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Malgré un changement de siècle et des décennies passées, le nombre de féminicides causé par un mari ou un ex-compagnon est encore un fléau bien présent dans le monde entier...

Natasha Trethewey, célèbre poétesse et universitaire métisse américaine a vécu ce drame en 1985 par la perte de sa mère tué par arme à feu par son ex-conjoint. Trente cinq ans après ce crime, Natasha reste profondément marquée et hantée.

Dans ce livre, l'auteur nous offre par son récit un témoignage poignant sur son enfance et sa relation avec sa mère, tel un hommage rendu à cette femme quittant les siens trop tôt. Entremêlés de souvenirs, de dépositions de plaintes et de rapports de police, cet ouvrage autobiographique met en exergue les difficultés encore connues pour lutter contre les violences conjugales dont sont encore victimes de nos jours de nombreuses femmes...

#Item 44
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Il faut parfois du temps pour parler, pour accepter de mettre des mots sur un traumatisme, Natasha Trethewey mettra 30 ans pour exhumer ses souvenirs d'enfance et du drame qui y a mis fin. Ce témoignage est un vibrant hommage d'une rare intensité d'une fille à sa mère à la fois par la sobriété de l'écriture dans laquelle on sent tout l'attachement et l'admiration qu'elle a pour celle mais également les regrets de l'avoir "oubliée" pendant tant d'années. Alors elle revient sur les lieux du crime, refait le chemin en remontant le temps, arpentant son enfance imprégnée de ce que couleur de peau, son métissage faisait d'elle, la mettant en marge parce que ni blanche, ni noire, dans un Mississipi ségrégationniste qui, lui ne fait pas ni dans la demi-mesure ni dans le mélange.

"Elle savait aussi qu'en tant qu'enfant métisse - à mi chemin entre eux deux -, je serai au bout du compte seule dans ce voyage pour comprendre qui j'étais, quelle était ma place dans le monde, tout en portant les fardeaux invisibles de l'histoire, à cheval sur la métaphore. Elle savait aussi qu'on se servirait du langage pour me nommer donc tenter de me limiter - bâtarde, mulâtresse, métisse, négresse - et que, comme avec la mule, cela m'entraverait et m'éperonnerait. Ma mère voulait juste que cela ne me détruise pas.(p52)"

Natasha Trethewey se souvient de son enfance heureuse entre des parents instruits et lui faisant découvrir la culture, le rôle des métaphores, lui montrant le chemin à prendre pour s'élever au-delà de la place qu'on lui assigne par sa couleur. Elle se souvient qu'elle est trop petite pour comprendre leur séparation, se souvenant avec émotion du duo qu'elle forme avec sa mère à leur arrivée à Atlanta même si elle continuait à la pousser à exceller dans toutes les matières afin d'ensuite rien se refuser dans ses choix. Mais Gwendolyn, sa mère, fera, elle, un mauvais choix en se liant à un homme, Big Joe, qui très rapidement va se révéler loin de l'image idéal du mari et du beau-père, un manipulateur et tortionnaire qui deviendra un assassin.

A la manière d'une enquêtrice elle relèvera les indices laissés, les avertissements tus, les souvenirs, mais aussi les sentiments comme la culpabilité ressentie, de n'avoir pas agi ou de l'avoir abandonnée à cette violence qui mettra fin à son existence, son admiration pour cette femme qui avait réussit à sortir de sa condition, à s'élever mais qui devra plier face à une folie, celle d'un homme dont elle avait pourtant réussi à divorcer mais qui se retrouva seule face à lui et ses menaces malgré les signalements et avertissements à l'image de Cassandre, auprès des autorités.

