je manquais de délicatesse indispensable quand on effleure l'âme d'autrui...
L'indifférence équivaut à une paralysie de l'âme, à une mort prématurée.
Quelles causes fatidiques, diaboliques ont empêché votre vie de s'épanouir dans sa pleine floraison printanière, pourquoi, avant même d'avoir commencé à vivre, vous êtes vous hâté de détruire en vous l’image et la ressemblance divines pour vous métamorphoser en animal craintif qui aboie pour effrayer les autres parce qu'il a peur de lui-même ?
Le sens de la vie ne réside que dans une seule chose : la lutte. Il faut écraser sous son talon la hideuse tête du reptile, et crac ! Voilà le sens de la vie. Il n'est que là , ou alors elle n'en a pas.
Même la maladie a du charme quand on sait qu'il y a des gens qui attendent votre guérisson comme une fête.
Derrière chaque homme heureux il y a un homme malheureux.
Je l'aidais à s'habiller et il se laissait faire à contrecœur, en silence, sans remarquer ma présence ; puis, les cheveux encore humides, fleurant le parfum frais, il allait boire son café dans la salle à manger. Il le prenait assis à table, en parcourant les journaux ; Polia, la femme de chambre, et moi, nous nous tenions respectueusement près de la porte et le regardions. Deux adultes devaient en regarder avec la plus grande attention un troisième en train de boire son café et de manger des biscuits secs.
les forts sont insolents et oisifs, les faibles ignares, semblables à des bêtes; alentour une invraisemblable pauvreté, des pièces surpeuplées, la dégénérescence, l'ivrognerie, l'hypocrisie, le mensonge... Pourtant, dans toutes les maisons et dans les rues, le calme et la tranquillité règnent : sur cinquante mille habitants d'une ville pas un qui crie ou s'indigne à haute voix. Nous voyons ceux qui vont faire leur marché, qui mangent le jour, dorment la nuit, qui disent leurs fadaises, qui se marient, qui vieillissent, qui traînent benoîtement leurs morts au cimetière; mais nous ne voyons pas et n'entendons pas ceux qui souffrent, et tout ce qu'il y a d'horrible dans l'existence se passe quelque part en coulisse.
P. 243
En octobre le lycée fit une lourde perte: Hippolytych contracta un érysipèle de la face en mourut. Les deux derniers jours il perdit conscience et délira, mais dans son délire il ne disait que des choses que tout le monde savait. "La Volga se jette dans la mer Caspienne... Les chevaux se nourrissent d'avoine et de foin..."
P. 204
Maintenant, tout recroquevillé de froid, il songeait que le même vent soufflait à l'époque de Rurik, d'Ivan le Terrible et de Pierre le Grand; qu'à leur époque sévissent une pauvreté et une faim aussi féroces: les mêmes toits de chaume crevés, les mêmes ignorances, la même angoisse, le même désert alentour, les mêmes ténèbres, le même sentiment d'oppression : toutes ces horreurs avaient existé, existaient et existeraient, et que dans mille années, la vie ne serait pas devenue meilleure.
P. 166 (L'étudiant)