LES YEUX STÉRILES
Elle est comme un bourgeon
L'espace de la flamme
Candide elle a l'arôme
D'amoureux enlacés.
Solitaire :
J’aurais pu vivre sans toi
Vivre seul
Qui parle
Qui peut vivre seul
Sans toi
Qui
Être en dépit de tout
Être en dépit de soi
La nuit est avancée
Comme un bloc de cristal
Je me mêle à la nuit.
OBJETS
DANS CETTE CHAMBRE QUE J'HABITE
J' ASSEMBLE TOUS LES PAYSAGES
J' ENTRE AU BOIS DIAMANT
LE CIEL EST UN AVEU.
La lecture
Au centre de Paris
La pudeur rêvassait
Le bouquet du ciel sans nuages
Dans un vase de maisons noires
Quand elle n'a pas le temps
Elle n'en est que plus belle
On n'en finit pas d'apprendre
Le ciel ferme la fenêtre
Le soleil cache le plafond
FEMME PORTATIVE
D'un effet solennel dans la solitude
Terrestre dérision la femme
Quand son cœur est ailleurs
Si ce que j'aime m'est accordé
Je suis sauvé
Si ce que j'aime se retranche
S'anéantit
Je suis perdu
Je n'aime pas mes rêves mais je les raconte
Et j'aime ceux des autres quand on me les montre.
FIL ET AIGUILLE
Sans fin donner naissance
A des passions sans corps
A des étoiles mortes
Qui endeuillent la vue.
CHÂTEAU ABANDONNE
La langue partit la première
Puis ce fut au tour des fenêtres
Il n'y eut plus que mort fondée
Sur le silence et sur l'obscurité.
Le rêve manger l'immangeable
Sortir fier d'un palais penaud.
L'ARBRE-ROSE
L'année est bonne la terre enfle
Le ciel déborde dans les champs
Sur l'herbe courbe comme un ventre
La rosée brûle de fleurir.
Paul Eluard.
L’apparition : J’ai si souvent senti que j’étais partagé
Femme habillée et mâle dépouillé
Que je ne sais si j’aime ou si je suis aimé.