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Citations sur Missa sine nomine (47)

Il viendra un jour où les hommes découvriront tout d'un coup qu'il leur manque quelque chose et que cela se trouve derrière eux et non point en avant.
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Le mince rais de lumière que la lune, sur son déclin, jetait par la petite fenêtre devint plus long et plus pâle. Il parcourut lentement le sol en terre battue puis atteignit le pied de la couche improvisée auprès de l'âtre. Là, il s'évanouit. Les deux frères restèrent les yeux tournés dans cette direction, même lorsqu'il n'y eut plus rien à voir, que la nuit de cette pièce plongée dans les ténèbres. Le silence était aussi grand que devant un mort gisant.
Erasme fut le premier à n'y plus tenir.
-- Tu ne dors pas, frère ? demanda-t-il.
-- Non, répondit Amédée, tout bas.
Leurs deux voix avaient, elles aussi, quelque chose d'irréel, dans l'obscurité de cette pièce, où aucun cœur ne semblait battre. Elles paraissaient sortir des profondeurs de cette terre, qui étalait son silence autour de la maison. C'étaient des voix comme on en entend la nuit, au-dessus des marais, des voix d'enlisés. Le voyageur attardé s'arrête alors pour prêter l'oreille, frissonnant sous la traînée de brouillard qui caresse le front.
p 35 édition Calmann Lévy septembre 1991
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Et ce soir même, il avait saisi son archet, il avait joué, alors qu'un an plus tôt, il s' était contenté de refuser d'un geste.Et à présent, il était assis devant sa cheminée, les cheveux de cette fille reposaient sur ses genoux et, quand il les regardait , ses yeux ne les transperçaient plus, comme un simple miroir , ils les pénétraient jusqu'au coeur , et semblaient leur dire: 《 Soyez gais aussi longtemps qu'il nous est encore donné de l'être.》
Ses frères avaient ce qu'ils n'avaient pas encore possédé l'année précédente, un château ou un domaine, et une épouse qui attendait un enfant.Mais lui ne possédait rien de plus que cette chambrette, sous ce toit de roseaux le pain qu'il rompait, l'âtre qui le chauffait.Il possédait moins qu'eux , mais ii, était satisfait.Il voulait rester parmi eux et ne songeait plus à les quitter.Il était leur maître, comme il l'avait toujours été. Si l'un d'entre eux devait tendre la main pour implorer une aide ou un réconfort, c'était vers lui qu'il la tendrait.Il etait unphare dans leur ténèbres.
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C'était donc de ce pas qu'on allait, quand la mort vous avait touché entre les deux épaules. D'un pas léger, comme si l'on avait des ailes, mais , sous terre, quelque chose accompagnait vos pas et ce n'était ni léger ni ailé:c'était noir et pesant, comme le suc du pavot.
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Les hommes voulaient toujours quelque chose, ils ne cessaient de tendre la main vers le corps ou vers le coeur. Les herbes et les oiseaux ne voulaient rien de lui. Ils restaient dans leur univers. Il pouvait le traverser, comme on traverse l'eau. Cette eau se refermait derrière lui et ne gardait aucune trace. Et c'est ainsi, sans laisser de trace qu'il voulait désormais s'en aller sur la terre.
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– Aussi longtemps qu’on parle avec son cœur, comme le baron Amédée, répliqua Wittkopp, on n’a pas besoin d’avoir peur. Mais quand on parle avec son temps, c’est différent. Car on n’est plus soi-même. Et on est dépassé à chaque instant par ceux qui courent plus vite.
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....
--Je les ai vus, murmura Amédée au bout d'un moment.C'etait une grande détresse que la leur, Jacob.
--Que signifie grand, que signifie petit, Monsieur le Comte? Il ne faut pas s' examiner avec un verre grossissant, Monsieur le Comte, il faut s' examiner avec une lunette comme en ont les soldats, en la tenant à l'envers, de manière à se voir aussi petit que si l'on était là-bas, derrière le marais, et tel que leDieu de justice nous voit, aussi petit que ça, Monsieur le Comte. ...
Et il ramassa par terre un brin d'herbe sèche , l'émietta entre ses ongles, en posa le fragment le plus petit sur sa main et souffla dessus comme sur un grain de poussière.
--Monsieur le Comte ne doit pas tant penser à lui, dit Jacob en se levant.Ni croire qu'il doit porter le poids des morts sur ses épaules; le Dieu de justice est là pour porter le poids des morts, et il n'a pas invité M.le Comte, ni moi, à l'aider.
Il soulève sa calotte et s' incline.
--Monsieur le Comte m'excusera, Dit-il poliment, de lui parler comme à un égal.
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de cette racine des ténèbres , il poussait un grain d'or . le grain qui devenait pain , le pain qui assurait le lendemain . le lendemain c'était la durée , c'était l'éternité .
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Et dans des époques comme celle-ci, un pasteur ne doit pas trôner au-dessus de ses ouailles, dans une chaire surélevée et toute sculptée, il doit rester au milieu d'elles. Il doit être le plus pauvre, comprenez-vous, Monsieur le Baron ? Le plus pauvre de tous. (...) Il faut qu'il marche nu-pieds, s'il veut qu'on croie que le Christ allait pieds nus. Il faut qu'il passe pour un fou, s'il veut qu'on croie à la sagesse proclamée il y a deux mille ans. Autrement, il échouera, Monsieur le Baron, il échouera. Même si son église est pleine.
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...Amédée se leva en souriant et posa des partitions sur le pupitre.
--Cela me ferait plaisir , dit-il , de jouer avec vous 《l'ultime》.
Ses frères le regardèrent , puis ils obéirent. Ils se rappelaient tous deux ce que l'《 ultime》 désignait dans leur langage.Il y avait plus de dix ans qu'ils ne l'avaient joué.
L'《 ultime》 était le larghetto du dernier concerto pour piano écrit par Mozart. Amédée l'avait transposé pour leurs instruments. Ce n'était qu'un moyen de fortune , mais il lui avait semblé que ce qui était immortel restait immortel, même si on ne le jouait que sur une feuille de tilleul.
A ses yeux c'était la suprême réussite d'un homme que le doigt de Dieu avait touché. Ou d'un homme qui essaie de parler tout bas avec son Dieu.Cela ne pouvait s' écrire que lorsqu'on croyait voir pour la dernière fois le soleil couchant, sous les premières ombres des dernières ténèbres, mais il fallait que la rougeur du soir fût plus forte que l'ombre.
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