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Dès la dédicace, Jesmyn Ward donne le ton : " À Joshua Adam Dedeaux, qui ouvre la voie et je le suis".
Sous forme d'une chronique familiale ponctuée par cinq chapitres avec un prénom et deux dates. Les moissons funèbres ce sont cinq jeunes gens fauchés dans la fleur de l'âge ; des amis, des cousins et le frère de Jesmyn Ward, ils se sont élevés ensemble car les liens sont très fort dans sa communauté.
Tout au long du roman , nous découvrons l'histoire de sa famille, de sa fratrie elles sont trois filles et un garçon. Joshua est le petit frère de Jesmyn, elle nous fait partager son amour et son admiration pour lui jusqu'à la fin.
Bien que cela se passe dans le Mississippi, c'est bien plus que la vie d'une famille noire, c'est avant tout celle de ses familles pauvres de tout les pays. La misère est la même partout entraînant des suicides, de la violence, de l'alcoolisme, des drogués. La société en fait des exclus, des quantités négligeables, pas de main tendue. Rejetés dès la scolarité, ils deviennent ce que la société fait et attend d'eux.
Jesmyn Ward n'enjolive rien; C'est très sombre mais la beauté vient de cet amour sans fin et du chagrin d'une soeur à la mort de son frère car les fratries sont là pour survivre aux parents et se souvenir de leur enfance. Pour l'autrice et sa famille, une partie de leur vie s'est arrêtée le 2 octobre 2000, à la mort de Joshua à 19 ans.
Jesmyn Ward met des mots là où beaucoup d'entre nous, restons sans voix, elle exprime aussi son indignation quant à la mort de son frère, lors d'une collision avec un chauffeur blanc alcoolique qui n'a fait que très peu de prison prouvant encore une fois qu'il y a deux poids, deux mesures.
Un roman magnifique où l'on ne peut que partager l'émotion, la stupeur où les interrogations de jesmyn Ward. C'est le troisième roman et à chaque fois, il se trouve toujours un personnage ou une situation, qui me correspond ou me rappelle un proche. Ce qu'elle raconte est universel et c'est pour ça qu'elle me touche autant.
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«  Notre chagrin, ajouté aux autres fardeaux de nos existences , aux autres pertes , nous enfonce peu à peu dans le sol et un jour nous nous retrouvons ensevelis dans une tombe de sable rouge.
Finalement nos vies sont nos morts...Instinctivement, C. J .le savait .Les mots me manquent . »
Un extrait significatif de ce «  récit du souvenir » autobiographique , une chronique familiale, qui répond à de nombreuses questions sur l'Amérique d'aujourd'hui, celle de la population rurale du sud des Etats- Unis, notamment à DeLisle , au Mississipi .

Jesmyn est née en 1977 , aînée d'une famille nombreuse.
Elle conte sa jeunesse difficile des années 80 aux années 2000 ,parmi les familles afro - américaines cernées par la pauvreté ,la violence et le racisme.

Le père, volage, dresse des chiens de combat , s'achète une moto , choix peu judicieux , joue avec ses enfants, épris depuis toujours de la promesse d'un ailleurs qu'il n'atteindra jamais ...
Indolent, il a un côté sombre, la violence l'anime il aime la beauté élémentaire du combat , apprend à son pitbull pure race , à se battre avec des chambres à air .
Il trompe allègrement son épouse ( une succession de filles qu'il aimait et trompait les unes après les autres) lui redit son dévouement ,plaide non coupable. Elle finira par s'en séparer. ..

L'auteure rend un hommage appuyé à sa mère, femme laborieuse,qui portera à bout de bras ses quatre enfants ,travaillera dur comme femme de ménage chez des blancs aisés durant des années, sacrifice permanent exigé des femmes rurales, noires et démunies dans le Sud des Etats - Unis.

Avec un désespoir croissant, une douleur infinie elle enterrera ses rêves , convaincue de leur futilité ....

Témoignage d'amour émouvant pour son frère Joshua et pour ses amis disparus très jeunes : suicide , accident, règlement de comptes ,ravages de la drogue, délinquance, désespérance , cet ouvrage analyse comment pour oublier la misère , la grande pauvreté, les inégalités sociales dans une course effrénée à l'auto - destruction, tous ces jeunes boivent et fument énormément ,l'alcool est un VRAI FLÉAU : le récit est rythmé par les morts violentes d'hommes proches de l'auteure .

On cherche à oublier la misère en brûlant la chandelle par les deux bouts, en roulant vite, en se shootant, sans travail ni perpective ...

