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EAN : 9782290380680
448 pages
J'ai lu (03/05/2023)
4.15/5   423 notes
Résumé :
Ce roman commence par un cri et s'achève par un rêve.

Le cri, interminable, est celui que lance aujourd'hui une adolescente de seize ans, prénommée Ada, en plein cours d'histoire dans un lycée londonien.

Le rêve est celui d'une renaissance.

Entre les deux a lieu la rencontre du Grec Kostas Kazantzakis et d'une jeune fille turque, Defne, en 1974, dans une Chypre déchirée par la guerre civile.

Elif Shafak c... >Voir plus
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Critiques, Analyses et Avis (73) Voir plus Ajouter une critique
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Ada Kazantzakis a seize ans. Elle est née et a toujours vécu à Londres, avec pour seule famille sa mère Defne – morte maintenant depuis un an – et son père Kostas. de l'histoire de ses parents, elle ne sait rien, si ce n'est leur origine chypriote, ce qui ne l'empêche pas d'en porter inconsciemment le poids. Pour comprendre cet héritage mystérieux qui la ronge à son insu, il lui faudrait remonter à 1974, lorsque la guerre civile à Chypre aboutit à la partition de l'île, et que la vague de haine et de violence condamne irrémédiablement l'amour qui lie Defne, jeune fille turque, à Kostas, garçon grec...


Comme toujours, Elif Shafak a su trouver l'angle et le ton pour faire de son évocation un texte aussi puissant qu'original, en tous les cas ardemment motivé par la défense des causes qui lui sont chères et qui lui font dire par l'un de ces personnages : « Il y a des moments dans la vie où chacun doit devenir une sorte de guerrier. Si tu es poète, tu combats avec tes mots ; si tu es peintre, tu combats avec tes toiles… Mais tu ne peux pas dire : “Désolé, je suis poète, je passe mon chemin." Tu ne dis pas ça quand il y a tellement de souffrance, d'inégalité, d'injustice. » Si on y retrouve aussi en filigrane la cause des femmes pour laquelle elle a déjà tant écrit, le combat qui porte ce livre est cette fois la libération de la parole sur le drame chypriote, un sujet qui ne va pas manquer, une fois de plus, de froisser la susceptibilité d'une patrie qu'elle a dû fuir en raison de sa libre expression de femme et d'écrivain.


Qui de mieux placé que l'auteur pour évoquer les déchirures de l'exil forcé, leur transmission de génération en génération d'immigrés, et, par dessus-tout, les ravages souterrains causés par les drames que l'on tente d'enfouir dans le silence d'un oubli illusoire ? Il en va de la guerre civile à Chypre comme du génocide arménien : l'histoire n'a toujours pas réussi à admettre toute la vérité, maintenant des générations dans un purgatoire où l'on ne cicatrise jamais. A Chypre, l'on cherche encore, près de cinquante ans après les heurts intercommunautaires, des milliers de disparus grecs et turcs qui continuent d'empêcher deuils et réconciliations. C'est sur cette perpétuation sans fin de la souffrance qu'insiste ce roman, dans un récit bâti sur une fascinante comparaison entre l'existence humaine et celle des arbres.


Nombreuses sont les observations marquantes et étonnantes qui émaillent la narration, sur l'histoire et la culture chypriotes bien sûr, mais aussi sur le milieu naturel de cette île. L'on s'y émerveille des incroyables migrations d'oiseaux et de papillons, l'on découvre avec stupéfaction le caviar de Chypre et son industrie massive du braconnage d'oiseaux, l'on y apprend avec consternation ce qui a rassemblé des milliers de bébés britanniques dans un cimetière chypriote… Mais surtout, le roman se nourrit de fascinantes constatations dendrologiques qui, un peu comme Michael Christie dans Lorsque le dernier arbre, permettent à l'auteur d'édifiantes illustrations relatives à l'épigénétique, à la transmission des traumatismes et à l'absolue nécessité de se souvenir pour guérir.


Plus que jamais « guerrière des mots », Elif Shafak ne laissera personne indifférent à ce brillant plaidoyer pour ce pré-requis à la réconciliation chypriote qu'est la libération de la parole. Ce roman bouleversant est aussi sans doute celui de l'auteur qui, au-delà de l'originalité de sa construction, se nourrit le plus d'observations aussi stupéfiantes que passionnantes. Coup de coeur.

