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3,2

sur 782 notes

Critiques filtrées sur 5 étoiles  
En réunissant un assistant parlementaire et une hacktiviste, des trentenaire incarnant deux visions du monde, officielle pour lui et souterraine pour elle, ce roman s'enracine très fortement dans l'actualité sociale du début de ce XXIe siècle. Il fait le portrait de personnages imparfaits mais attachants dans leurs failles. Déprime pour l'un, paranoïa pour l'autre. Leurs parcours évoquent avec une lucidité teintée de tendresse les difficultés et limites de l'engagement, qu'il soit personnel ou politique (au sens large). Derrière ces portraits se dessine celui d'une société à la dérive qui n'a plus l'air de maîtriser grand chose, et tout particulièrement l'ingérence tentaculaire du virtuel dans le réel.
Suscitant à la fois curiosité et inquiétude, le roman nous rappelle que dans notre monde de plus en plus connecté, la technologie numérique est un outil puissant qui peut être utilisé pour le meilleur comme pour le pire. Face à cette réalité largement explorée tout au long du roman, il est effectivement assez inquiétant de réaliser que les tentacules de l'empire souterrain peuvent se glisser jusque dans l'ordinateur de tout à chacun. Inquiétant d'envisager sa propre machine comme un danger potentiel, l'éventuel maillon d'un réseau de machines zombies utilisées à des fins malveillantes. Mais tout le monde n'a pas le temps, l'envie, le besoin, la capacité de « bricoler les profondeurs d'Internet au lieu de se satisfaire d'une navigation en surface ».

Informatique et politique, un cocktail à priori peu attrayant à mes yeux de lectrice pas spécialement passionnée par ces deux univers plutôt opaques. Je m'y suis plongée à reculons, avec la conviction que je n'y comprendrai pas grand chose. Contre toute attente, en grande magicienne du verbe Alice Zeniter a réussi sans difficultés à vaincre mes réticences pour me prendre rapidement dans sa toile. J'ai trouvé son texte captivant car très vivant, accessible même quand elle sonde les abysses d'internet, celles du Dark Web. C'est parfois un peu complexe pour le néophyte mais il est passionnant de voyager à la découverte de ce monde obscur. Et contrairement à ce que je craignais, le volet concernant la politique passe bien malgré son côté un peu ennuyeux. Il ne représente qu'une part mineure de l'histoire, la plus large étant consacrée à la partie souterraine. Les petites touches d'humour égaient heureusement l'atmosphère générale de ce roman qui n'a rien de très joyeux. En somme, une excellente surprise sur toute la longueur !
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Sur un sujet très contemporain et peu abordé dans un roman, à savoir l'engagement politique dans un monde qui semble avoir touché le fond du désenchantement Alice Zeniter nous livre un ouvrage très intéressant, fort bien construit et dans un style, une langue, une manière de rendre les ambiances, les personnes, leurs psychés, leurs raisonnements et leurs liens imposés , fortuits , désirés , fantasmé, d'une manière que je qualifie sans hésitation d'excellente par sa clarté, son originalité, et son pouvoir de transmission par l'intelligence et l'émotion au lecteur.
Ici, c'est le flou, le doute, les ambiguïtés d'une époque et d'une génération, celle de l'auteure, que rien, finalement ne dissipe, il faudra donc apprendre à vivre dans un brouillard permanent.
Et pourtant le portait croisé d'Antoine, attaché parlementaire très classique et de L. Hackeuse, autodidacte engagée notamment pour donner les moyens à des femmes harcelées et en grand danger les moyens de se protéger en supprimant les traces et les espionnages si faciles à mettre en place sur le net, nous instruit, nous amène à explorer les limites de leurs engagements respectifs, à en approcher le sens. Cependant tous les efforts de maîtrise viennent se fracasser sur le cynisme, la paresse celle de ne pas s'interroger sur les moyens de préserver son intimité et donc sa liberté, et en toile de fond l'impossibilité de croire et donc d'espérer en un monde meilleur.
Antoine reste enfermé dans sa culture et sa recherche de ne pas admettre qu'il exerce un « métier de merde » tout en voulant s'en sortir par l'écriture et L. dans son corps, pour faire court.
Il n'y aura pas d'happy- end mais, une récompense à l'emprunt des chemins de vie de crête de ces deux là, par la fidélité aux liens d'humanité, au partage gratuit fraternel, ou si l'on préfère à l'amour débarrassé de son grand A, à l'ambition sur les finalités de la vie débarrassé de son grand A. Chacun suivra sa trajectoire, individuelle, solitaire, certes mais Alice Zeniter nous rappelle qu'en acceptant la diversité, en pratiquant l'indulgence envers nos soeurs et frères humains, des rencontres éphémères plus ou moins sont possibles, leur pouvoir calorifique en chaleur humaine est sans doute notre seul viatique. Transcendance dans l'empathie ? Une piste à ne pas négliger par des temps d'hyper virtualisation qui renforce les forts, les violents, les riches « de tout » surtout quand ils y croient eux-mêmes.
Et même si cette critique vous égare un peu, rien que pour la (re)découverte des arcanes et des chausse - trappes de l'internet, la lecture ce « Comme un empire dans un empire » vaut la peine, qui n'en sera pas du tout une ! Et en prime cela devrait nous inviter à secouer notre léthargie de consommateur d'internet et d'informatique pour aller faire un tour dans les « arrières-cuisines »pour se former, s'informer et arrêter de gober passivement n'importe quoi, rappelons nous le « sortez couvert ! » ! A actualiser ..
Bonne lecture !

