Les défis de ce roman sont nombreux et à travers la difficile intégration des afro-américains en 1966 dans les Etats du Sud des Etats-Unis,
Natasha Trethewey nous raconte la courte vie de sa mère, Gwen, qui tenta d'abord un mariage mixte, dont elle est issue, puis épousa Big Joe, son futur meurtrier.
Le premier défi est de permettre à « Tasha » de dépasser sa culpabilité face à l'assassinat de sa mère. Car, même 30 ans après, revoyant en boucle Gwen la sauver de la noyade lorsqu'elle était enfant, elle ne cesse de se reprocher son incapacité à la protéger.
Le second défi est de révéler la torture mentale, au-delà du martyre physique, que subissent les femmes battues. Et quoi de mieux que d'écouter parler Big Joe, au travers des transcriptions de ses appels téléphoniques à Gwen, pour comprendre la folie et la brutalité verbale de ce mari violent mais également l'enfermement et la souffrance de sa femme.
Memorial Drive est un cri qui, s'il n'apporte pas de réponse à l'inconcevable, offre je l'espère à l'auteure, une certaine paix intérieure et une réconciliation avec elle-même.
Un roman choc qui est autant un témoignage qu'une prise de conscience et que j'ai achevé avec beaucoup de révolte mais forte de l'éclairage stupéfiant de cette spirale de la violence.
Et la question qui subsiste dans mon esprit en refermant ces pages est « Que reste-t-il du Rêve américain, lorsqu'une femme noire, cultivée et mère d'une enfant métisse, finit par mourir, tuée par son conjoint, à l'ombre du Mémorial des Etats confédérés et de la suprématie blanche ? ».
Un symbole, un combat, un récit essentiel.