Lien : https://leslecturesdecanneti..
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Choisi à la Librairie Caractères [Issy-les-M.], 22 janvier 2022

Un pur moment de bonheur qui nous rappelle à l'humilité face à cette Nature grandiose, et toutes les espèces vivantes… qui seront encore là, alors que nous, « Espèce humaine » aurons peut-être déserté la planète ! Magie, réalisme, poésie, empathie, fantaisie… un cocktail d'émotions des plus réussis !

Après avoir lu avec grand enthousiasme « Trois filles d'Eve » de cette auteure, j'ai aperçu avec plaisir son dernier ouvrage traduit, présenté sur les tables de ma librairie de quartier. Je me suis empressée de le choisir !
Très beau texte en hommage à tous les exilés du monde ainsi qu'à nos amis silencieux, les arbres, comme la dédicace mise en exergue, le formule très joliment :

« Aux émigrants et aux exilés de tous les pays,
Les déracinés, les ré-enracinés, les sans-racines.

Et aux arbres que nous avons laissés derrière nous,
Enracinés dans nos mémoires… »

L'histoire se déroule entre le récit d'une adolescente, Ada, qui réfugiée en Angleterre avec son père, homme bienveillant bien que personnalité très lunaire ; personne plus à l'aise avec « ses arbres » et ses plantes, qu'avec les humains ; ayant perdu sa femme, il élève seule sa fille comme il peut… On découvre au fur et à mesure l'histoire , le passé de ce très jeune couple amoureux, à Chypre, dont les familles n'acceptent pas l'union… Ils fuient en Angleterre… Toutefois il n'y a pas que les souffrances et les douleurs des humains mais aussi celles des arbres transplantés, comme ce figuier emporté, arraché à sa terre chypriote… accompagnant l'histoire d'amour de ce couple et leur départ forcé !

La parole est abondamment offerte à ce Figuier, qui devient « nôtre » au fil du récit, ce dernier , devenant un personnage à part entière !

Une magnifique lecture que j'ai fait durer… pour ne pas le quitter trop tôt ! Je ne ferai pas plus de commentaires pour garder tout le mystère et la magie incroyable de ce texte…aussi coloré et attractif que la fort jolie couverture !
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Un roman bien sympa, qui m'a emballée au démarrage… mais qui n'a pas tenu toutes ses promesses.
Une bonne idée, l'histoire d'amour à la Roméo et Juliette, entre un Grec, Kostas, et une Turque, Defne, en 1974, alors que les violences entre les deux communautés sont portés à leur comble par le coup d'État fomenté par la dictature des Colonels et par l'intervention militaire menée en réaction par la Turquie. On n'en entend pas parler tous les jours de cette ligne verte chypriote qui résulte de ces conflits et qui reste tristement d'actualité.
Autre question intéressante posée par le roman : que faire de son passé quand on est immigré? le roman est dédié
« Aux émigrants et aux exilés de tous les pays, les déracinés, les ré-enracinés, les sans-racines.
Et aux arbres que nous avons laissés derrière nous, enracinés dans nos mémoires. »
La narration nous balance entre Nicosie, 1974, et Londres, fin des années 2010. Defne a cru protéger sa fille Ada, née en Angleterre, de « cette foutue douleur » en lui en disant le moins possible de leur passé. Mais pas sûr du tout que ce soit une bonne idée.
Et le roman a aussi une dimension écologique, confiant parfois la narration à un figuier, qui malgré tout l'amour qu'il porte à Kostas, n'est évidemment guère adepte d'un spécisme qui autoriserait des humains à flinguer à tout-va d'autres espèces terriennes. Et puis, il faut avouer, ils ne sont pas toujours facile à suivre, les descendants d'Adam: « Les humains sont bizarres, bourrés de contradictions. On dirait qu'ils ont besoin de haïr et d'exclure autant qu'ils ont besoin d'aimer et d'étreindre. Leur coeur se ferme étroitement, puis s'ouvre béant, pour vite se resserrer, comme un poing indécis. »
Peut-être qu'Elif Shafak avait trop de choses intéressantes à dire, lui tenant trop à coeur, et que cela s'est fait un peu, par moments, au détriment de la dimension littéraire. J'ai trouvé qu'il y avait parfois un côté fiches mal intégrées au romanesque.
Malgré ces passages moins intéressants, ça reste un bon roman.
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« Les humains croient savoir avec certitude où s'arrête leur être et où commence celui de l'autre. […] Les arbres ne se nourrissent pas de telles illusions. Pour nous, tout est relié. »

