Lou Jan nouvelle autrice à rejoindre le catalogue Critic vous présente son roman "La machine à aimer".
Les hommes portent la responsabilité du génocide. Comment en serait-il autrement ? L'humain se montre intransigeant face au meurtre de ses semblables. mais l'élimination des autres créatures l'indiffère. Pourtant, en sauvant les espèces qui partagent la terre avec lui, il se sauverait lui-même. Nobod ressasse cet aphorisme tragique. Elle n'en tire aucune rancune. Elle est programmée pour pardonner.
Nobod rebranche son processeur cérébral pour recouvrer ses facultés intellectuelles. La détresse la submerge comme un tsunami. On croit pouvoir contenir la vague. Elle enfle et finit par tout dévaster. L'hybride s'arrime au rocher de l'amour universel. Elle vomit, quoique dépourvue d'estomac. Fin du déni. Elle admet qu'elle a parcouru cinq kilomètres sur un tas de chair. Les défunts ont été déportés depuis les autres continents et bazardés là, jetés sans recyclage, moins bien traités que des ordures.
L'amour n'est pas un concept à enseigner aux élèves, c'est avant tout le ballet des sens, un prisme donnant du relief à l'existence.
La splendide hybride chemine sur les corps gelés qui se disloquent sous ses pas. Elle s'affale, sombre et remonte. Supplice d'une noyade sans eau. Elle s'appuie sur un pied ou une mâchoire instable pour éviter les trous. Elle chute encore, se relève et repart, sonnée. Ses compagnons se moquent d'être piétinés. La mort n'existe que pour les vivants.
Vivre avec quelqu'un est difficile, s'en détacher l'est encore plus. Après une séparation, il faut redevenir soi-même, tout reconstruire, changer de paradigme, d'habitudes et de sentiments.
L'été est défait. Octobre lui a volé ses ultimes rayons de soleil. Les arbres se déshabillent feuille à feuille. Leurs bijoux dorés et leurs perles de pluie s'entassent sur le sol.
Être amoureux, c'est accepter le risque de beaucoup souffrir si cela tourne mal. Éros dispense son psychotrope, sans préciser qu'il possède des effets secondaires à retardement.
Fin novembre. Falaise de pluie. Les traits verticaux floutent le paysage. L'automne est condamné. Le ciel bas se donne des airs d'apocalypse. La nuit déborde en journée.
Personne à qui parler. Partager sa tristesse, c'est commencer à guérir. Le survivant est excommunié, maudit.
Le plaisir reste fugitif et superficiel. Le bonheur est durable et profond. Il rend aveugle.