Psi-Changeling, tome 9 : Passions exaltées

Emmett partit d'un rire et déposa un baiser sur la tempe de sa compagne.
— Raconte-leur ce que Lucas a dit quand il s'en est aperçu.
— Vous savez que je suis l'assistante administrative de Luc, n'est-ce pas ? (Ria attendit qu'ils hochent la tête pour poursuivre.) Quand il s'est rendu compte que j'étais enceinte, il m'a passé un savon.
Andrew cligna des yeux.
— Tu es sérieuse ?
Les félins adoraient les enfants autant que les SnowDancer. Il n'imaginait pas que le chef des léopards ait pu être contrarié par un tel événement.
— Eh oui. Il m'a demandé ce qu'il allait devenir quand je prendrais un congé maternité. (Ria attendit une seconde avant de leur révéler le dénouement de l'histoire.) Puis il m'a dit de mettre les pieds sur la table et ne m'a même plus laissée tenir une agrafeuse, jusqu'à ce que je menace de lui donner un coup sur la tête avec.
Indigo éclata de rire.
— Combien de fois t'a-t-elle menacé depuis que tu sais ? demanda-t-elle à Emmett.
— Juste une vingtaine, répondit-il en se fendant d'un lent sourire.

L’estomac d’Indigo se noua. Drew était-il vraiment parti ? Avait-il fini par renoncer à elle et s’éclipser ? En proie au doute, sa louve se tut tandis que sa colère enflait. Ce n’était pas comme ça que ça marchait… le mâle n’était pas censé abandonner la partie. Il devait courtiser la femme qu’il désirait et se battre pour elle. Sauf qu’elle avait choisi un autre homme devant lui. Ça avait été une atteinte directe à sa fierté, l’unique faille dans l’armure d’un changeling prédateur.

« Personne ne peut te prendre ce que tu n’as pas envie de donner. Ce choix t’appartient. »

— Je vais aller droit au but, dit Abel alors qu'ils profitaient de l'air frais de la nuit, chacun un verre à la main, Indigo est une adulte qui sait ce qu'elle veut. Le choix de son compagnon lui appartient.
Voyant qu'Abel attendait une réponse, Andrew dit :
— Oui, monsieur.
Alors que son loup avait bien géré Adria, il se méfiait d'Abel. Ce n'était pas une question de domination puisque Andrew était plus haut placé que lui, mais de famille.
Abel but une gorgée de whiskey.
— Je me suis renseigné sur toi.
Andrew garda le silence.
— Les femmes t'aiment bien.
Une lueur brilla dans ses yeux gris foncé qu'il avait transmis à sa fille cadette.
— Vous n'avez pas à vous inquiéter de ma loyauté, dit Andrew, qui ne voulait pas de malentendu sur ce point. Indigo est la seule femme qui m'intéresse.
— Je le sais, dit Abel à sa grande surprise. Quand on s'est rencontrés, je regardais Tarah de la même façon que tu regardes Indigo. (Il partit d'un petit rire.) À vrai dire, c'est toujours le cas.
Andrew se détendit.
Trop tôt.
— Sache que si tu lui fais du mal, je te brise tous les os du corps, dit Abel sur le même ton chaleureux. Deux fois.

Après avoir survécu à Abel et au dîner, Andrew entra dans la cuisine et alla se placer à côté de Tarah pendant qu'elle coupait le gâteau du dessert.
— Tarah ?
Au lieu de répondre, Tarah prit une part de gâteau et se tourna pour la lui faire goûter.
— Alors ?
Il mastiqua, savoura le goût corsé du brandy et du chocolat puis déglutit.
— Veux-tu m'épouser ?
Elle lui répondit par un sourire malicieux.
— Que veux-tu savoir, chéri ?
Sous le charme, Drew ne prétendit pas l'avoir suivie sans raison.
— Ta sœur est beaucoup plus jeune que toi.