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Pour cette rentrée littéraire, Alice Zeniter offre avec Comme un empire dans un empire une analyse affutée des situations absurdes que rencontrent notre actualité contemporaine, à partir du récit de l'univers de trois trentenaires qui tentent d'agir sur le monde qu'ils habitent.
Antoine est attaché parlementaire auprès d'un député socialiste qui prône la sociale démocratie mais qui peine à sortir du schéma qu'il connait depuis son entrée en politique. Cela fait très longtemps. La justification de l'état d'urgence après les attentats, le refus du revenu universel et une conception très archaïque de l'organisation sociale, etc. ont justifiés la répression policière qui a marqué à jamais un fossé entre le pouvoir et ceux qui les élisent. Sans comprendre que ces derniers demandent des comptes et ne se laissent plus berner sans réagir, ce député cherche à exister malgré tout, dans un monde qu'il ne reconnait plus. Antoine essaye de l'intérieur de lui faire appréhender ce monde nouveau en l'alertant sur un nombre de sujets contemporains, comme les gilets jaunes, le darknet, etc. Son engagement est complété par l'envie d'écrire un livre sur un amour qu'on disait absolu et qui a créé le photojournalisme moderne, le couple que forme Robert Capa et Gerda Taro.
Elle se fait appeler l'(à voix haute, on dit elle) et vit dans le monde du dedans – comprendre Internet. Au temps des Anonymous, l'appartenait au monde des Ops chargés des opérations. Maintenant, elle se tient aux confins du droit mais cherche toujours à agir. Elle tente de démanteler les réseaux de la fachosphère. Son engagement ne s'arrête pas là. Elle aide aussi les femmes victimes de ce traçage numérique au service de la violence de leur compagnon. de plus, l'vient d'assister à l'arrestation de son compagnon accusé de piratage d'une société de surveillance. Très encombrée par un corps trop grand, l'promène ses peurs du monde du dehors qui deviendront une sorte de paranoïa réactionnelle galopante au fil des pages.
Dans le roman, Xavier, un ami d'enfance d'Antoine, est beaucoup plus effacé mais représente l'engagement du retour vers la nature. Il vit à la Vieille ferme, un terrain qu'il a ouvert à tous ceux qui veulent vivre une expérience particulière en autogestion au mode de vie alternatif. La-bas, ça vient, ça va. Tout le monde s'occupe de tout, en toute égalité. Il y a même, comme à Notre-Dame-des-Landes, des artistes circassiens.
Antoine va connaitre L, qui elle-même fera la connaissance de Xavier. Tous les trois vont devenir interdépendants. Mais, chacun garde la marque de son engagement particulier et sa capacité à le questionner.
L'écriture d'Alice Zeniter est ciselée. Les mots évoquent plus qu'ils ne décrivent. Son texte exige attention et calme pour être apprécié. Cette immersion romanesque est dense et riche d'émotions souvent ressenties avec plaisir.
Alice Zeniter décortique le déterminisme social, l'aspiration et le contexte socio-culturel de ses personnages. Elle étudie par ce roman notre histoire contemporaine qui a cru,qu'en renouvelant une classe politique, le sort des citoyens pouvaient changer. Ce roman, dont l'action se situe en 2019, fait le constat que rien n'a changé juste l'âge des protagonistes. Et, par ailleurs, comme le dit Xavier, ça va exploser ! Quelque chose gronde ! Cette violence est sous-jacente et omniprésente dans tout le roman.
