Il ne faut pas se fier aux apparences...
Le 22 novembre 1963,
John Fitzgerald Kennedy est assassiné en pleine ville de Dallas, au Texas. Si Lee Harvey Oswald semble être celui qui a appuyé sur la gâchette, de nombreuses théories du complot, autour des commanditaires de l'assassinat, viennent enflammer les débats. Vraisemblablement, ces récits ont influencé le scénario d'Angel Face.
Sauf que là, c'est le président Ulysses S. Grant (élu président quelques années après l'assassinat de Lincoln en 1865) qui est visé, tandis que Blueberry fait office de bouc-émissaire, ce qui lui vaut un placard à 10 000 puis 20 000 dollars.
Durango, petite ville décorée aux couleurs des USA pour l'occasion, sert de cadre à l'action. de nouveaux types de personnages sont introduits et permettent quelques pirouettes scénaristiques : détectives privés, pompiers, petite vieille...
Et quelles sacrées trognes ! Entre le vieux porc de tunique bleu, le politique imbu de lui même, ou encore le shérif qui bat sa femme... Giraud sait donner vie à ses personnages, même secondaires, quitte à la reprendre au bout de quelques cases...
La figure ambivalente d'Angel Face, en particulier, est assez marquante. Cet assassin, expert dans le maniement des armes, a un visage juvénile, si épuré qu'on pourrait le confondre avec l'un des personnages féminins. Et pourtant, ses traits fins, son nez aquilin, son regard perçant, son arme de précision, sa bouteille de 'sky... trahissent sa véritable personnalité, venimeuse, relevée en fin d'album par une palette de verts.
Du reste, la mise en couleurs est assez terre à terre, hormis certains passages, soulignés par des couleurs vives, expressives. le rouge notamment, à saturation pour le sauvetage de la vieille dame, vient accentuer la dramaturgie de l'incendie, ainsi que celle des fusillades.
Mais Angel Face est aussi une histoire de travestissement, celui du complot contre Grant, qui oblige Blueberry à changer régulièrement d'habits et de cachette. Il finit même par adopter la moustache, à la
Freddy Mercury...
En résulte un western hybride, un vrai mélange de genres : à la fois thriller, avec une réelle tension narrative... mais aussi vaudeville, avec ses blagues potaches, ses caricatures et son comique de situation.
La vérité vient finalement dans le feu qui, comme pour le miroir de Dorian Grey, reflète l'âme moribonde d'Angel Face.