"Puisque personne ne veut entre ses avertissements, peut-être se dit-elle que son silence pourra empêcher le destin de s'accomplir. Mieux vaut garder certaines choses pour elle plutôt que d'appeler la catastrophe en parlant. (p81-82)"

Elle entremêle les formes pour réussir à aller au bout de son travail de mémoire, entremêlant les transcriptions des dernières conversations de sa mère et son beau-père, ses annotations et réflexions dans son difficile d'écriture, elle emploie le "tu" quand la distance est nécessaire et que le "je" devient trop lourd, mais ne résout en rien de la douleur d'avoir su, senti, tu tous les signes annonciateurs :

"Regarde-toi. Aujourd'hui encore tu cris que tu peux prendre tes distances avec cette petite fille par l'écriture, en recourant à la deuxième personne du singulier, comme si tu n'étais pas celle à qui tout cela est arrivé. (p13)"

mais également laisse transpirer l'hommage qu'elle veut rendre à celle qui, malgré son discernement, son intelligence est "tombée" entre les mains d'un homme qui a décidé de son destin.

En quelques 200 pages l'auteure fait le portrait d'une Amérique pas si lointaine (et encore actuelle) où tout vous ramène à la couleur de peau (même au dos d'un chèque) mais également d'un fléau mondial, la violence sur les femmes dans le cadre familial en particulier, où rien, ni les signalements, ni l'éloignement, ne vous protège.

J'ai beaucoup aimé.
Lien : https://mumudanslebocage.wor..
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Natasha Trethewey est une voix qui compte outre-Atlantique dans la poésie contemporaine.

AvecMemorial Drive, récit très émouvant, elle nous plonge au coeur de ses racines dans le sud des Etats-Unis.

C'est aussi une forme de catharsis, trente-cinq ans après le meurtre de sa mère, tuée par son ex-mari.
Dans ce très beau livre autobiographique, Natasha Trethewey nous raconte son enfance de métis ayant grandi aux États-Unis dans les années 1960-1970.

Pendant sept ans, l'écrivaine va déchiffrer quantité de documents, qui vont du rapport d'autopsie à la retranscription des dernières conversations téléphoniques de sa mère avec son meurtrier

C'était la possibilité pour l'autrice d'aborder le sujet du racisme, de la difficulté pour un couple mixte de se faire accepter, de la peur du Ku Klux Klan, de la lutte pour les droits civiques des Afro-Américains, mais également de parler avec beaucoup de tendresse de sa mère, Gwen, et de sa grand-mère. Avec Memorial Drive, elle a transformé un drame inimaginable en un livre catharsistique d'une grande beauté .
Lien : http://www.baz-art.org/archi..
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Natasha Trethewey était une ado dans les années 80. Moi aussi. Et je me disais en lisant ce texte que pendant que je traînais avec mes copines, allais danser dans les sous-sols des pavillons de banlieue et fumais mes premières cigarettes, précisément à la même époque où pour tout et pour rien, légère et insouciante, je riais comme une folle, là-bas, de l'autre côté de l'Atlantique, dans le Sud des États-Unis, elle, l'autrice, tremblait de peur.
Parce qu'il ne fallait pas regarder les Blancs, parce que les crimes raciaux étaient courants et les membres du Ku Klux Klan nombreux, parce qu'elle avait vu le visage en bouillie d'Emmett Till dans un magazine...
Elle avait compris, la gamine, qu'il valait mieux baisser les yeux, rentrer rapidement chez soi le soir et se faire oublier... Elle savait qu'être le fruit d'un mariage mixte, d'une travailleuse sociale afro- américaine et d'un professeur d'université d'origine canadienne, dans un pays où vingt-et-un Etats l'interdisaient, pouvait conduire au pire.
Alors, chaque jour, pendant que je flottais dans un monde où mon seul souci était d'avoir assez d'argent pour pouvoir m'offrir la dernière paire de Kickers, de l'autre côté de l'Atlantique, une fille de mon âge que l'on surnommait « le zèbre » entendait ces mots : « une si jolie petite, dommage qu'elle soit noire. »
À la même époque… Et c'était presque hier…
Le choc…
Et d'un.
Deuxième uppercut: les parents de l'autrice se séparent. La mère, Gwendolyn Ann Turnbough, part vivre à Atlanta, se remarie avec un homme violent qui a fait le Vietnam. Il cogne, cogne encore, cogne toujours. Rien ne l'arrête. Elle s'enfuit, se cache, avertit les services sociaux, la police. Il la tuera. Et ce qui m'a bouleversée, c'est d'entendre la voix de cette mère, ses propres mots : la lettre qu'elle écrit et dans laquelle elle raconte sa terreur quotidienne, une déposition qu'elle fait auprès de la police et les deux dernières conversations téléphoniques qu'elle a eues avec celui qui deviendra son assassin.
Et c'est précisément cette voix que l'autrice a voulu faire entendre, la voix d'une femme courageuse, volontaire, sensible, épuisée et terrifiée.
Et c'est effectivement terrifiant. Vraiment.
Un chemin de croix extrêmement douloureux que ce retour de Natasha Trethewey vers sa mère : une lente exploration de la mémoire à travers des photos, des rêves, des mots, des chansons pour bâtir un mémorial où se réfugier, la retrouver et être enfin en paix avec soi-même.
Magnifique.
Lien : http://lireaulit.blogspot.fr/
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****