Alice Zeiniter force le lecteur à réfléchir sur l'engagement de ses contemporains à cete nouvelle citoyenneté. Cette génération a découvert l'internet, les ressources d'une planète qui s'épuisent, la croissance économique questionnée de plus en plus et la démocratie étouffée de jour en jour un peu plus. L'auteure s'interroge sur le moyen de continuer à agir même si cela semble si dérisoire au regard du monde complexe dans lequel nous vivons.
Mais avec le personnage d'Antoine écrivain, Alice Zeniter pointe le travail d'écriture, comme une façon complémentaire de changer le monde. Si une histoire peut être racontée vaut-elle le travail de l'écriture ? Car, c'est un travail âpre et exigeant qu'on devine fastidieux à la lecture de ce texte travaillé, comme une bonne élève qui améliore sans cesse ses devoirs, comme Antoine se définit. Et si un homme étouffe le travail de la femme qu'il aime, comme Robert Capa l'a fait avec celui de Gerda Taro, a-t-on encore le droit de faire comme si on ne savait pas !
Avec « Comme un empire dans un empire » Alice Zeniter utilise la fiction pour questionner la façon dont sa génération s'implique pour changer le monde contemporain. En décrivant les contours, l'auteure fixe les limites de ces différentes militances. M'immerger dans l'univers d'Alice Zeniter fut un moment que j'ai aimé passionnément !
https://vagabondageautourdesoi.com/2020/08/30/alice-zeniter/
Lien : https://vagabondageautourdes..
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Ne cherchez pas dans ce roman d'Alice ZENITER le souffle romanesque de « L'art de perdre », on change tout !
Et, c'est finalement une bonne option ! Plongée dans notre monde contemporain, ultra connecté, ce nouveau roman accompagne Antoine et L., purs produits de notre époque, balancés entre idéologie et lâcher-prise.
Antoine qui s'affranchit de son milieu d'origine à force d'études et d'engagement politique et L. (ou Leïla) qui voit dans l'internet le miroir de sa vie. Chacun en butte à ses désillusions, ses névroses (voire psychoses), deux personnages qui se découvrent, se réinventent, tentent (désespérément) de redonner sens à leurs vies, à l'amour, à un monde malade..
Presque un roman politique, militant (dans quelle étagère?), mais des personnages attachants, et une intrigue intelligente.
Ravie de cette lecture dont le sujet ne m'aurait pas emballée a priori mais que je n'ai pas lâchée du début à la fin !
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J'ai vraiment beaucoup aimé lire ce roman sur des trentenaires pris dans une époque où l'on lit bien ô combien il est complexe de trouver sa place et encore plus de croire en un avenir radieux.
J'ai 20 ans de plus qu'eux, ma jeunesse a donc forcément été différente.
J'ai trouvé qu'avec finesse et profondeur, Alice Zeniter dont j'avais déjà beaucoup aimé le précédent roman, permet de ressentir cette génération, ses tentatives d'engagement, ses peurs, à travers plusieurs personnages, au delà des deux principaux que sont Antoine et L.
J'ai beaucoup apprécié les ambiances bien rendues des groupes parisiens et leurs codes, celui des femmes qui murmurent, ces femmes violentées qui appellent au secours L., la hackeuse.
Le monde des hackers est très bien exploré tout comme celui des assistants parlementaires.