Certains chapitres titrent les noms et dates de naissance des disparus , entrecoupés par les temps de l'adolescence de Jesmyn,ses soeurs et son frère .
«  Le désespoir se trouvait à la source de nos addictions » ..
«  Une lutte contre le vide, le silence, le chagrin, le regret , la perte » ...
Ce livre est un acte d'accusation engagé , travaillé, une réflexion émouvante , prenante , pessimiste contre le Sud des U.S ,gangrené par le racisme et une société américaine impitoyable envers les pauvres.
Un livre fort , bien écrit, qui s'inscrit dans la lignée de la grande Toni-Morrison .
Un ouvrage qui reste dans les mémoires ....
Les moissons .....funèbres... ....
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Grande méprise et grande déception que sont pour moi ces Moissons funèbres.

Derrière ce titre mélancolique et un brin poétique, la quatrième de couverture nous promettait de nous parler de "cinq jeunes hommes noirs avec lesquels Jesmyn Ward a grandi [sont] morts dans des circonstances violentes." J'en ai déduit - à tort - que ce livre aborderait le racisme contemporain aux États-Unis (ce que je trouvais intéressant afin d'observer l'évolution réelle (et non officielle) de la conditions des Noirs-Américains depuis l'instauration des droits civiques).

Les médias (JT, films, séries,...) nous font en effet l'écho d'un racisme persistant ayant adopté d'autres formes (notamment, les "bavures" policières régulières) et la résurgence (ou persistance ?) de théories nauséabondes telles celles des Sudistes, ces Blancs de la frange américaine qui boivent leur bière, débraillés sur leur chaise à bascule, avec le drapeau confédéré sur le devant leur maison, une arme à portée de main et qui votent - au hasard - pour des lascars comme Trump).

Mais en fait, l'auteure, au talent littéraire discutable, traite plutôt d'anecdotes qui m'ont paru anodines et souvent ennuyeuses à deux-trois exceptions près, de son enfance et de son adolescence avec ses cousins, amis et frère qui trouveront la mort (une mort prématurée et violente certes), oui, mais sans lien avec les analyses qu'elle en tire. Qu'il s'agisse d'overdose, d'accidents de voiture ou de suicide, j'ai un peu de mal à cerner le lien judicieux avec le racisme au Mississippi début du 21ème siècle... J'y vois plutôt un lien avec la paupérisation de certains états, dont le Mississippi qui compte certes un pourcentage non négligeable de Noirs-Américains. Et de ce statut socio-économique précaire, l'auteure nous parle de l'errance, de l'oisiveté, de la misère sociale où le crack (la cocaïne du pauvre, moins chère et qui rend plus vite accro) se fume et se deale pour se faire de l'argent facile, de l'alcool et de l'herbe pour se distraire du désespoir d'atteindre un avenir meilleur, tout en adoptant un fatalisme résigné qui les pousse à l'inertie et à la vacuité.

L'auteure a tendance à différencier les chances de réussite des hommes et des femmes pourtant logés à la même enseigne, alors que sa mère a trimé toute sa vie pour nourrir ses quatre enfants et qu'elle-même a été à l'université, preuve s'il en est qu'en voulant s'en sortir elles y sont arrivées.
Tandis qu'à l'image de son père : un homme absent, volage, violent, immature, oisif et autre qualités
et son frère - décédé donc, je lui concède de lui trouver des excuses car le souvenir d'un être cher l'auréole toujours de compréhension tolérante - qui poursuivait la même mauvaise pente que son père
la vie, l'avenir étaient plus difficiles...

Cette victimisation, de manière générale, de la part de l'auteure et l'analyse ratée à mon sens qu'elle tire des éléments de sa vie et de celle de son entourage m'ont agacée. Je pense que Jesmyn Ward s'est trompée de sujet. Elle voulait - je pense - faire un livre souvenir, rendre hommage à la mémoire de ses amis, cousins et surtout son frère et aurait dû s'en tenir là. Les statistiques qu'elle donne en fin de livre comme pour légitimer son propos tombe à côté selon moi et ne viennent rien étayer de ce qu'elle écrit.

Ne vous méprenez pas, je suis bien consciente qu'une injustice subsiste à l'égard des Noirs-Américains et c'était même pour moi tout l'intérêt du livre (du moins de ce que j'en avais imaginé), mais ce n'est pas ce que vous y trouverez, puisqu'il se "limite" (ce qui peut être très bien en soi) à un récit biographique mais qui personnellement ne m'a pas touchée.

