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sur 4780 notes

Critiques filtrées sur 4 étoiles  
Parce que personne ne lui en a parlé, Naïma pendant longtemps ne connaît que peu de choses sur sa famille et sur l'Algérie - son pays d'origine mais pas de naissance. Ali, son grand-père enrichi dans le commerce des olives et devenu harki avec la guerre d'indépendance, disparaît avant de lui parler. Sa grand-mère Yema ne parle qu'arabe, une langue que Naïma ignore. Son père Hamid préfère taire l'histoire familiale, honteux de son propre père.

Ali, Hamid, Naïma, les représentants de trois générations d'une famille kabyle ballottée par l’Histoire, séparés culturellement par les conséquences de la guerre qui libère de la colonisation ; pour Ali et sa famille, l'exil forcé avec la perte d'identité et l'invisibilité dans les camps de harkis puis dans un HLM normand, pour Naïma, née en France d'une mère française, la barrière de la langue et de la culture. Pour chacun, l'art de perdre en partie sa culture, de celle qui fait le ciment et le lien entre les membres d'une famille, mais aussi pour Naïma la possibilité de se détacher d'un héritage trop lourd pour s'autoriser à être soi.

Alice Zéniter signe ici un roman saisissant sur les harkis et leurs descendants. Leur histoire racontée avec poésie et réalisme par cette jeune et brillante auteure est vibrante et touchante.
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C'est avec beaucoup de sentiments négatifs que j'ai abordé le début de ce roman : de la répugnance, à parcourir une fois de plus le récit des exactions des fanatiques de tous poils, de l'aversion pour ses scènes qui , bien que maintes fois lues ou vues, provoquent toujours cette nausée, comme le font celles qui évoquent les horreurs de la shoah. Pas question dans cet épisode de l'histoire de prendre parti, sinon contre celui de la violence extrême « justifiée d'idoles » ou d'utopies qui sont autant de passeport pour exhumer la nature bestiale de l'humanité. Malgré tout Alice Zeniter, au-delà de l'évocation de l'insoutenable , parvient à bien mettre en évidence l'absurdité du destin de ceux qui ont fait le choix qu'ils croyaient juste, qui en furent glorifiés pour devenir des parias apatrides.

Puis vient départ de ce pays auquel la famille doit renoncer , tant la menace est grande et la peur omniprésente. le chagrin est d'autant plus lourd que ce qui s'efface peu à peu au rythme de la progression du ferry qui s'éloigne, c'était la réussite sociale, la gloire éphémère du héros, la vie en famille, l'espace et un destin choisi.

C'est là que le récit devient captivant , et riche de faits qui n'ont pas été étalés à la une des médias de l'époque. Il n'y a en effet pas de quoi être fier : avoir utilisé ces hommes à des fins de stratégie militaire, au péril de leur vie, pour les délaisser , eux et leur famille, , en proie a des conflits de loyauté insolvables , et dans des conditions de vie quotidienne que l'on réserve plutôt à des criminels, pour aboutir au final dans celui fut la genèse des « quartiers », n'a rien de glorieux.

C'est la dernière partie qui est la plus remarquable : Naïma , née en France, d'un père qui a oublié, dans un processus d'auto-protection, finit par retourner sur la terre de ces ancêtres.
Si Naïma naît sous la plume pour exister au nom d'Alice Zeniter, qui s'est inspirée de la vie de sa propre famille pour écrire ce roman, elle fait partie d'une galerie de personnages dont le portrait est élaboré avec finesse et subtilité, pour le plus grand bonheur du lecteur.

Um mot pour mentionner le magnifique poème d'Elisabeth Bishop qui a inspiré le titre.

Les lycéens ont encore une fois élu un ouvrage brillant, et nécessaire.

Lien : http://kittylamouette.blogsp..
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Pour qui (comme moi) n'avait cerné que de très loin la question algérienne au temps de la France coloniale, L'Art de perdre fait résolument office de rattrapage express.

Une fiction qui retrace en effet la réalité historique, mais plus encore puisqu'à travers le destin d'une famille kabyle disloquée par la guerre d'indépendance, le récit se double d'une analyse psychosociologique intéressante et nouvelle. Ainsi la succession des événements et leurs répercussions sur plusieurs générations sont-elles relatées de l'intérieur, sans parti pris aucun, offrant la parole à ces algériens contraints au dilemme d'une tragique alternative entre occupant français et mouvements nationalistes. Charybde ou Scylla, fais ton choix camarade, dans tous les cas ce sera loin d'être la fête au village.

