- je ne crains pas le travail, effendi, dit Jahan.
- Je sais, mais pour cela il faut que tu renonces au passé, dit Sinan en se levant. Le ressentiment est une cage, le talent un oiseau captif. Brise la cage, laisse l'oiseau pendre son essor et voler plus haut.
Jahan avait le sentiment qu'en vérité ce monde lui aussi était un spectacle. D'une manière ou d'une autre, tous paradaient. Ils exécutaient chacun leurs tours, certains restaient en place plus longtemps, d'autres étaient plus brefs, mais pour finir ils sortaient tous par la porte du fond, tous également insatisfaits, avec la même soif d'applaudissements.
Il ne se doutait guère, à l'époque, que la valeur de la foi ne dépend pas de sa force ni sa fermeté, mais du nombre d'occasions où on peut la perdre et se montrer capable de la retrouver.
Rien n'endommage plus l'âme humaine que le ressentiment caché.
Quand tu sais pas quoi faire de la réponse, pose pas la question
Les quatre faces du Taj Mahal sont dessinées à l'identique, comme s'il y avait un miroir situé sur un côté, sans qu'on puisse jamais dire lequel.
La pierre réfléchie dans l'eau. Dieu réfléchi dans les êtres humains. L'amour réfléchi dans le cœur brisé. La vérité réfléchie dans les contes.
Nous vivons, travaillons, mourrons sous le même dôme invisible. Riches et pauvres, mahométans et baptisés, libres et esclaves, hommes et femmes, sultan et cornac, maître et apprenti...
Le deuil était un luxe que seuls quelques-uns pouvaient s'offrir. Tant que la mort harcelait les vivants on ne pouvait pas pleurer convenablement les morts. Quand la peste disparaîtrait, alors seulement parents et proches pourraient se frapper la poitrine et pleurer tout leur soûl. Pour l'instant, le chagrin était mis en conserve, rangé dans les caves avec la viande salée et les poivrons séchés, pour être consommé en des jours meilleurs
" Des germes de sagesse, partout à la ronde, attendaient d'être exhumés, comme les coffres d'un trésor profondément enfoui sous terre. Le savoir était donc moins affaire de découverte que de mémoire. "
P.500, édition "J'ai lu" de poche n°11373
" Un lieu assez solitaire pour rendre un homme amoureux de son ombre, et assez peuplé pour le faire suffoquer. "
P.477, édition "J'ai lu" de poche n°11373
" Là où vous tracez un trait en m'ordonnant de m'arrêter, ce n'est pour moi que le commencement. "
P.121, édition "J'ai lu" de poche n°11373