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A quarante ans, après deux romans publiés et une notoriété installée, Jesmyn Ward trouve enfin le courage d'écrire sur les années noires des années noires, où elle perdu en quatre ans son frère puis trois de ses amis, tous victimes, de près ou de loin, de la situation précaire dans laquelle vivent les Noirs dans le Sud des Etats-Unis.
Ce roman autobiographique est l'occasion pour elle de revenir sur son passé et celui de sa famille ainsi que de décortiquer les raisons possibles de ces morts violentes.
En quelques mots, le paysage inquiétant de Delisle, Mississippi se dessine, quelques maisons sur pilotis sur des terrains défrichés entourés de forêts, les routes longues et étroites où le ciel apparaît entre les cimes des pins, les jeunes Noirs désoeuvrés, buvant des bières autour d'une vieille voiture cabossée, riant, écoutant de la musique, écoutant les bruits de la nuit, les criquets, le silence alentour, et plus loin, les manoirs des Blancs au bord des falaises et perdus dans le bayou.
Jesmyn grandit dans une famille de quatre enfants, Josh est son cadet de deux ans. A l'adolescence, il part vivre avec son père, elle reste chez sa mère qui a la chance de pouvoir la mettre dans une école privée où elle sera la seule Noire, tandis que son frère, moins doué, apprend à devenir un homme au coeur de la Nouvelle-Orléans. Tous ces garçons que Jesmyn a connu enfants, souriants, joyeux, beaux, découvrent vite qu'il n'y a pas d'avenir pour eux. Pilote, astronaute, médecin, pompier... impossible. Dans ce sud où les fantômes du Klu Klux Klan circulent encore dans les familles blanches, les jeunes filles noires apprennent l'amertume et les garçons la frustration de leurs situations. Leurs parents ont connu le crack et la coke, aujourd'hui c'est les enfants qui en vendent car quoi faire d'autre.
Cette vie que Jesmyn esquisse et qui est la sienne et celle de son entourage, on en comprend la valeur universelle par les chiffres qu'elle énonce en fin de roman.
Elle a su, par son écriture sincère, nous plonger au coeur de cette Amérique que l'on ne voit souvent que de loin ou fictionnalisé. C'est un vrai roman coup de poing, révoltant bien sûr, et je pense qu'il a fallu un énorme courage à Jesmyn Ward pour finir par l'écrire.
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Ce livre n'est pas un roman, mais un essai basé sur l'expérience personnelle de l'auteure, où elle tente d'analyser pourquoi et comment les jeunes hommes noirs sont, plus souvent que d'autres jeunes américains, amenés à trouver la mort dans des circonstances dramatiques. Drogue, violence, accident, suicide… ce sont les causes qui ont successivement causé la mort de cinq jeunes hommes de son entourage en quelques années, parmi lesquels son frère Joshua.
Au début des années 2000, Jesmyn Ward était étudiante, la seule de sa famille à réussir à poursuivre des études supérieures, mais se sentait mal loin de sa famille, et éprouvait le besoin de revenir régulièrement dans sa petite ville du Mississippi. C'est à cette époque que l'un de ses frères, Joshua, trouve la mort. Comme une cascade d'événements dramatiques, d'autres jeunes, amis de la famille ou voisins, Roger, Demond, CJ et Ronald, décèdent tragiquement dans les années qui suivent.
Jesmyn Ward, par une construction habile, raconte l'histoire de sa famille, de sa prime enfance et de sa jeunesse, et alterne avec l'histoire plus particulière de ces jeunes hommes et de ce qui les a conduit vers leur fin, et là, son récit procède d'une chronologie inversée, pour terminer avec le décès qui l'a le plus touchée, celui de son frère.
J'ai dévoré ce récit, sans doute cathartique pour l'auteure, mais où pourtant l'écriture, la recherche de la phrase et du mot justes ont leur importance. Après, on peut adhérer ou non aux explications qu'elle trouve à ces destins dramatiques, et aux difficultés qu'elle pointe, qui font que les jeunes afro-américains défavorisés, souvent issus de familles monoparentales, sont plus souvent qu'à leur tour touchés par le chômage, ou détournés du droit chemin pour finir par dealer ou consommer, et pour avoir des comportements à risque. Ce qui pourtant n'est pas le cas de tous les jeunes dont elle parle. Elle leur rend en tout cas un hommage très touchant, et restitue les moments qu'elle a partagé avec eux avec honnêteté et sensibilité.
Je lirai très volontiers un de ses romans maintenant que je connais mieux son écriture. Son plus récent va paraître la semaine prochaine chez Belfond sous le titre le chant des revenants, et il semble précédé d'une belle réputation.