Ce long et pénible voyage dans le passé parle donc de choix, de racines et d'exil, et paradoxalement de silence, ce silence douloureux et incompris qui souvent s'impose en guise de résilience.

Un témoignage édifiant et tristement d'actualité pour tenter d'appréhender le thème de l'émigration en général et des harkis en particulier, si bien occultés dans nos livres d'Histoire, comme par hasard.


Lien : http://minimalyks.tumblr.com/
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Une amie m'avait prêté ce roman il y a quelques mois, je l'avais vite abandonné simplement parce qu'elle annote les pages au crayon, ce que je déteste...
le confinement me l'a fait reprendre et j'en suis heureux, le livre m'a passionné !

Passionné par cette recherche d'Identité, de racines, d'histoire de sa famille que mène Naïma,
passionné par ce rappel de l'histoire de l'Algérie, de sa guerre d'indépendance, des choix douloureux de ses habitants entre le FLN et la France, par le sort des Harkis, ceux qui se sont tournés vers la France et qui ont été considérés alors comme traîtres, passionné par leur arrivée en France, parqués dans des camps, pas vraiment acceptés, par les conflits entre les bons Algériens et les traîtres, par ceux qui gardent la nostalgie d'un paradis perdu (et toujours immuable comme si l'Algérie ne se modifiait plus depuis leur départ, par ceux qui au contraire veulent gommer le passé.
Naïma, qui fait partie de la seconde génération de ces exilés, fera le voyage vers le pays de ses ancêtres.
le roman, saga d'une famille kabyle, nous fait passer de sa pauvreté initiale à sa réussite financière et sociale dans un village de montagne, les prémisses des luttes d'indépendance durant lesquelles tant le FLN que les Français incitent les villageois à choisir le bon camp, la fuite vers la France tout en pensant que ce n'est que provisoire, les difficultés à l'arrivée, la confrontation au racisme.
Il aborde aussi la condition des femmes, l'écart qui se creuse entre ceux qui ont quitté l'Algérie et leurs enfants qui ne connaissent que la France et qui privilégient la langue française.
Un peu plus de 500 pages parcourues avec intérêt et grand plaisir.
Je ne manquerai pas de le dire à mon amie et de la remercier en lui rendant son livre !
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« L'art de perdre » d'Alice ZENITER vient de remporter le prix Goncourt des lycéens. Pourquoi ne suis-je pas étonnée de cette récompense ? Parce que ce prix est à mon avis presque toujours décerner à des romans qui le méritent vraiment. C'est encore le cas cette année.

L'auteur nous offre une fresque familiale romanesque puissante divisée en trois parties correspondant à trois personnages de générations différentes : Ali le grand-père, Hamid le fils et Naima la petite-fille. Ils sont tous les trois les représentants d'une famille kabyle qui vont vivre chacun différemment l'histoire de l'Algérie des années 1930 à aujourd'hui.

Tout d'abord, Ali le grand-père qui s'est enrichi dans le commerce des olives et qui est devenu ce que l'on appellera « un harki » durant la guerre d'indépendance de l'Algérie. Il est mort avant de pouvoir « raconter ». Puis, Hamid, père de Naima, arrivé en France à l'été 1962, mis avec sa famille dans les camps de transit hâtivement mis en place par l'autorité française et qui en sera définitivement meurtri. Il choisira jusqu'au bout de garder le silence.

Naima ne sait rien de l'Algérie : tout juste que sa famille est originaire de là-bas. Elle est le symbole de cette nouvelle génération française et qui se heurte au silence familial sur ce qui s'est véritablement passé là-bas. Mais les différents évènements survenus en France depuis quelque temps vont l'obliger à prendre conscience de ses origines. Alors, elle va partir là-bas et se lancer vers la quête de celles-ci et de cette histoire si longtemps tue.

Ali, Hamid, Naima trois personnages issus d'une même famille et pourtant séparés et divisés culturellement et affectivement par les conséquences de la guerre d'Algérie. Les deux premiers, exilés forcés, marqués du sceau du déracinement et habités par la douleur de l'histoire de leur pays et les humiliations subis dans les camps de « harkis ». Naima, profondément française mais dont les origines sont enfouies tout au fond d'elle-même.