Le lieu de la vieille ferme, en province, lieu d'accueil alternatif, décrit sans carricature est très réussi.

Une plongée dans notre monde contemporain avec un regard lucide et sans concessions mais finalement très tendre, une réussite dans le paysage de la littérature française.






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Riche , passionnant, émouvant....c'est un très bon roman. Et aussi original et intelligent !
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Comme un empire dans un empire ... waouh, c'est un bijou, écrit sur un rythme tantôt lent, tantôt rapide, avec un focus sur les sensations. On n'a jamais de jugement, on n'a jamais de phrases toutes faites, on a juste la description des attitudes des personnages, de leur vie, de leur ressenti, au plus juste, au plus proche. C'est un bijou. Toujours le mot juste et la phrase percutante. Jamais lu un livre pareil ! Au niveau de l'histoire, c'est un mélange entre Antoine, assistant parlementaire d'un député "au visage en croix", de gauche, au moment du premier quinquennat de Macron. On n'a jamais le nom de ce député, on imagine qu'il pourrait d'appeler Charles Jérémie ou Luc ce serait équivalent. Ce député travaille, dans des commissions, on a l'histoire aussi du travail parlementaire, par le petite porte, les pauses cigarettes brèves et pas trop exposées, on ne se raconte pas trop, et les discours travaillés, retravaillés, re re travaillés... de l'autre côté, il y a L. Quel personnage que ce l'! l'est hackeuse, hackeuse de génie. Elle a participé aux Anonymous, elle distingue le "dehors" (la vie en société) et le "dedans", la vie internet où elle excelle. On raconte toute sa vie, un peu difficile dehors, toujours à l'aise dedans. Par petite touche, on comprend qu'elle est aussi dans le combat féministe en aidant des femmes à se libérer de l'emprise d'un mari trop intrusif. Mais l'tombe, au moment où son conjoint Elias est emmené en prison, elle dégringole, elle ne se raccroche plus et elle sombre dans la paranoïa. C'est Antoine qui va la recueillir.
J'ai vraiment beaucoup aimé ce livre, et la description des sentiments de personnages tout en nuance, la maturité qu'ils prennent dans le livre. Tout est très bien documenté et expliqué.
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J'avais découvert Alice Zeniter avec Jusque dans nos bras, avait enchaîné avec l'Art de perdre, et voilà que je lis Comme un empire dans un empire à sortie (j'adore le titre et ce qu'il évoque), puis le relis lorsqu'il arrive en poche. Je peux dire qu'il fait partie de mes livres préférés !

Une réflexion fournie sur l'engagement politique, choisir d'être 'in' ou 'out' du système pour lutter : à travers une association, l'assistanat parlementaire, le lieu alternatif ou encore l'informatique. 
On suit deux personnages, L. et Antoine, et le monde qui gravite autour d'eux. Elle est hackeuse, il est assistant parlementaire. 
Ce qui m'a beaucoup plu, c'est le mélange entre fiction et faits, apprendre un bout de hacking ou de lutte sociale tout en creusant les émotions et pensées de ces humains qui font des choses paraissant éloignées, et qui pourtant sont liées de part leur impact sur la société. Ça parle cyber-surveillance et cyber-attaque, gilets jaunes, féminisme, squats, prison mais aussi amour, doute, solitude, anxiété et rêve.
Vouloir un monde plus juste, ça passe par diverses formes d'engagements à différentes échelles. 
C'est un texte neuf, lumineux et réel.
Le style est excellent, fluide et précis, sans rien de superflu.

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Alice Zeniter est une grande auteure qui se saisit du politique, de tout ce qui fait politique aujourd'hui dans la cité des hommes. Elle conçoit des personnages, tout à la fois archétypes et uniques, auxquels on peut s'attacher, car rien n'est caché de leurs fragilités, de leurs faiblesses, de leurs rêves futiles ou grandioses et de la force de leurs luttes. Il est question de gilets jaunes, de Zad, de parti socialiste et de hacking, elle y affirme que oui la lutte des classes est une réalité en 2021 on ne saurait l'oublier... Il est aussi et surtout question de liberté. le clin d'oeil du titre à Spinoza n'est pas fortuit. Les protagonistes cheminent douloureusement entre déterminisme et puissance d'agir, c'est beau et doux comme un printemps.
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Le personnage de L. est intrigant. L'auteur a su la rendre insaisissable, à tous les niveaux. Elle navigue entre deux mondes, le réel et le virtuel, mais incontestablement, c'est une activiste politique.
Par l'intermédiaire du second personnage, assistant parlementaire, on pénètre les coulisses d'un parti et la politique politicienne.
Ces deux êtres que tout oppose vont se croiser et s'apporter mutuellement bien des choses...

j'ai trouvé que c'était une histoire pas banale, rondement menait et qui donne à penser. Un très bon livre :))
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