En juin 1985, Natasha perd sa mère. Elle est assassinée par son ex-mari, de 2 balles tirées à bout portant. C'est dire la violence qui hante cet homme. Natasha l'appelait Big Joe, car il n'était pas son père, mais son beau-père. Devenue femme, écrivain de surcroît, elle décide de mettre des mots sur cette femme qu'elle chérit toujours, sur ce manque et cette douleur profonde…

Natasha Trethewey est une auteur reconnue aux États-Unis. C'est une poète qui a reçu plusieurs prix. le récit qu'elle nous offre ici est rempli de ce talent pour les mots, cette musique de la langue et la force son univers.

Cette autobiographie est la quête que Natasha Trethewey a entrepris pour retrouver les souvenirs de sa mère.
Bien des années après sa disparition, alors qu'elle refusait de retourner sur les lieux du drame, Natasha Trethewey rencontre un officier présent le jour funeste de juin 1985. Il lui donne l'ensemble du dossier d'instruction. C'est alors que Natasha se rend compte de tout ce qu'elle a enseveli, tout ce qu'elle s'est forcé à oublier, pour survivre.

Mais c'est aussi sa mère qu'elle a effacé. L'auteur fait alors revivre sous nos yeux, son enfance, son adolescence, les bons comme les mauvais jours. Comme elle, on constate que les choses auraient pu être différentes. Que sa mère aurait pu être sauvée.

Triste histoire de violences conjugales, émouvant retour à la vie, poignants souvenirs qui émergent de l'obscurité, Natasha Trethewey porte avec courage et force le douloureux chemin du deuil. Elle nous offre avec beaucoup de justesse et de pudeur sa propre route vers l'acceptation du manque…
Lien : https://lire-et-vous.fr/2021..
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Le chemin mémoriel de l'auteure se mêle à ses souvenirs d'enfance, à sa vénération de sa mère qui meurt sous les coups de son ex-mari. Natasha Tretheway évoque le deuil, la culpabilité et le façonnement de l'identité après un tel drame, tout en peignant l'Amérique raciste des années 1950 et 1960 en toile de fond. Outre le poignante récit des jeunes années de l'écrivaine, puis de son adolescence, jusqu'au meurtre de sa mère, Memorial Drive est aussi un ouvrage qui évoque avec beaucoup de finesse les violences conjugales et la difficulté de s'extraire de leur maelstrom (plus de détails : https://pamolico.wordpress.com/2021/09/14/memorial-drive-natasha-trethewey/)
Lien : https://pamolico.wordpress.c..
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La rentrée littéraire 2021 s'illustre par plusieurs témoignages autobiographiques sur les rapports des auteurs à leurs parents. Memorial Drive est dans cette veine mais mérite particulièrement qu'on s'y attarde.

Sur la forme, il est réalisé avec une belle écriture, fluide, pleine de références, et quelques citations à retenir, ce qui n'est pas étonnant car l'autrice, Natasha Trethewey, a reçu le prix Pulitzer de poésie en 2007.

Sur le fond, plusieurs thématiques se côtoient dans ce récit cathartique.