Lien : https://lettresexpres.wordpr..
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Les Moissons Funèbres de JESMYN WARD
Récit autobiographique, l'auteure revient plus particulièrement sur la période 2000/2004 qui l'a vue perdre successivement son frère en octobre 2000, Ronald en décembre 2002, CJ en janvier 2004, Demond en février et Roger en juin 2004.
Elle est née à Oakland et sa mère portait Joshua dans son ventre quand la famille se transporta à DeLisle, Mississippi. Viendra encore Nerissa, puis Charine la petite dernière, peut-être sa mère pensait qu'avec une grande progéniture son mari serait plus fidèle. En vain, il ne fut jamais et leur séparation était inéluctable. Cette année là le pitbull de son père avait failli la tuer, il abattit le chien.
Roger était mort d'un infarctus, coke et cachets de Lortab, un puissant antidouleur, c'est sa soeur Rhea qui l'a trouvé deux jours après sa disparition, il était chez lui, derrière la porte. « Ils ont tué mon frère «  dira Tasha, ils??
Demond était né à DeLisle, il avait la particularité d'être fils unique au sein d'une communauté riche de grandes fratries. Cet été là elle passe beaucoup de temps avec lui, elle écrit déjà sur les gens sui l'entourent, un soir ils vont dans une boîte, discothèque que l'ouragan Katrina balayera plus tard. Il y a Nerissa ainsi que Rob qui les accompagnent. La boîte s'appelle Illusions! Ils en sortent ivres, font une photo de groupe. le 26 février 2004, Desmond qui travaillait de nuit est abattu dans son jardin, sa compagne n'a rien entendu. Il devait témoigner dans une affaire de drogue, de deal, un rapport ?
Jesmyn Ward égrène ses souvenirs familiaux au milieu des événements dramatiques qui secouent sa communauté, le déménagement chez la grand mère, l'arrivée de la moto du père, la prise de conscience de la difficulté d'être des femmes, les divorces qui laissaient les femmes élever seules la tribu tandis que les hommes recréaient des familles ailleurs. Et bien évidemment le racisme, omniprésent dès l'enfance, on est dans le Mississippi…
Entre les décès dans la famille et chez les amis, entre des soirées alcoolisées et des consommations de drogues diverses et variées, Jesmyn Ward raconte son parcours, son ascension sociale, comment elle a pu s'extraire de cette pauvreté, de ce racisme et de cette absence de père qui essaime des enfants un peu partout sans s'occuper d'aucun. Édifiant.
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Un récit autobiographique poignant et certainement nécessaire à l'auteure pour avancer. Elle au moins a réussi à se tracer un parcours, à s'extraire de sa région et la fatalité de l'échec qui l'accompagne, grâce à ses études et à la littérature. Grâce à un petit coup de pouce, une rencontre qui laisse percer un peu d'espoir sur la capacité de l'homme à assumer les différences et à vivre en paix avec une multitude de communautés.
Elle s'en est sortie mais elle ne se sent chez elle nulle part. Elle porte en elle les malheurs qui ont frappé sa communauté, comme si elle était l'héritière de toute l'histoire tragique du peuple noir. Cela se passe dans le sud du Mississipi. Une famille bancale, pauvre. Une mère qui assume, un père qui déserte. Peu de perspectives. L'auteure compose son récit à partir de flashs backs qui sont autant de souvenirs de moments de vie liés à cinq hommes qu'elle a côtoyés dans son enfance et son adolescence et qui ont rapidement trouvé la mort pour des raisons diverses. Parmi eux, il y avait son petit frère, unique garçon d'une fratrie de cinq membres, à la fois petit frère à protéger et élément protecteur de la fratrie.
A travers ces moments et ces remontées dans le temps, c'est toute la vie d'une communauté noire dans le sud du Mississipi qui se dessine sous les yeux du lecteur. Sur fond de drogue, d'alcool, de misère et de séquelles de la ségrégation, l'histoire qu'un pays entier n'a toujours pas digéré.
Un récit teinté d'une immense tristesse qui laisse peu de place à l'espoir.
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Le livre tire son nom d'une citation de la militante noire du 19è siècle Harriet Tubman : "Quand nous sommes allés ramasser les récoltes, ce sont des hommes morts que nous avons trouvés."
Jesmyn Ward a écrit ce texte en mémoire de son frère Joshua, mort à 19 ans, un élément dans l'interminable liste des garçons afro-américains morts jeunes.
Commençons par la fin : dans le dernier chapitre, "Ici et maintenant", elle donne des chiffres : indubitables, implacables. "La pauvreté, le manque d'éducation et la faible couverture sociale sont responsables d'autant de morts que les infarctus, les attaques cérébrales et le cancer du poumon aux États-Unis." Et notamment parmi la population noire du Sud, à laquelle appartient Jesmyn Ward.
Ce livre autobiographique remonte aux racines de la tragédie sociale. En racontant l'histoire de sa famille et sa propre enfance dans une société raciste, elle explique les mécanismes de cette haine de soi qui mène aux conduites à risques, aux addictions et aux suicides.
Les chapitres chronologiques sont entrecoupés par le récit des décès de jeunes hommes dans son propre entourage : trois de ses amis et un cousin, pour terminer par la mort de son unique frère.
Ce récit est empli de larmes. Elles coulent du livre, littéralement - mais sans pathos, ni auto-apitoiement. La question : Pourquoi ? est le coeur de l'histoire, mais Jesmyn Ward y donne de vraies réponses.
Traduction parfaitement fluide de Frédérique Pressmann.
LC thématique de janvier 2022 : ''États-Unis et Canada”
Challenge ABC
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Un magnifique récit autobiographique qui dépasse largement le cadre de la jeunesse de l'auteure pour soulever les questions existentielles que se posent les jeunes afro-américains dans l'Amérique de la deuxième moitié du XXème siècle.
Deux fils d'histoire se déroulent en parallèle ; l'un raconte la vie de la communauté noire, à de Lisle et Pass Christian, dans l'état du Mississippi, dans «un monde de femmes laborieuses et de pères absents», où le chômage et la pauvreté sont endémiques. L'autre fil remonte le temps en retraçant la vie jusqu'à leur mort de cinq jeunes hommes dont l'auteure a partagé la jeunesse et qui résonnent encore dans les rues de ces petites villes rurales.
Jesmyn WARD nous livre cet essai avec une violence et une sensibilité qui émeut au plus haut point et je vais avoir du mal à dépasser le désarroi que m'en a procuré sa lecture.
Et, au-delà du choc d'une telle d'injustice sociale et de l'incommensurable désespoir des jeunes qui pèse sur leurs vies « comme un grand voile noir », je garde cette phrase en mémoire pour tenter de croire à un avenir meilleur « Nous survivrons ; nous sommes des sauvages ».
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L'histoire se situe en grande partie à DeLisle, dans le sud du Mississipi et nous fait entrer dans la communauté noire, où la pauvreté et le racisme font partie du quotidien. L'auteur y raconte une double histoire, en alternance.
Tout d'abord, c'est l'histoire de sa propre famille. Il lui faudra remonter à ses origines pour mieux comprendre la force qui anime les femmes de sa famille et nous conter de belles histoires de passion, de courage, de maternité et de travail...Mais aussi des histoires d'hommes faibles qui désertent, se font plaisir, n'assument pas leurs enfants et se font servir...
Et de belles et touchantes histoires d'enfance, avec les jeux dans la forêt, les courses pieds nus en été, les taquineries...mais aussi parfois la tristesse lorsque les parents se séparent.
Le lecteur découvre aussi ses histoires d'adolescente, les difficultés scolaires, les remarques racistes, les garçons qui ne la respectent pas.

