratif est efficace et contourne habilement l'exercice biographique pour englober un périmètre bien plus vaste. Intéressante et très agréable lecture.
Lien : http://www.motspourmots.fr/2..
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