Bien qu’elle ne fût plus tout à fait jeune avec ses trente-six ou trente-huit ans, elle était très séduisante cette Gwenda : un corps moulé à souhait, une chevelure et des yeux d’un noir intense. Mais ce qui retenait particulièrement l’attention, c’était la vitalité du personnage, alliée à la vive intelligence du regard. Le premier, Argyle rompit le silence, non sans une certaine froideur : — Je n’ai pas l’impression de compliquer quoi que ce soit, docteur, et ce n’est nullement mon intention. Il serait peut-être préférable d’en venir au sujet même ? — Parfaitement d’accord. Auparavant, je tiens à vous exprimer mes regrets des paroles qui m’ont échappé. Elles sont dues à l’insistance avec laquelle votre fille et vous-même avez affirmé que l’affaire en question était définitivement close. Ce qui ne correspond nullement à la réalité.
Décidément, cette secrétaire était sympathique. — En effet ! Je l’ai citée à seule fin de me faire mieux connaître de vous, et, surtout, pour souligner que, pendant deux ans, je n’ai pas été au courant d’événements… — … tels que les procès criminels, nota Gwenda. — Exactement ce que je voulais dire, miss Vaughan. Puis, il s’adressa à Leo Argyle : — Bien que ces rappels soient pénibles, il me faut vérifier plusieurs points avec vous. C’est bien le 9 novembre de l’avant-dernière année, à environ dix-huit heures, que votre fils, Jack – Jacko pour sa famille – est venu ici et a eu un entretien avec Mrs Argyle ? — Avec ma femme, oui.
Mrs Argyle ayant refusé, il s’emporta, affirmant qu’il reviendrait et qu’elle serait obligée de s’exécuter. Entre autres, il prononça ces mots : « Vous ne voudriez pas que j’aille en prison ! » À quoi votre femme répondit qu’elle commençait à croire que ce serait peut-être la meilleure solution. Gêné, Argyle crut devoir donner quelques explications : — Nous avions conféré, ma femme et moi, à ce sujet. La conduite de notre fils nous désespérait. À maintes reprises, nous l’avions tiré d’un mauvais pas, espérant, chaque fois, le remettre dans le droit chemin. À bout d’arguments, nous en étions arrivés à penser que le choc d’une condamnation et la rude discipline d’une prison.