D'une certaine façon, ce sont ces ramifications qu'Elif Shafak déploie par « segments brisés » à travers plusieurs histoires qui cohabitent et alternent. L'une d'elles se déroule à Londres en 2010 avec les préoccupations d'une jeune adolescente dont la maman vient de décéder et qui a grandi dans une sorte d'omerta autour de cette autre île, Chypre, dont ses parents sont originaires. Une autre se déroule à Chypre et commence en 1974, en pleine guerre civile, avec l'amour interdit de ses parents. Une autre encore, dévoile les observations d'un figuier sur son environnement et les agissements des hommes.

Dans l'ensemble, il s'agit d'une lecture plaisante mais en ce qui me concerne, inégale. Les passages relatifs à Ada en 2010, par exemple, n'ont pas véritablement réussi à capter mon attention. J'en attendais plus, étant donné le contexte.
De plus, les personnages, quoiqu'attachants et remplis d'humanité, m'ont également paru manquer d'épaisseur. A l'exception toutefois du figuier. Cet arbre apporte un souffle un brin holistique aux évènements. C'est le maillon fort de la chaine. Il observe son environnement avec distance, tendresse, mélancolie aussi, et véhicule un message dont les hommes devraient un peu plus s'inspirer en arrêtant de se croire « supérieurs à toutes les formes de vie passées ou présentes. » Evidemment, il faut accepter le principe qu'un arbre puisse penser, raisonner, comprendre le langage des hommes, et même lire, ce qui peut être déroutant au début.

L'île aux arbres disparus aborde en toile de fond la fracture entre Chypriotes grecs et turcs, loin d'être cicatrisée, mais il s'agit avant tout, selon moi, d'un livre sur le poids et la force des racines : celles que l'on transporte avec soi quand on est contraint à l'exil, celles, intergénérationnelles, que l'on transmet ou refuse de transmettre à ses enfants, celles qui restent enterrées, celles qui unissent ou désunissent, celles qui, d'une manière ou d'une autre, qu'on le veuille ou non, nous relient…
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Bon, soyons clair tout de suite, je suis définitivement sous le charme de la plume de l'autrice turque, Elif Shafak. Je l'ai découverte lors de ma participation au jury du Grand Prix des Lectrices Elle, en 2020, où son précédent titre « 10 minutes et 38 secondes dans ce monde étrange » était en lice. Véritable révélation pour moi, ce titre m'a marqué encore longtemps, même s'il n'a, hélas, pas été lauréat.

Cela a donc été un pur plaisir que de retrouver Elif Shafak et son dernier livre, « L'île aux arbres disparus ». Encore une fois, elle a su me séduire tant par sa plume élégante que par son histoire captivante. Chacune des pages (ou presque) compte de belles citations. Par son talent de conteuse hors pair, même les drames sont empreints d'une touche de poésie.

Ici, c'est le destin de l'île de Chypre qui est mis en avant, en particulier depuis les années 1970 où une ligne verte marque la démarcation entre la partie grecque et la partie turque, dès 1974. Ne connaissant que très peu l'histoire de ce pays, j'ai appris au travers de ce livre énormément de choses. Quel plaisir ! Cela m'a vraiment donné envie d'en apprendre plus après ce livre.

Elif Shafak mêle à la fois une fiction avec Ada, lycéenne de 16 ans à Londres et sa famille, avec l'Histoire, avec un H majuscule qui est contée au travers d'un figuier. Oui, vous avez bien lu, par un figuier ! Cette originalité se marie extrêmement bien au contexte et en produit un personnage à part entière.

