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sur 224 notes
La légende familiale disait que le grand-père d'Anne Sinclair avait été sauvé de manière presque rocambolesque par son épouse. En cherchant à en savoir plus, elle s'est rendue compte que c'était beaucoup plus complexe et a tenté de reconstituer les évènements malgré le peu de documents à sa disposition au départ. Ce qui nous donne ce récit captivant.

Le 12 décembre 1941 commence ce qu'on va appeler la rafle des notables. On a longtemps (Vichy) affirmé que les Juifs français avaient été pris pour cible à partir de la fin 1942, ce qui est faux : cette rafle est la première. Elle est composée de 743 notables et comme les SS exigeaient un compte rond : mille personnes, d'autres Juifs ont été arrêtés dans les rues. Il s'agissait de personnes ayant subi des pogroms depuis des générations, habitués à fuir, aux antipodes des notables qui étaient en France depuis très longtemps et n'avaient jamais subi de persécution.

Les notables sont arrêtés au petit matin, ils ont à peine le temps de s'habiller de prendre une petite valise et sont embarqués, interrogés, emmener d'un endroit à un autre dans Paris et pour finir le train pour les emmener à Compiègne qu'ils traverseront à pieds sur 5 km, sous les coups bien sûr : près de 24 heures se sont déroulées, sans manger ni boire et entasser dans un camp, dans un bloc spécial qu'on appellera le « camp des Juifs ». Dans d'autres blocs sont incarcérés des communistes ou des Russes arrêtés (offensive sur Moscou, car le pacte germano-soviétique a été rompu par Hitler en mai 1941).

Ils sont soumis à un régime spécial, visant à les faire mourir de faim (la soupe où trois navets se courent après, mais donnant parfois lieu à des conflits, tant ils sont affamés) une hygiène déplorable, avec les poux dans les paillasses… Tout est fait pour les humilier et les détruire, mais ils résistent autant qu'ils peuvent, les plus valides organisant des conférences dans leurs domaines respectifs : René Blum (le frère de Léon) sur Alphonse Allais par exemple, ou encore Louis Engelmann, le voisin de Léonce sur l'électricité…

En fait, ils auraient dû être envoyés dans les camps de l'Est (Auschwitz) mais, les trains étaient réquisitionnés pour les permissions de Noël des soldats allemands. On apprend aussi, au passage que René Blum sera jeté vivant dans les fours crématoires à son arrivée.

Je précise que Léonce Schwartz était commerçant dans la dentelle, d'origine alsacienne, et tentant de remonter dans l'historique de la famille, Anne Sinclair a pu retrouver un ancêtre aux alentours de 1600 en Alsace ! Donc Français depuis très longtemps. Pour lui, comme pour ses codétenus, il se considérait avant tout Français.

« Léonce Schwartz, en effet, n'est pas un intellectuel. Il vend de la dentelle en gros, qu'il fait tisser à Bruges…«

Serge Klarsfeld a fourni à Anne Sinclair, la liste exacte de ces notables et de leurs professions, certains étaient des officiers de l'armée, décorés pour leur bravoure pendant la première guerre mondiale. C'est impressionnant!

Anne Sinclair étaye son récit, citant les travaux de Klarsfeld, mais aussi les témoignages de compagnons d'internement de son grand-père, elle ne laisse rien dans l'ombre car elle savait peu de choses sur lui, qui a réussi à être sauvé de la déportation car il était trop mal en point, il est mort quelques jours après l'armistice, en ayant pu revoir son fils Résistant engagé auprès du Général de Gaulle.

J'ai beaucoup apprécié ce livre, récit détaillé sans concession de l'enfer qu'ont vécu ces hommes, dans un camp tenu par des Allemands. Je connaissais très peu choses au sujet de ce camp de Royallieu (vestige de la Royauté comme son nom l'indique) situé près de Compiègne, et pas loin du fameux wagon de Rotondes… et Anne Sinclair m'a profondément touchée et donné l'envie d'en savoir plus et d'aller fouiller pour trouver les témoignages qu'elle cite dans son livre.

En refermant ce livre qui est un uppercut, je me suis rendue compte qu'il y avait encore beaucoup de choses que je connaissais mal, alors que j'ai lu énormément d'ouvrages sur la seconde guerre mondiale, le nazisme, la barbarie du troisième Reich mais devant la montée des intégrismes, des populismes, ce que l'on pensait à jamais dans les oubliettes peut refaire surface…

J'ai très envie de lire l'ouvrage que l'auteure a consacré à sa famille maternelle : « 21, rue de la Boétie »

Un grand merci à NetGalley et aux éditions Grasset qui m'ont permis de découvrir ce livre.