— L'aube est levée depuis au moins deux ou trois heures.
La forêt résonnait de chants d'oiseaux, et le ciel bleu pâle scintillait de nuances dorées et roses qui auguraient d'une journée splendide.
Suivant des yeux les rayons de soleil qui jouaient à la surface de l'eau, Drew grimaça.
— L'aube est levée depuis deux ou trois heures ? Tu es cinglée ? C'est à midi que les gens sensés se lèvent.
En riant, elle s'appuya légèrement contre lui tandis qu'il lui caressait la jambe d'un geste nonchalant.
— Comment gères-tu les patrouilles nocturnes ou matinales ?
— Je les gère très bien. C'est juste que je préfère rester au lit si c'est possible.
— Tu es sûr que tu es un loup ? le taquina-t-elle. Tu m'as plutôt l'air d'un gros matou paresseux.
Un grondement monta dans la gorge de Drew.

Elle le retrouva dans la salle de musculation, occupé à soulever des poids sur un banc tout en lisant ce qui ressemblait à des rapports boursiers sur un écran de communication transparent fixé au mur.
— Tu viens de flinguer ta réputation de tas de muscles sans cervelle, dit-elle en tournant le dos aux rapports.
Essoufflé, il reposa le poids dont il se servait.
— Ne le dis à personne. C'est mon arme secrète.

Tarah le regarda un long moment.
— Ta maman t'appelait son « bébé d'amour ».
— Ah oui ? (La gorge d'Andrew se noua.) Et Riley ?
— Son bébé têtu. (Tarah sourit.) Brenna était son bébé joyeux.
— Elle nous avait bien cernés.
Incapable de soutenir plus longtemps le regard de Tarah, il tourna la tête vers les enfants, les yeux voilés de larmes.
Tarah garda longtemps le silence, mais lorsqu'elle reprit la parole, ce ne fut pas pour parler de la mère de Drew.

Andrew avait envie de tuer Hawke... lentement et en y prenant grand plaisir. De toutes les femmes qu'il aurait pu amener...
— Pourquoi ? marmonna-t-il lorsque Maria se décida enfin à le lâcher pour aller poser son sac en roulant les hanches et lui soufflant un baiser par-dessus l'épaule.
Hawke prit un air innocent qui ne trompa pas Andrew une seconde.
— J'ai demandé un volontaire... elle a levé la main.
— Ben voyons.
Se passant les doigts dans les cheveux, Andrew fusilla du regard l'homme qu'il comptait bien étrangler à la première occasion.
— Maria est gentille et sexy, et elle ne pense qu'à te baiser. (Le sourire de Hawke reflétait l'amusement de son loup.) Je ne vois pas où est le problème... d'autant que tu as clairement besoin de baiser.
Son chef s'y connaissait en provocation. Andrew aussi.
— Tu fais de la projection, Hawke ?
Les yeux bleu glacier de ce dernier se chargèrent d'un éclat plus ardent, mais il ne mordit pas à l'hameçon.
— Petit malin. Parle-moi du problème de la nuit dernière.

Et même s'il lui en coûtait de l'admettre, il n'y avait pas de danse nuptiale entre lui et Indigo, pas d'impulsion née du cœur sauvage de leur nature qui - à défaut d'autre chose - l'attirerait inexorablement vers lui et l'obligerait à lui prêter attention. Non, il ne pouvait compter que sur sa détermination à toute épreuve... et sur son cœur. Judd soupira.
— Ce n'est pas ton fort.
— Tu me donnes des conseils de séduction, toi ?
Andrew était abasourdi.
— Je suis en couple, lui signala Judd avec une froide arrogance qui masquait presque l'amusement dans sa voix. Toi, tu n'arrives même pas à mettre la femme que tu désires dans ton lit. J'écouterais si j'étais toi.
Andrew le gratifia d'un doigt d'honneur, mais son loup dressa les oreilles.
— Ouais, alors ?