Petite pépite de la littérature selon moi, ce livre comptera indubitablement parmi mes coups de coeur de 2023 ! Je peux que très vivement vous le conseiller. A vos risques et périls d'éprouver, comme moi, une profonde mélancolie une fois les dernières pages tournées….
Lien : https://www.musemaniasbooks...
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critiques presse (1)
Après 10 minutes et 38 secondes dans ce monde étrange, l'écrivaine d'origine turque Elif Shafak nous livre un autre roman fort.
Lire la critique sur le site : LeJournaldeQuebec
Citations et extraits (231) Voir plus Ajouter une citation
Figuier

Les humains ! A force de les observer depuis si longtemps,je suis arrivé à une triste conclusion: ils n'ont pas vraiment envie d'en savoir plus long sur les plantes.Ils ne veulent pas savoir si nous sommes capables de volonté, d'altruisme et de solidarité. Même s'ils trouvent ces questions intéressantes à je ne sais quel niveau abstrait, ils préféreraient les laisser inexplorées, irrésolues.Ils trouvent plus commode,j'imagine de supposer que les arbres, qui n'ont pas de cerveau au sens conventionnel, ne peuvent connaître que l'existence la plus rudimentaire.
Eh bien...aucune espèce n'est forcée d'aimer une autre espèce, ça c'est sûr. Mais si vous prétendez, comme le font les humains, être supérieurs à toutes les formes de vie passée ou présentes, alors il faut acquérir un minimum de compréhension des plus anciens organismes vivant sur terre,qui étaient ici longtemps avant votre arrivée et y seront encore après votre départ. (p.62)
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La capitale était divisée par une zone qui la tranchait de part en part comme un coup de lame à travers le cœur. Le long de ligne de démarcation – la frontière – s’étalaient des maisons en ruine criblées de balles, des jardins vides scarifiés d’éclats de grenade, des magasins à l’abandon bardés de planche, des portails en fer forgé pendant à l’horizontal de leurs gongs brisés, des voitures luxueuses d’un autre âge rouillant sous des épaisseurs de poussières… Les rues étaient bloquées par des rouleaux de barbelés, piles de sacs de sable, tonnelets remplis de ciment, tranchées antichars et tours de guet. Les rues s’arrêtaient brusquement, comme des pensées inachevées, des sentiments non résolus. […]
Nicosie, aujourd’hui la seule capitale divisée du monde. […] Ma ville natale.

(Île)
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Il y a des moments dans la vie où chacun doit devenir une sorte de guerrier. Si tu es poète, tu combats avec tes mots ; si tu es peintre, tu combats avec tes toiles… Mais tu ne peux pas dire : “Désolé, je suis poète, je passe mon chemin." Tu ne dis pas ça quand il y a tellement de souffrance, d’inégalité, d’injustice.
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Les humains sont bizarres, bourrés de contradictions. On dirait qu'ils ont besoin d'haïr et d'exclure autant qu'ils ont besoin d'aimer et d'éteindre. Leur coeur se ferme étroitement, puis s'ouvre béant, pour vite se resserrer, comme un poing indécis.
Les humains trouvent les rats et les souris infects, mais les hamsters et les gerbilles charmants. Les papillons ont droit à leur sympathie, les mites pas du tout. Ils ont un faible pour les coccinelles, mais si jamais ils aperçoivent un hanneton, ils l'écrasent séance tenante.
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Elle se souvint comment son père lui racontait que par des températures extrêmement froides, certains oiseaux, comme les mésanges à tête noire, tombaient dans de brèves torpeurs afin de conserver de la chaleur en prévision du mauvais temps. C’est exactement ce qu’elle éprouvait en ce moment, effondrée dans une sorte d’inertie afin de se raidir pour affronter ce qu’il l’attendait.

(Première partie : COMMENT ENTERRER UN ARBRE – Salle de classe)
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« Lire un livre qui nous plaît, c'est formidable, mais rencontrer l'auteur ou l'autrice, c'est une double chance ! »
Ce mois-ci Bienvenue au club s'est rendu à Manosque, au club de lecture de la médiathèque d'Herbès, en lien avec le festival des Correspondances de Manosque. Un club un peu particulier puisqu'il accueille un auteur en résidence. Cette fois, c'est Salomé Kiner qui s'est prêtée à l'exercice en soumettant une liste de lecture aux membres.
Ce mois-ci les membres nous parlent de: Je suis une fille sans histoire - de Alice Zeniter aux éditions L Arche Beauté fatale - de Mona Chollet aux éditions de la Découverte Les Vilaines- Camila Sosa Villada aux éditions Métailié La guerre n'a pas un visage de femme - de Svetlana Alexievitch aux éditions J'ai Lu Lait Noir – d'Elif Shafak aux éditions Phébus
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