Citations sur Le doute (65)
- Alors ? dis-je enfin. Qu’est-ce que tu en penses ? Aller vivre sur une île, rien que nous trois, tu ne trouves pas ça formidable ?
Kristie acquiesce d’un léger mouvement de tête. Baisse les yeux vers son livre, le referme, me dévisage de nouveau.
- Maman ? Pourquoi tu m’appelles tout le temps Kristie ?
Je ne réponds pas. Le silence me semble soudain assourdissant.
- Je, euh… Excuse-moi, ma puce, tu disais ?
- Pourquoi tu m’appelles tout le temps Kristie, maman ? Kristie est morte. C’est Kristie qui est morte. Moi, je suis Lydia.
- Vive l'hiver ! s'exclama Josh. J'adore quand il fait bien froid. J'en étais où, déjà ? Ah oui, et il y a aussi ce lac, Lagan quelque chose. Lagan...
- 'Lagan inis na Cnaimh', compléta Angus.
- C'est ça. J'oublie toujours que t'es du coin, toi aussi. Oui, 'Lagan inis'. Molly m'en a parlé hier soir, ça veut dire 'le creux de la prairie des ossements'. Non, mais t'imagines l'effet sur les prix de l'immobilier, un nom pareil ? T'as envie d'acheter un petit cottage dans le creux de la prairie des ossements, toi ? Non, hein ? [...]
(p. 210)
L'espoir me galvanise. J'ai l'impression qu'elle va franchir le pas, cette fois : elle va parler à l'une de ses camarades, elle va essayer de communiquer. Elle s'avance timidement vers une petite brune - une gamine svelte, apparemment sûre d'elle, qui discute avec ses copines.
Je l'entends demander d'une voix un peu tremblante :
- Grace ? Tu veux savoir comment s'appelle mon léopard ?
La dénommée Grace se retourne, la jauge d'un bref coup d'oeil, puis hausse les épaules sans rien dire. Elle glisse ensuite quelques mots aux autres filles et, juste après, le groupe s'éloigne, laissant [ma fille] toute seule, en contemplation devant ses pieds. Rejetée. Bannie.
C'est insupportable. J'essuie rapidement mes larmes [...].
(p. 206-207)
La mort de nos proches est bien plus terrible que la nôtre et, oui, l'amour est une forme de suicide : quand on aime vraiment, on se détruit soi-même, on rend les armes, on tue délibérément quelque chose en soi
- [...] Allez, mets tes chaussures ; tu peux te débrouiller toute seule, maintenant. Il est temps de retourner à l'école. Tout ira bien.
Combien de mensonges peut-on raconter à son enfant ?
(p. 321)
Nous étions heureux - bien plus que tous nos amis, me semblait-il. Et aujourd'hui, je me surprends à envier le couple que nous formions alors. Je suis la voisine jalouse de celle que j'étais. Jalouse de ces fichus Moorcroft, de leur vie parfaite, avec leurs jolies jumelles et leur beau chien.
_ L'idée de ma mort m'est intolérable, bien sûr, mais moins que celle de mes proches. Parce que je les aime. Je sais qu'une partie de moi va mourir avec eux. Vous voyez ? Alors, pour moi, tout amour est une forme de suicide.
La mort de nos proches est bien plus terrible que la nôtre et, oui, l'amour est une forme de suicide : quand on aime vraiment, on se détruit soi-même, on rend les armes, on tue délibérément quelque chose en soi.
" Je vous en prie, mon Dieu, faites que ça marche. Je vous en prie. Je jure que je croirai en vous si vous faites en sorte que ça marche "
Dès le jour où, au cœur de l'hiver, ma mère est arrivée (...) dès le moment où elle a posé son regard sur les deux sœurs couchées ensemble dans le berceau - sur ces deux bébés minuscules et identiques, qui se suçaient réciproquement le pouce -, dès l'instant où son visage s'est éclairé d'un sourire à la fois incrédule et ébahi, et où ses yeux se sont écarquillés d'un émerveillement sincère, j'ai su que donner naissance à des jumeaux était un miracle encore plus impressionnant que celui de devenir parent. Car les jumeaux, en particulier les vrais, tiennent du phénomène génétique : ce sont des êtres extraordinaires par leur simple existence.