Citations sur Nous sommes l'étincelle (93)
Révolution : tour complet sur soi-même pour revenir au point de départ, et rebâtir le statu quo ante, sur d'autres bases peut-être, avec d'autres vainqueurs, d'autres injustices, d'autres lésés pour compte, mais pour finir toujours au même endroit.
La violence, cette sauvagerie désespérante, cet appétit de prendre qui caractérisait son espèce, parmi toutes les autres, le torrent de boues, de merde, de sang et de techniques dans lequel ils pataugeaient n'étaient pas l'ensemble du tableau ; d'autres choses les contrebalançaient : la fraternité, jusqu'à l'absurde, le sens de l'injustice, le goût des autres. L'amour de la Beauté.
"La nuit est bleue. Elle marche le nez en l'air. La forêt exhale encore la chaleur du jour - des parfums de sève et d'humus et de bois… Ce souvenir de la Beauté, c'est encore la beauté même."
Le temps qui passe, panse, émate, suture, endurcit le pourtour des plaies comme une corne.
Ils se méfient des grands mots, "chaos", "révolution", "communisme", mots usés par les échecs. Ils savent qu'on va dans le mur et qu'on finira par perdre, et que ceux qui perdent le plus, dans ce cas, ce sont toujours les pauvres.
Quand les tensions entre générations deviennent trop fortes, des groupes d’adolescents choisissent de rompre définitivement. Mais créer une société alternative est-il possible ? C’était il y a longtemps. Avant qu’on interdise la Forêt, avant les braconniers, les cannibales, les commandos… En 2025. Antigone et Xavier, puis Paul, Jay, La Houle avaient vingt ans. Ils sont partis dans la Forêt. Ils ont cru à ce rêve, à cette révolution. Comme des milliers d’autres. Et maintenant, trente-six ans plus tard, parmi les arbres, il en reste seulement quelques-uns. Des survivants.Presque des enfants.
Elle a les yeux clairs,
les yeux gris comme ceux de sa grand-mère;
comme les galets sur le lit, au fond de la rivière, que frôlent des truites vives aux ouïes affolées;
comme le plomb fondu dans le creuset, la colère;
comme le ciel juste après l'orage, quand il se lave de la pluie et que le sol fume.
Elle lui a raconté ce souvenir qui demeurait en elle, quatorze ans après, d'avoir été du gibier ce soir là pour deux garçons ; et un appât pour un flic. De la viande, dans les deux cas. Un trophée.
- Si tu traites une fille comme ça, tu l'avilis, Daniel. Et tu t'avilis toi.
- Partout, toujours, il s'est toujours trouvé des hommes pour le faire... Veille sur tes soeurs. Garde un oeil sur elles.
- Mais tu dois être avec elles comme j'essaye de l'être : distante, lointaine, protectrice sans entraver leur parfaite liberté. Leur liberté doit devenir pour toi une assignation secrète et une ascèse. Ton père l'a appris. C'est possible tu sais. C'est pour cela que je te raconte tout ça.
Je croyais que ça durerait toujours, tu sais... Avec ton père... Qu'il serait toujours là. Que nous rendrions notre dernier souffle à la même seconde, exactement. Sans jamais se laisser l'un sans l'autre. Je l'espérais tellement que j'avais fini par le croire... p. 506
Un jour, le colosse lui a dit :
— Tu vois, j’aimerais être comme eux… Les gens disent que je suis fort comme un chêne, mais moi, j’aimerais être un bouleau, un arbre qui brille dans le noir.
Ç’a été la seule fois où son ami lui a confié son âme. Le reste, il a toujours fallu le deviner…