Natasha Trethewey est née en 1966 d'un mariage entre une femme noire et un homme blanc, autorisé à l'époque dans certains Etats mais pas dans le Mississippi, où les parents de l'autrice décident pourtant de s'installer pour être proches de sa famille maternelle. le couple parental aimant, cultivé, ne résistera pas aux difficultés rencontrées. L'autrice garde cependant de son enfance une philosophie : « L'important est le pouvoir transformateur de la métaphore et des histoires que nous nous racontons sur notre vie, son sens et la trajectoire qu'elle emprunte ». La condition Afro-Américaine est très présente dans ce récit.

Memorial Drive est un hommage à la mère de l'autrice avec une dénonciation des violences conjugales infligées par son second époux, vétéran du Vietnam, qui ira jusqu'à l'assassinat de sa femme qui avait pourtant recherché une protection judiciaire et policière. La retranscription des écoutes téléphoniques et d'éléments du rapport d'enquête permet d'appréhender la crainte permanente dans laquelle vivent les femmes qui en sont victimes. Natasha Trethewey cite Orson Welles « une fin heureuse dépend du moment où l'on arrête l'histoire » : malheureusement, ici l'histoire s'arrêtera trop tard…

Natasha Trethewey analyse bien, à travers son propre vécu, le traumatisme des enfants qui doivent se construire entre l'oubli et l'obsession. « L'oubli volontaire n'est pas sans danger ; on risque de perdre plus que prévu […]. Bien sûr, nous sommes aussi faits de ce que nous avons oublié, de ce que nous avons cherché à enterrer ou à retrancher. »

Cette histoire personnelle n'aurait peut-être pas été la même sans une enfance dans le Mississippi, où « les mariages interraciaux » n'ont été permis qu'après l'arrêt de 1967 de la Cour suprême des Etats-Unis, Loving v. Virginia, une adolescence à Atlanta « qui incarnait le mieux l'émergence du Nouveau Sud » dans la lutte pour les droits civiques, et un retour dans cette ville bien plus tard pour, peut-être enfin, permettre le deuil. « Je pense souvent à cet axiome d'Héraclite sur le caractère de l'homme qui détermine son destin, axiome révisé par Ralph Ellison en « La géographie détermine le destin ».

Une lecture riche et abordable même quand on lit peu de non-fictions.
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Natasha Trethewey raconte l'histoire de sa mère, Gwendolyn assassinée trente années plus tôt alors qu'elle avait elle-même dix-neuf ans. Sa mère était directrice des ressources humaines dans l'agence du comté chargée de la santé mentale à Atlanta. Natasha est née en 1966, le jour du centième anniversaire du Confederate Memorial Day d'un père blanc qui a grandi en Nouvelle-Ecosse au Canada et est devenu officier de la marine royale canadienne et d'une mère noire. Gwendolyn a grandi avec sa mère à North Gulfport dans le Mississippi dans un hameau d'anciens esclaves, dans la maison de son arrière-grand-mère, Eugenia McGee qui a eu sept enfants mais seulement deux filles ont atteint l'âge adulte, sa propre grand-mère et la grand-tante Sugar. En 1972, après son divorce, sa mère déménage à Atlanta, travaille dans un restaurant de l'Underground, le Mine Shaft et rencontre un nouvel homme, Joel T. Grimmette.

