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Critique de Nastasia-B


Ce petit ouvrage est une sélection de quatre nouvelles issues du recueil La Grande Vallée, lui-même, sorte de pot-pourri de la diversité des talents de conteur et de portraitiste du grand John Steinbeck.
Je vous avoue que ce n'est pas dans l'exercice de la nouvelle que je préfère ce génial romancier américain, qui est pourtant, sans aucun doute, l'un de mes auteurs préférés, toutes catégories confondues.
Ici, on y découvre certains des " dadas " de l'auteur : l'âpre vie campagnarde, le drame domestique, la bizarrerie psychologique ou encore la vie des minorités immigrées.
Comme toujours, Steinbeck nous téléporte dans la Californie de l'entre-deux-guerres. le choix éditorial des éditions Folio n'est pas dénué d'intérêt car, même si les nouvelles retenues ne sont pas, à mes yeux, nécessairement les meilleures de la Grande Vallée, celles-ci ont une cohérence entre-elles puisqu'elles ont comme dénominateur commun la Femme, dans ce qu'elle peut avoir de plus mystérieux, de plus influent, de plus capital… et de plus nocif aussi !
La nouvelle titre, le Meurtre, me fait penser à certains égards à Des Souris Et Des Hommes. On y voit un fermier aisé, Jim Moore, qui vit une vie sans histoire avec sa femme Jelka. Oui, vous avez deviné, Jelka Sepic, ça sonne plutôt Yougoslave et effectivement, elle est une immigrée, elle est toute sa famille. Les moeurs de l'Europe centrale étant encore plus rudes que celle de l'Amérique rurale, le beau-père de Jim, dans son anglais approximatif lui a bien spécifié qu'une femme yougoslave, ça doit recevoir des raclées, sans quoi, ça ne sait pas se tenir ! Jim assure au père de Jelka qu'il n'en sera jamais ainsi sous son toit. D'ailleurs, en plus d'être d'une grande beauté, sa femme s'avère être une parfaite épouse, courageuse et travailleuse. le seul défaut que Jim pourrait à la rigueur lui trouver, c'est qu'elle ne décroche pas un mot spontanément et quand il s'adresse à elle, celle-ci lui répond une demie phrase banale.
Un jour pourtant, Jim Moore est appelé par un voisin qui lui annonce qu'il a découvert au loin la carcasse d'un de ses veaux. Jim doit donc s'équiper pour partir vérifier tout ça et s'apprêter à passer une nuit à la belle étoile car l'aller-retour à cheval sera une sacrée randonnée. Jim parvient pourtant à rentrer plus tôt que prévu, dans la nuit et… surprise ! Il y a quelqu'un dans le lit avec Jelka !
La nouvelle intitulée le Harnais me ferait, elle, plutôt penser au roman À L'Est D'Eden. Nous y avons également affaire à un fermier au-dessus de tout soupçon, Peter Randall, dont la droiture est localement quasi légendaire. Cet homme frisant la cinquantaine, à la réussite financière et à la conduite morale irréprochables, tire un surcroît de fierté à considérer sa forte échine, droite comme un i et munie de larges épaules, si différente de ses compères paysans, qui arborent presque tous un dos aussi voûté que leurs mains sont calleuses.
La robustesse triomphante de Peter Randall tranche singulièrement avec la chétive allure de sa minuscule épouse, hâve, flétrie et maladive. Nombreux sont ceux qui s'étonnent, une fois l'an, lorsque Peter quitte pour quelques jours sont ranch afin de se rendre à la grande ville, laissant seule sa frêle Emma…
Le Serpent est certainement la nouvelle la plus bizarre du recueil. La plus courte aussi. On y parle de la fascination énigmatique d'une femme pour un serpent venimeux et du plaisir gourmand qu'elle éprouve à le voir occire des rats…
Enfin, Fuite, qui me ferait, elle, davantage penser à La Perle, nous conte la traque dans le maquis de Pépé, le fils de Mama Torres, une fermière d'origine mexicaine. Elle avait envoyé Pépé un remède et du sel à Monterey chez Mme Rodriguez, une amie de la famille. Mais sur place, le vin aidant, le ton monta, la chaleur s'accrut dans les esprits, un couteau fut sorti, des insultes proférées et… Pépé dut défendre son honneur. Il le défendit si bien qu'il dut alors prendre la poudre d'escampette avant qu'on ne lui tombe dessus…

Quatre récits donc où les hommes se cherchent et où les femmes sont leur point de repère, à moins que ce ne soit l'inverse, allez savoir…
Du bon Steinbeck, pas de l'excellent, mais si vous craignez de vous lancer dans l'un des longs et voluptueux trésors de romans qu'il nous a légué, vous pouvez avantageusement vous en faire un avant-goût à la lecture ultra rapide de ce mini recueil. (Bien que j'aurais tendance à vous conseiller, en première approche un petit roman très abordable comme Des Souris Et Des Hommes, plus révélateur à mon sens du talent véritable de son auteur, mais, vous connaissez la musique à présent, ce n'est là que mon avis, un perdu dans la nuée, c'est-à-dire, pas grand-chose.)
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