Alice ZENITER signe un roman magistral sur ces familles de « harkis » et leurs descendants en racontant magnifiquement le destin de ces trois générations successives prisonnières malgré elles de cette histoire terrible qu'est la guerre d'Algérie. Roman sur l'immigration, l'identité à travers « l'art de perdre » tout ce qui nous définit à notre naissance : nos origines, notre culture…nos racines tout simplement. Mais c'est aussi un roman sur la difficulté d'être soi pour tout une génération dont fait partie Naïma, ayant soi-disant une « double culture » par obligation mais qui connaît à peine trois mots d'arabe.

Au bout du compte, on ne peut s'empêcher de penser que ce texte explique en partie bien des situations qui posent problème aujourd'hui y compris la radicalisation. Bravo Madame ZENITER, vous méritez sans l'ombre d'un doute votre prix.


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Naïma a oublié l'Algérie, un pays qu'elle n'a jamais connu, un pays manquant et une religion oubliée. Et pourtant elle porte l'Algérie en elle, son prénom,sa peau brune, ses cheveux noirs. Ali, son grand-père, un harki, a tout abandonné en 1962 pour sauver sa famille. Hamid, son père, a vécu dans le camp d'accueil de Rivesaltes, un carré de toiles, entouré de barbelés,où l'électricité est coupée à 22h30. Naïma va prendre le bateau pour retourner à Alger de la même manière que sa famille l'a quittée. Elle va essayer de créer son propre lien avec l'Algérie, au lieu de poser ses pas dans ceux de son grand-père et de son père.

A travers trois générations, Alice Zeniter nous raconte le drame des harkis éjectés de leur pays, non désirés par la France. Des parents obsédés par la réussite de leurs enfants, qui arrêtent de vivre pour tout leur donner. C'est l'Histoire de l'Algérie qui nous est contée, avec ses traditions, la femme répudiée, car tel est le droit du mari, parce que son ventre est sec Les présents offerts par un futur mari, que la jeune adolescente n'a jamais vu. La circoncision où un enfant de cinq ans devient un homme. Mais aussi l'incompréhension ente Kabyles et Arabes qui ne se comprennent pas et le douloureux combat pour l'indépendance où des familles se déchirent, le FLN, des soldats français massacrés, les représailles sanglantes qui s'en suivent. Les attentats d'Alger. Les accords d'Evian. L'espoir de ceux qui du pont du bateau voient s'éloigner Alger la blanche mais persuadés que dans six mois, c'est sûr, ils seront de retour dans le village. Des parents qui regardent l'Arabe devenir une langue étrangère pour leurs enfants. La confrontation entre le père et le fils entre passé et avenir. Des hommes attirés par la France et leurs femmes qui restent en Algérie comme des veuves. Les familles qui reviennent en Algérie pour les vacances qui jouent au jeu de la réussite, et les autres qui font semblant d'y croire. Les attentats terroristes en France et amalgame fait avec la communauté musulmane. Beaucoup de richesses donc dans ce roman sur un sujet délicat et sensible, mais l'écriture d'Alice Zeniter le traite avec beaucoup d'empathie et une totale liberté

Lien : http://notreavis.canalblog.c..
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Un très bon roman, une très belle plume.
J'ai beaucoup aimé le sujet traité, trop souvent éludé dans les livres d'Histoire et dans les discussions. J'ai aimé également la personnalité d'Alice Zeniter qui transparaît à travers ces pages.
Ce que j'ai moins aimé c'est l'incapacité que j'ai eu a ressentir les sentiments des personnages, à visualiser les paysages et les scènes décrites. À l'instar de quelques critiques babeliotes, je trouve que le style de l'écriture, pourtant irréprochable, tient le lecteur trop à distance.
Une très belle lecture néanmoins, les lycéens ont décidément très bon goût.
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L'art de perdre est un beau roman qui retrace le parcours d'une famille franco-algérienne prise dans les griffes d'une histoire de France douloureuse pour tous, à des degrés divers, quel que fût le camp dans lequel se trouvèrent les personnages. La morale d'aujourd'hui condamne le passé colonial et demande un travail de mémoire honnête et sans arrangement avec la vérité. S'agissant des Harkis, les vainqueurs ont écrit le récit national qui naquit de cette guerre d'indépendance, vouant les traitres à la Patrie aux gémonies. L'ancienne puissance coloniale les a parqués, cachés avant de finir par reconnaître leur droit de vivre décemment dans leur pays d'adoption. Alice Zeniter nous parle aussi de la difficulté à se construire une identité lorsqu'on est tiraillé entre ces deux rives de la méditerranée, entre un héritage parfois pesant pour des enfants responsables de rien et le besoin d'enracinement dans un récit familial que ressentent certains...Un bon moment de lecture ancré dans un sujet complexe et polémique.
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L'art de perdre, c'est accepter la perte.
On peut perdre ses clés, on peut perdre un souvenir, on peut perdre un pays. Car ce que l'on ne nous transmet pas, on le perd fatalement. Ce n'est pas un désastre, c'est ainsi.
Naïma, l'héroïne de "L'art de perdre", en fait l'expérience.