#Larafledesnotables #NetGalleyFrance
Lien : https://leslivresdeve.wordpr..
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12 décembre 1941, commençait la rafle des notables. Parmi eux Léonce Schwartz; le grand père paternel de l'autrice.
L'objectif, pour satisfaire l'occupant allemand, était d'interner à Compiègne mille juifs. Près de sept-cent-cinquante, des juifs français bien installés, des notables, seront raflés cette nuit là. Ils seront rejoints par trois cents juifs étrangers internés à Drancy.
Puis ce sera le départ pour les camps de la mort...

À la recherche de son passé, de celui de sa famille, Anne Sinclair mène l'enquête.
Elle recompose l'histoire de ces notables, qui se croyaient à l'abri de la barbarie nazi et qui, pour la plupart, mourront dans les camps.
Elle ne cache pas les trous : des mémoires se sont perdues, qu'elle ne peut pas, ne veut pas, tenter de reconstituer par l'imagination.
Un court essai historique, fort bien écrit, facile à lire, à conseiller à tous ceux, notamment les adolescents, qui s'interrogent sur l'histoire contemporaine. Ici, pas de complotisme, juste des faits.
Un très beau témoignage.
Lien : http://michelgiraud.fr/2023/..
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un petit livre, court, trop court. Malgré ses recherches, elle le sait ...il y a peu de traces de la fuite de son grand-père. un livre presque intimiste, qui laisse sur sa faim. Je déplore un peu le manque de développement des personnages cités, chacun aurait mérité largement plus. Mais ce livre a le mérite de parler de cette rafle et de ce camp si peu connus.
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Anne Sinclair a déjà fait revivre le souvenir de son grand-père maternel Paul Rosenberg, célèbre marchand d'art, dont la galerie se trouvait 21 rue La Boétie. Dans « La rafle des notables » elle poursuit son devoir de mémoire en évoquant son grand-père paternel, Léonce Schwartz, qui fut arrêté à l'aube du 12 décembre 1941, comme ces 743 autres juifs français arrêtés ce jour-là, - des médecins, des avocats, des militaires - conduits au camp de Compiègne « le camp de la mort lente ». Pour raconter cette douloureuse histoire, la journaliste disposait de peu d'éléments recueillis au niveau familial, « une légende familiale, une évasion rocambolesque » plus de témoins directs… Alors Anne Sinclair va se rendre sur les lieux du drame, enquêter, consulter les archives, les monographies, les témoignages poignants d'autres internés en bénéficiant de l'appui de Serge Klarsfeld.
Elle a pu ainsi mettre en exergue les abominables conditions de détention : le froid, la faim, la promiscuité…mais aussi, la solidarité d'autres détenus
Léonce va tomber gravement malade, il pourra alors être admis au Val-de-Grâce, en février 1942, libéré dans des conditions énigmatiques , bénéficiant peut être de la complicité de l'équipe médicale, échappant ainsi au transfert vers le camp d'Auschwitz le 27 mars 42. Pourtant, il ne survivra que peu de temps à cette libération, il décédera en mai 45.
Ce livre « pour redonner un peu de chair aux disparus » constitue un vibrant hommage à ce grand-père qu'elle n'a pas connu, et apporte un témoignage complémentaire à cette sombre page de notre Histoire.


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«  Se résigner c'est abandonner sa dignité » .
«  Cette histoire me hante depuis l'enfance » .
«  Pourquoi ces êtres français ont- ils été livrés par l'état français sans aucune apparence de résistance?
Et encore « Primo-Levi déporté à Auschwitz emploie ces mots tels que «  Loques , Larves , Damnés » cités par l'auteure .

Trois extraits significatifs de ce témoignage poignant pour , comme l'écrit la célèbre journaliste : Redonner un peu de chair aux disparus, mettre une peu de lumière sur l'histoire du camp de Compiègne administré par les Allemands , fait historique peu connu et peu abordé par les historiens .
Son grand - Père paternel , Léonce Schwarz, faisait partie de ces 743 juifs français, magistrats , chefs d'entreprise , écrivains .....
L'écrivaine et journaliste a réalisé un travail d'enquêtrice , d'Historienne , a effectué des recherches..
J'ajoute que son métier de journaliste lui a évidemment permis de se rė- approprier la vie de Léonce et celle de ses compagnons d'infortune confrontés au froid , à la saleté , à la longueur des appels , les stations innommables , pieds nus, mais surtout à la famine qui devint , au fil des jours la troisième arme aux mains du sadisme des allemands .
La nourriture devint très vite une obsession cruelle. ..
Son enquête familiale nous fait connaître dans le détail, aidée bien sûr par Serge-Klarsfeld, , Laurent Joly Karine Taïeb, et d'autres ,les détails historiques, qui servent de fil rouge à un récit très personnel , à la fois intime et universel , aidant à la mise en oeuvre de la mémoire collective .
Elle relate les faits, les retrace clairement avec beaucoup d'objectivité, faisant référence aussi à la vie et à la descente aux enfers de prisonniers , qui passaient leur temps à redouter des départs vers l'Est sans trop savoir ce que cela signifiait .
Ces questions torturaient ces hommes , pour la plupart «  Protégés par la vie jusqu'ici » projetés brutalement dans un ailleurs sordide , qui végétaient dans des baraques glacées où ils crevaient de faim.
Ce camp des juifs va devenir , à partir du 12 décembre 1941 «  le camp de Douleur des Juifs » ...
On referme ce petit livre documentaire , trop court ......