Natasha Trethewey est une poétesse américaine. Elle évoque ici par touches successives le traumatisme de son enfance. Sa mère, éduquée, intelligente, socialement intégrée, tombe sous la coupe d'un homme pervers, violent et souffrant de troubles psychiatriques. C'est cette lente descente aux enfers dans la violence familiale avec tous ses ressorts et ses dégâts. le roman alterne les réminiscences de l'autrice, les réflexions afin de reconstruire un passé enfoui dans son inconscient, les lettres de sa mère, les transcriptions de dialogues téléphoniques entre sa mère et son beau-père, des documents administratifs produits au procès. Natasha Trethewey ne cherche pas le sensationnel, elle analyse finement les méandres de ses souvenirs pour dresser le portrait saisissant de cette mère sacrifiée. La vie quotidienne des Noirs américains y est décrite dans les détails du racisme ordinaire de cette société des années 1960.
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Trente après l'assassinat de sa mère par son mari dont elle venait de divorcer, Natasha Trethewey entreprend un travail de mémoire qu'elle n'avait pas engagé jusqu'alors, préférant se reconstruire en occultant l'évènement traumatique.
Le livre commence par une évocation de son enfance, avec ses deux parents, l'une noire et l'autre blanc, et son entourage familial essentiellement composé de femmes chaleureuses et aimantes. Nous sommes dans le Mississipi, état du sud ségrégationniste et raciste et le mariage mixte de ses parents ne résiste pas longtemps. Sa mère, en quête d'indépendance, déménage à Atlanta et rencontre celui qui va devenir son deuxième conjoint, un homme violent et manipulateur.
Ce qui est passionnant ici, c'est la façon dont l'autrice nous présente la démarche psychologique qui lui a permis de faire face à cet assassinat et à ce deuil, en clivant, compartimentant les éléments et les phases de sa vie, et qui lui permet aujourd'hui, par un effort intellectuel de conceptualisation, de distanciation et de mise en mots, de prendre appui sur cette perte pour construire sa trajectoire de poétesse et d'universitaire.
Memorial Drive est le récit époustouflant et bouleversant d'une résilience, rendue possible par l'intelligence de l'autrice. Elle précise, à plusieurs reprises, de quelle manière elle parvient, par une sorte de pensée magique, à maîtriser et à prendre mentalement le contrôle des évènements. Natasha Trethewey ne joue pas sur le registre des émotions, adoptant un style assez froid et clinique, reposant notamment sur l'utilisation de documents, rapports et transcriptions d'échanges téléphoniques glaçants entre sa mère et son bourreau.
Le livre est un hommage à ses deux parents, à son père qui lui a donné le goût des mots et surtout des métaphores, et à sa mère, vaillante et courageuse, qui l'éclaire et la guide sur le chemin de la dignité.
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Ce récit autobiographique d'une poétesse reconnue ressemble à une urgence : l'urgence d'affronter enfin ce passé qui lui colle à la peau et qu'elle cherche à fuir, d'affronter enfin cette journée où sa mère a été assassinée à 40 ans par son ex-conjoint.
Pour y parvenir, l'auteure a besoin de procéder par étapes, elle ne peut affronter seule le traumatisme du meurtre. Elle a besoin de regrouper sa famille autour d'elle et d'en passer par son enfance. Elle évoque ainsi sa grand mère, le mariage de ses parents, mariage mixte qui fait d'elle une métisse.
« Je n'avais encore jamais entendu ce mot pour me désigner – zèbre – et, alors que j'étais assise sur les marches de l'appartement de mon père, en train de démêler la métaphore, j'ai décidé de ne pas raconter à mes parents ce qui s'était passé. […] D'aussi loin que je me souvienne, mon père n'arrêtait pas de dire qu'un jour je deviendrais écrivaine, parce que, avec ce que je vivais, j'aurais quelque chose d'important à dire. Je crois que cet épisode marque ma première prise de conscience partielle de ce qu'il entendait par là. »

Convoquer son père écrivain lui permet également de s'autoriser l'écriture du livre, avec l'idée sous-jacente qu'on devient forcément écrivain lorsque l'on souffre. Comme un permis d'écrire dont elle aurait besoin ! Tant est douloureux ce processus de mémoire.

Ce qui ronge plus encore Natasha Trethewey, c'est le sentiment de culpabilité, l'impression qu'elle aurait pu sauver cette mère si lumineuse.
« Je ne peux m'empêcher de me demander si mon silence ne lui a pas coûté la vie. »
Silence face au harcèlement de son beau père, silence face à la violence conjugale, silence par lequel elle voulait protéger sa mère.
La dernière phase du récit est la plus douloureuse : elle doit affronter les archives de l'enquête et du procès, retrouver des lieux chargés d'histoire. Et tenter de donner un sens à ce drame.
Celui qu'elle s'accordera, c'est celui de l'écriture, de sa vocation qui fait contrepoids à la mort de sa mère.
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