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Critique de pasiondelalectura



Dans Balzac, le roman de sa vie de Stefan Zweig nous suivrons la vie De Balzac pas à pas. Son enfance malheureuse car privée de la présence et de l'affection de sa mère, ce qui va déterminer l'affect du romancier. Et le fait qu'à peine sorti de l'adolescence, il a dû gagner sa vie afin de ne rien coûter à ses parents qui n'approuvaient pas son inclinaison pour la littérature.

Cette pression économique sera telle que très vite, l'écrivain a fait de "l'alimentaire » en littérature. Ce n'est qu'autour de sa trentième année que la production littéraire gagnera en qualité.

Honoré de Balzac a laissé une oeuvre immense, il a crée une cathédrale avec sa Comédie Humaine: en 20 ans il nous a laissé 74 romans dont plusieurs chefs-d'oeuvre avec des centaines des paysages, de maisons, de rues et 2 000 personnages/études psychologiques dont une centaine sont inoubliables

Mais cette surproduction forcée a nécessité une force physique colossale avec un emploi du temps reglé et sévère et la consommation de litres de café fort qui ont fatigué et usé son système nerveux. On pense aujourd'hui que cette écriture forcée était l'oeuvre d'un monomaniaque et cette monomanie restera chez lui la condition de tout succès.

Son cadre de travail était sa petite table rectangulaire à quatre pieds qu'il a sauvé des ventes aux enchères et aux catastrophes, à gauche de sa table un tas de feuilles blanches bleutées et bien lisses pour ne pas trop fatiguer les yeux et ses plumes de corbeau affutées soigneusement par lui même. A droite de la table, un carnet où il note ses trouvailles et ses idées pour les chapitres à venir. Et le café, qu'il consommait sans modération et préparait lui même, était fait d'un mélange de trois espèces de grains. On a calculé qu'au bout de 20 ans, ce sont 55 000 tasses de café que Balzac a du ingurgiter pour se tenir éveillé et fournir cette production infernale afin de régler ses dettes.

Malgré une rapidité de production des publications, cet homme n'a jamais connu l'aisance économique, mais bien au contraire, il a tiré le diable par la queue sa vie durant. Son premier grand succès fut le colonel Chabert et le second, Eugènie Grandet.

La personnalité De Balzac était démesurée, tout en lui était surdimensionné. Il dépensait l'argent sans compter et avant même de l'avoir gagné. Il vivait en permanence dans des chimères qu'il montait lui même et toutes les entreprises qu'il mena, furent un échec cuisant : l'imprimerie, la fonderie de caractères, sa maison des Jardies à Ville d'Avray, etc. C'est un homme de la perpétuelle démesure : quand il admire, il faut qu'il tombe en extase; quand il travaille, il peine comme un galérien; quand il s'épanche auprès de quelqu'un, il faut que ce soit une surabondance, une orgie de confessions. Balzac ne peut respirer que dans une atmosphère embrasée; la démesure reste l'unique mesure à sa taille. son tempérament sanguin est étrangement porté à oublier les désagréments, et les obligations, si elles ne sont pas pressantes, sont comme si elles n'étaient pas.

Sa vie sentimentale ne fut pas très heureuse. Son premier amour fut une voisine de ses parents, Mme de Berny, la Dilecta, âgée de 45 ans alors que lui avait un peu plus de 20 ans; de toute évidence il a cherché cet amour maternel si bienveillant et protecteur, tel qu'il lui fit défaut et cet amour lui valut une phrase devenue immortelle « il n'y a que le dernier amour d'une femme qui satisfasse le premier d'un homme ». Son dernier amour, Eva de Hanska qu'il a épousé à Metz n'en voulait qu'à sa gloire d' écrivain et lui, qu'à ses titres et ses millions.

Physiquement Balzac était un molosse de petite taille, trapu, lippu et édenté, mal fagoté, mais avec un regard d'une rare acuité. Ses manières laissaient à désirer et son goût vestimentaire était totalement kitsch. Il se voulait un dandy parfait, mais les gens se moquaient de lui par derrière sans que cela le perturbe car il avait trop de vitalité, de tempérament, il voyait les choses de trop haut et aux sourires railleurs il répondait par un gros rire rabelaisien.

Le docteur André Jeannot, psychiatre, a écrit un ouvrage très intéressant sous le titre Balzac, le forçat de la gloire (ce qui lui colle très bien) sur la maladie mentale bénigne De Balzac où hypomanie, compatible avec le génie. Il explique la tachypsychie ou la « fuite des idées » De Balzac avec son débit cérébral accéléré qui entraine sa « pure pensée » dans une festivité verbale à laquelle participe la triomphale saturnale de tout son être, y compris « son sang et ses muscles ».

Balzac avait l'habitude de ne pas tenir ses engagements. Dans ses opinions politiques comme dans ses opinions littéraires, dans ses amours, dans ses amitiés, il est toujours prêt à se renier, affiche un parfait manque de constance et de scrupule. L'écrivain qui sera toujours en imminence de planter l'oeuvre pour un emploi plus lucratif, qui a abandonné le roman populaire pour l'édition, l'édition pour l'imprimerie, l'imprimerie pour le roman, aurait abandonné le roman pour le théâtre, le journalisme, la politique, la prospection des mines, la concession des canaux, la plantation d'ananas à Ville d'Avray, et dans les dernières années, n'ambitionne plus rien qu'une autre fonction, un autre métier: celui de prince consort d'une comtesse milliardaire !

Le docteur Jeannot remarque justement le caractère monomaniaque de la convoitise qui entraine les héros balzaciens : quelle passion les mène? Ils ne le savent pas eux-mêmes. Toujours plus de titres pour Rastignac, de faiblesses paternelles pour le père Goriot, de sensualité pour Hulot, d'or pour Grandet. le désir du héros balzacien n'a pas de fin. La fin du roman dans lequel il s'incarne n'est, elle même, jamais que la fin d'un chapitre de la Comédie Humaine. Chez Balzac, toujours en projection au-delà de l'impossible présent, le mot « Fin » ne fait pas partie du vocabulaire.
Lien : https://pasiondelalectura.wo..
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