Une lecture témoignage en hommage à ceux , très , très nombreux qui ne sont pas revenus ——à propos du destin énigmatique de Léonce ——avec douleur et respect :
Un ajout de plus écrit avec retenue, pudeur, émotion contenue, exactitude ..
La mise à jour de cette inhumanité , ces persécutions et exactions commises de sinistre mémoire .
Pourquoi La Croix Rouge ne put jamais entrer «  Dans le camp des Juifs » ?

«  Pour les Juifs ,pas de pitié ! Nous étions bien les plus mal partagés des animaux , n'ayant même pas pour veiller sur notre sort , la Société Protectrice des Animaux » écrit Roger-Gompel.

«  C'était un acheminement implacable vers la mort , pour humilier, avilir ,abrutir , épuiser, sorte de pogrom à froid » .

Merci à l'auteure de nous avoir fait connaître le destin de son grand - Père paternel .
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J'ai lu ce livre parce que ma bibliothèque va le rendre à la BDP qui le réclame, alors que j'aurais voulu une lecture plus… légère, je dirais. Mais dès les quelques pages d'introduction, j'ai compris que, avec le type d'infox historiques que certain(s) s'attache(nt) à faire courir ces temps-ci, une enquête comme celle-ci prend une importance toute particulière. Anne Sinclair revient sur le passé de sa famille paternelle, des commerçants de confession juive installés en Alsace au début du XVIIe siècle. La période qui l'intéresse, c'est la Deuxième Guerre mondiale, ce n'est pas une surprise. Elle s'attarde donc sur ses grands-parents paternels, Léonce et Marguerite Schwartz, sur lesquels courent certaines légendes. Anne, jeune fille, n'y a pas prêté assez d'attention, pas plus qu'elle n'a tenté d'interroger sa grand-mère pendant qu'elle le pouvait encore pour trier le vrai du faux. Elle le regrette aujourd'hui et, par ce livre, tente de découvrir la vérité.
***
Ce que la journaliste raconte dans ce trop bref ouvrage « vient infirmer la thèse élaborée par Vichy dès la Libération et reprise aujourd'hui par des polémistes révisionnistes – toutefois démentis par tous les historiens – selon laquelle le gouvernement du Maréchal aurait servi de bouclier aux Juifs français ! » Les Français juifs n'ont pas commencé à être arrêtés fin 42, en représailles au débarquement en Afrique du Nord, comme on l'entend souvent, mais dès août 41. La rafle dans laquelle le grand-père d'Anne Sinclair sera pris a eu lieu le 12 décembre 1941. Ce jour-là, 743 Français juifs seront entassés dans le camp de Compiègne-Royallieu et, sur la demande des autorités allemandes, 300 juifs étrangers les y rejoindront. Beaucoup d'entre eux seront déportés dans des camps où la plupart mourront dans les conditions que l'on sait. Anne Sinclair s'appuie sur des sources familiales et amicales (peu), mais surtout sur des ouvrages de spécialistes, des journaux intimes de certains prisonniers, et les travaux de Serge Klarsfeld (voir la bibliographie en fin de texte). Je suis contente d'avoir découvert ce livre intéressant et nécessaire.
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Avec l'âge, Anne Sinclair se rend compte qu'elle connaît peu l'histoire de son grand-père paternel, Léonce Schwartz, son père Robert lui en a très peu parlé et elle n'a pas posé de questions dans sa jeunesse, du moins pas assez, mais on sait bien à quel point une chape de silence s'est abattue sur les descendants des victimes de la Shoah au sortir de la guerre. Elle connaît mieux l'histoire de ses grands parents maternels, Paul Rosenberg, un marchand d'art connu, ami de Picasso, qui a pu fuir aux USA à temps. de Léonce, elle ne connaissait qu'une légende familiale qui raconte son évasion rocambolesque, de Drancy, croyait-elle, grâce à l'héroïsme de sa femme Marguerite. Anne Sinclair décide de rechercher les traces de cet homme, mort trois ans avant sa naissance, juste après l'armistice de mai 1945.