Petite-fille de harkis, Naïma est violemment confrontée à l'image qu'elle et sa famille renvoient au lendemain des attentats de 2015. Les questions identitaires sont dans l'air du temps. L'Algérie, pays de ses origines, demeure jusqu'à présent une contrée lointaine et inconnue dont son père Hamid ne parle jamais si ce n'est pour les mettre en garde, elle et ses soeurs, des dangers qu'elle recèle. Son grand-père, décédé trop tôt, et sa grand-mère qui ne parle que l'arabe, ne peuvent lui être d'aucun secours dans ses interrogations. Alors patiemment, à l'occasion d'une exposition qu'elle doit réaliser sur les oeuvres d'un peintre kabyle exilé, elle va dérouler le fil de son histoire familiale qui se lie à la plus grande, celle de la Guerre d'Algérie et des harkis.

Des crêtes de Kabylie où sont nés son grand-père Ali et son père Hamid, aux HLM de Pont-Féron en passant par le tristement célèbre camp de Rivesaltes où se retrouve regroupée toute la famille, Alice Zéniter nous fait partager le destin, entre la France et l'Algérie, d'une famille de harkis. Ce roman, divisé en trois parties chronologiques, est une véritable fresque familiale et historique qui offre un formidable hommage à ces Français trop longtemps méprisés et méconnus.

Réflexion sur les racines et l'héritage familial, sur les choix qui bouleversent toute une vie, sur l'intégration voulue ou forcée, sur la liberté d'être une femme au-delà des coutumes ancestrales, sur le racisme ordinaire d'hier et d'aujourd'hui, "L'art de perdre" est un très grand roman au style alerte et sobre. L'auteur a pour moi réussi un récit qui manquait indéniablement dans l'histoire des harkis. J'ai adoré la partie consacrée à Ali le grand-père, le géant tombé de son trône, nous dévoilant des épisodes de la guerre d'Algérie absolument bouleversants pour ces hommes qui avaient combattu sous le drapeau français lors de la Seconde Guerre mondiale et qui se retrouvent d'un coup désignés comme les "ennemis" dans leur propre pays d'origine et comme les "indésirables" pour leur pays d'adoption. J'ai aimé la partie consacrée à Hamid, deuxième génération, qui s'engage dans une farouche indépendance vis à vis de sa famille et de ses origines, souhaitant au plus vite se détacher d'un passé trop présent. J'ai moins apprécié l'histoire de Naïma, troisième génération, peut-être la partie de trop ou celle la plus bâclée.

Mis à part ce petit regret sur la fin et quelques longueurs, "L'art de perdre" est un très grand roman, de ceux qui vous font voyager dans le temps et l'espace tout en restant dans votre fauteuil. Et ça, j'aime beaucoup.
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Ce roman "L'art de perdre" est une fresque historique et familiale sur la guerre d'Algérie : avant, pendant et après.

L'auteure décrit les horreurs de cette guerre qui a brisé à jamais les personnes présentes au moment des faits mais également les générations suivantes. Elles sont à la recherche de leur(s) racine(s) et de leur(s) identité(s) sans jamais atteindre leur objectif. Que de questions sans réponses !

Alice ZENITER a réussi nous faire partager la douleur de ces générations meurtries. Son écriture fluide et posée nous entraîne tout au long de cette épopée.

Que d'amertume une fois la dernière page tournée !

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