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Le nombril de Solveig » est un roman auquel on peut trouver plusieurs sens. J'aime qu'un auteur suggère, permette à ses lecteurs de s'approprier l'histoire et d'en tirer leur propre morale.
On commence «
Le nombril de Solveig » comme un thriller, parfois ironique, avec son antihéros et au rythme des disparitions de l'héroïne. On le poursuit comme une histoire d'amour, aux accents nostalgiques. Puis, la fable prend les couleurs prophétiques d'un XXIe siècle déshumanisé.
Elle devient une allégorie de la solitude. Celle de celui qu'on abandonne, qui traverse sa vie à la recherche de l'être aimé et de réponses. Celle de sa persévérance, son pardon et sa fidélité à une promesse d'amour incertaine. La solitude d'une vendeuse de souk dans la pauvreté… Celle, encore, de l'enfance orpheline. Celle de la maladie ; de la folie, peut-être. Et celle de la responsabilité, lorsqu'on fait, par amour ou faiblesse, des choix étranges ou cruels. On termine le récit comme un témoignage, une histoire de vie.
Le livre fourmille de descriptions, qui en construisent l'atmosphère et permettent à l'auteur de commenter les événements. Il le fait avec humour, à la manière d'un observateur étonné, parfois acerbe. Son style est une gourmandise, qui soutient un foisonnement de réflexions sociales et sentimentales, parfois loufoques, d'hyperboles et de métaphores, amusantes ou grinçantes.
En toile de fond (par exemple avec l'opposition entre photographie numérique et argentique, ou par l'amour patient de Standor pour Solveig), on peut imaginer un éloge de la lenteur et de la persistance, contraire au monde des réseaux sociaux, instantané et oublieux.
On appréciera cette lecture, d'autant plus qu'on aime prendre son temps, approfondir les situations et les personnages, découvrir un style d'auteur et goûter à une langue travaillée.