Léonce n'a pas été interné Drancy, mais à Compiègne, un petit camp de transit. Il a été arrêté le 12 décembre 1941, pris dans la rafle des notables, l'une des deux premières, avec celle dirigée contre des avocats Juifs en août de la même année. La solution finale et la machine de mort nazies sont encore en phase de rodage. Ces deux premières rafles concernent des notables, soit des intellectuels, des membres de profession libérale ou des chefs d'entreprise aisé comme Léonce qui est négociant en dentelle de Bruges. Ils sont sept cent quarante trois, arrêtés au petit matin dans leurs immeubles cossus. Toutefois Berlin exige mille prisonniers, le lot sera complété par trois cents Juifs étrangers arrêtés dans la rue et qui n'appartiennent pas du tout à la même classe sociale.

Ces notables ne se sentent pas Juifs le moins du monde, ils ne fréquentent pas les synagogues, vivent en France depuis des siècles et se sentent uniquement français, ils sont parfaitement assimilés et appartiennent à l'élite de la nation. Malgré la montée de l'antisémitisme dans les années 1930, le fait que les théories d'Hitler sont largement connues dans l'opinion, et même assez partagées, ils ne voient rien venir. Les Juifs étrangers, le plus souvent des artisans venus se réfugier au pays des Droits de l'Homme, arrivent de pays où on les persécute depuis toujours et n'ont aucune naïveté sur les intentions du régime de Vichy. Leurs visions sont radicalement opposées et le sujet de l'identité juive n'est jamais discutée au camp, sous peine que cela ne tourne en conflits ouverts.

L'internement de ces personnes durera jusqu'à fin mars 1942 et Anne Sinclair nous raconte avec pudeur la vie de ces notables tombés de haut, qui n'ont jamais eu à souffrir d'antisémitisme jusqu'à ce jour. Ils essaient de résister moralement malgré la faim, la crasse et les maladies, ils organisent une vie culturelle. Il n'y a ni travaux forcés, ni extermination et ce camp est le seul placé directement sous l'autorité de l'armée allemande alors que Drancy est géré par la police française, du moins officiellement. Ce camps est destiné à faire mourir les prisonniers à petit feu, principalement en les affamant.

En mars 1942, plus de cinq cents survivants partiront par le premier convoi pour Auschwitz et pratiquement personne n'en reviendra. Les plus jeunes et les plus malades seront libérés, non parce que les nazis auraient eu des scrupules, mais par des errements administratifs, la voie vers l'Est est enfin libre, les permissionnaires allemands sont retournés au front. Léonce sera transféré à l'hôpital d'où Marguerite le fera évader on ne sait comment. Il mourra trois ans plus tard suite aux mauvais traitements endurés et personne ne sait comment ils ont vécu ce laps de temps.

Anne Sinclair n'a pas retrouvé de traces concrètes de son grand père, mais elle a évoqué le destin de ses compagnons dont beaucoup étaient très connus, elle souligne leur courage et leur grandeur face à l'indicible. Ce témoignage est nécessaire pour rappeler ce fait peu connu et c'est pour moi un coup de coeur qui m'a beaucoup touchée.

#Larafledesnotables #NetGalleyFrance !
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Comme tout le monde, pendant une période de sa jeunesse, Anne Sinclair n'était pas spécialement intéressée par la vie de son grand-père paternel et son père n'en parlant pas, son manque de curiosité était légitime. Sa seule connaissance était l'histoire d'une évasion plus ou moins rocambolesque à l'instigation de sa grand-mère !

Avec ce petit livre, certainement beaucoup plus mince que la somme des recherches qu'elle a effectuées, sa plume de journaliste lui a permis de se réapproprier la vie de son grand-père. Par la même occasion elle a partagé tout ce qu'elle a appris de cette rafle, un peu oubliée, et de la mort par famine qui était appliquée au camp de Compiègne.

Je savais qu'il y avait un camp d'internement à Compiègne mais je n'avais jamais su qu'une partie des internés étaient des notables juifs, français de longue date.

Toutes les petites histoires dans l'Histoire de l'holocauste sont les bienvenues pour continuer de mettre au jour toutes les exactions commises et par son talent d'écriture elle a rendu celle-ci accessible à tous !

Merci à NetGalley et Grasset pour cette lecture témoignage !