Ensuite, entre deux chapitres où elle nous raconte sa vie de famille, elle nous conte la disparition de cinq jeunes parmi ses proches qui vont mourir subitement en pleine jeunesse. Quatre années terribles où la mort rôde autour de la petite communauté : overdose, suicide, accidents de voiture causés par des tiers, mais aussi règlement de compte ou décès par balle.
Parmi eux, son petit frère...

Mais au-delà des souvenirs et des drames familiaux, c'est de son pays dévasté par les cyclones, par la pauvreté, la drogue et l'alcool_qui font des ravages non seulement parmi les jeunes mais aussi parmi les adultes_ qu'elle nous parle, comme s'il y avait urgence de faire tout pour le sauver, pour redonner de l'espoir aux jeunes, pour empêcher les mères de se tuer à la tâche pour des emplois minables et aux pères d'être exploités comme les anciens esclaves l'étaient...
C'est un récit très vivant et réaliste sur le déterminisme social et ses ravages, un récit sincère, parfois cru et dérangeant, sans concession, qui nous explique les difficultés d'être une jeune femme noire, en Amérique au XXIème siècle, quand on est issu d'un milieu pauvre et modeste et qu'on ne peut se défaire du poids du racisme et des inégalités sociales qui touchent les habitants de cette région...
Lien : http://www.bulledemanou.com/..
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