CHALLENGE RIQUIQUI 2020
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Anne Sinclair explique qu'elle n'avait que peu d'éléments pour aborder dans ce livre uniquement une histoire familiale, et qu'elle ne souhaitait pas en faire un roman « car j'aurais eu l'impression de trahir le récit si douloureux qu'ont livré les quelques survivants. »

C'est un témoignage, une enquête fouillée sur le camp de détention de Compiègne-Royallieu qui a vu le jour.

Anne Sinclair met en effet en lumière ce camp français administré par la Wehrmacht, moins connu que celui de Drancy, Pithiviers ou Beaune-la-Rolande.
Elle raconte la rafle des notables, comment le 12 décembre 1941, les vies de Léonce et Margot, Schwartz, ses grands-parents paternels, et celle, de tant d'autres familles, ont basculé. Ce matin-là, 743 notables juifs français et 300 juifs étrangers, ont été interné dans « le Camp de la mort lente » pour une détention barbare, inhumaine.
Quelques-uns furent libérés. Pour les autres, le convoi n°767, parti de la gare du Bourget-Drancy, les achemina à Auschwitz, trois mois et demi plus tard.

Un pan triste et sombre de l'Histoire que l'auteure dépose « comme un fardeau intime devenu mémoire collective ».
Elle évoque à plusieurs reprises ce sentiment de culpabilité qui la tiraille, la hante, celui de ne pas avoir interrogé davantage son père sur le passé, sur ce qui s'est passé dans ce camp. Elle nourrit alors une obsession, celle « [d'essayer] de redonner un peu de chair aux disparus. »

Un grand et bel hommage à son grand-père.

« Léonce restera donc comme une ombre qui passe dans ce récit. Mais l'effort pour retrouver sa trace durant ces mois de 1941-1942 m'aura permis d'entrer par effraction dans une tragédie déchirante et mal connue, et me donner la volonté d'en transmettre le récit à mes enfants et petits-enfants. »

Texte toujours et ô combien nécessaire, à l'heure où l'on assiste en France, depuis quelques années déjà, à la résurgence de l'antisémitisme ainsi qu'à la montée de l'extrémisme et du populisme.
Lien : https://seriallectrice.blogs..
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Le 12 Décembre 1941, Léonce Schwartz, grand-père d'Anne Sinclair, commerçant en dentelle d'origine juive, est arrêté ainsi que 743 autres Juifs d'origine bourgeoise pour la plupart et 300 Juifs transférés de Drancy. Ils sont conduits à Compiègne, au camp d'internement de Royallieu. Ils endurent pendant 3 mois le froid, le manque d'hygiène, la faim, la promiscuité, la maladie et l'ennui. Beaucoup sont transférés à Auschwitz fin mars 1942 d'où ils ne reviendront pas. Léonce Schwartz a eu plus de chance lui puisqu'en février, il a été conduit au Val-de-Grâce d'où sa femme arrivera à l'en faire sortir. Il meurt quelques semaines après la fin de la guerre.

C'est par les médias que j'ai appris qu'Anne Sinclair, que je connaissais comme journaliste, a eu un grand-père interné pendant la Seconde Guerre Mondiale en raison de ses origines juives. Il s'en est sorti de peu.
J'ai trouvé ce récit intéressant car il éclaire les arrestations et déportations en France de personnes juives ou dont les ascendants l'étaient. Ici, il s'agit de personnes de milieu bourgeois, certains comme le grand-père de l'auteur avaient même reçu la Légion d'Honneur. C'est d'autant plus choquant que ces gens-là qui avaient honoré la France, aient été arrêtés, déportés et exécutés. Cela m'a fait penser au film "La rafle" où un des acteurs principaux a combattu pour la France pendant la Première Guerre Mondiale et est déporté malgré cela.
On voit aussi dans ce récit le rôle de la Police française qui s'associe à la Police allemande pour arrêter la population. Encore une fois, cela met en lumière le fait que le gouvernement ait collaboré pleinement aux exigences allemandes.
Je ne connaissais pas l'existence de ce camp d'internement français qui a rempli un rôle identique à ceux de Drancy et Beaune-la-Rolande, avant que les détenus soient envoyés vers les camps de la mort. Ce récit m'a donc appris quelque chose.
Même si ce camp ne faisait pas travailler les détenus, c'est aussi révoltant car il s'agissait de personnes d'un certain âge qui enfermées dans le dénuement quasi total, la faim, le froid, la maladie, sont mortes à petit feu avant d'être conduites à Auschwitz, leur sort n'a donc pas été plus enviable que les détenus d'Auschwitz lui-même.
Ce court récit d'une centaine de pages a donc été instructif pour moi.
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