Citations de Alain Grandbois (54)
LES MILLE ABEILLES...
Les mille abeilles de ta paupière
Cette chevelure jusqu'à ton doigt bagué
Ce qui hier existait
Ce qui nous est aujourd'hui accordé
Tout nous dépasse et nous vole
Ah rayons muets du moment
Clefs de ta géôle
Pur front de ton tourment
Rien n'est plus parfait que ton songe
Tu t'abîmes en toi et tu crées
Le paysage ultime de ta beauté
Tout le reste est mensonge
BEAU DÉSIR ÉGARÉ
Extrait 1
Beau désir égaré
Dans la tempête insensée
Tout sombrait corps et biens
Mes dents mordaient le feu
Je possédais soudain des mains de cent ans
Je cherche les portes du ciel
Le navire et le port
L'autre côté du soleil
Le silence incessant bruissant
Ce secret d'une chambre d'aurore
Tremblante encore
De l'odeur des lilas
…
Dans la ravage le naufrage de la nuit
Dans ce trop vif battement de son artère
Dans la forêt de son éternité
Si pour une seule fois
S'élevait cette colonne libératrice
Comme un immense geyser de feu
Trouant une nuit foudroyée.
NEIGE
À pas lents tu avances
Vers ces rivages clairs
De lisse désespoir
Toi vêtue de cette blanche tunique
Comme pour l'incantation
Des bonheurs captifs
Sous les feux des saisons
Les lourdes pierres des prisons
Retrouvent les vertiges
De la voix du sourire
Du silence oublié de l'orgueil
Ô toi avec ce geste
D'écorce et de coeur
La moire de la mer
Sous ton beau bras replié
Tu chasses la ténébreuse erreur
Quand tu prononces les mots qui tremblent
Le long de toutes les vallées de la terre
Au flanc de chaque montagne
Au bleu de l'oasis des déserts
Tes mots vêtus de blanc mensonge
Comme une tendre neige
LE SILENCE
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Bras, barques de désirs sur la mer
Tendus vers des rivages
Pour la dernière fois promis
Méfiants navigateurs repoussant
Avec chaque vague
L'éclat du songe
Ô plages crépusculaires
Quel est ce muet besoin
De chaque fois nier
Parmi le labyrinthe des archipels
La douceur de l'oubli.
FERMONS L'ARMOIRE
Fermons l'armoire aux sortilèges
Il est trop tard pour tous les jeux
Mes mains ne sont plus libres
Et ne peuvent plus viser droit au coeur
Le monde que j'avais créé
Possédait sa propre clarté
Mais de ce soleil
Mes yeux sont aveuglés
Mon univers sera englouti avec moi
Je m'enfoncerai dans les cavernes profondes
La nuit m'habitera et ses pièges tragiques
Les voix d'à côté ne me parviendront plus
Je posséderai la surdité du minéral
Tout sera glacé
Et même mon doute.
PRIS ET PROTÉGÉ...
Pris et protégé et condamné par la mer
Je flotte au creux des houles
Les colonnes du ciel pressent mes épaules
Mes yeux fermés refusent l'archange bleu
Les poids des profondeurs frissonnent
sous moi
Je suis seul et nu
Je suis seul et sel
Je flotte à la dérive sur la mer
J'entends l'aspiration géante des dieux noyés
J'écoute les derniers silences
Au delà des horizons morts
Ô fIANCÉE
Ah Je sais qu'autrefois je prenais la nuit par la main
Je la reconduisais fratellement jusqu'aux portes de l'aube
Et parmi les dernières constellations du silence
À genoux sur la pierre sensible des âges
Nous regardions s'évanouir le monde.
......
J'avais pris la nuit par la main et dans ma main la nuit fuyait lentement
sans secousse
comme le dernier sang coule de la
blessure mortelle.
Et soudain ma main m'était rendue veuve
Car je n'ai pas encore épuisé
La merveille étonnante des heures
Je n'ai pas suffisamment pénétré
Le coeur terrible et pourpre
Des crépuscules interdits
Des musiques ignorées
Me sont encore défendues.
La terre et la mer
Glissent dans le temps
Les bielles du ciel
Roulent doucement
Baignées d'oubli
Ah je poursuivais l'interminable route
Les villes derrière moi et les hommes sous la pluie
Les cercles des réverbères continuaient leur
fastidieuse géométrie
Ah je ne cherchais plus ni le jour ni les
hommes véritables ni les clartés
premières
Je parcourais les routes indéfinissables sous
la pluie et dans la nuit formelle
Ah je sais
Mais son âme était glacée
Je vaincrai demain
La nuit et la pluie
Car la mort
N'est qu'une toute petite chose glacée
Qui n'a aucune sorte d'importance
Je lui tendrai demain
Mais demain seulement
Demain
Mes mains pleines
D'une extraordinaire douceur
AVEC TA ROBE
Ô toi pareille à un rêve déjà perdu
Toi pareille à une fiancée déjà morte
Toi mortel instant de l'éternel fleuve
Laisse-moi seulement fermer mes yeux
Laisse-moi seulement poser les paumes de
mes mains sur tes paupières
Laisse-moi ne plus te voir
Pour ne pas voir dans épaisseur des ombres
Lentement s'entr'ouvrir et tourner
Les lourdes portent de l'oubli
AH TOUTES CES RUES...
Je marchais je marchais je tentais
d'atteindre le fond de la nuit
Je tentais d'atteindre ce formidable secret
du bout de la nuit
Et cette aube légendaire des autres
Et ce cri préparé pour chacun des hommes
pour tous les hommes moi cherchant une
épaule fraternelle.
LE SILENCE
Mais il suffit peut-être
Ô Terre
De gratter légèrement ta surface
Avec des doigts d'innocence
Avec des doigts de soleil
Avec des doigts d'amour
Alors toutes les musiques
Ont surgit d'un coup
Alors tous les squelettes aimés
Tous ceux qui nous ont délivrés
Leurs violons tous accordés
Ont d'abord chanté
Sans plaintes sans pleurs
Les aurores de nacre
Les midis de miel
Les soirs de délices
Les nuits de feux tendres
Ils ont chanté encore
Le mur obscur de la mer
Le relief du vent
Le pur dur du diamant
Le souffle frais des montagnes
La fluidité de la pierre du roc
Ils ont ensuite chanté
Tout ce qui peut se dire
Du mort au vivant
Tissant la soie
De l'extraordinaire échelle
Alors le silence s'est fait
Ils n'avaient tû que le dernier sacrifice.
À Monsieur Alain Grandbois, par la poésie le sang s'unit à l'ange. Et l'être se dépouille de ses limites au nouvel espace de l'oeil. Il n'y a plus de souvenirs, la soif pressent son univers. Et nul tombeau, nul vestige, nul masque ne sont lieu de réclusion pour l'innocence. À l'Aube elle tend la main et un nouveau soleil d'or chante l'amour en la poitrine. En toute admiration, et respect, Fernand Ouellette.
Je marchais je marchais je tentais
d'attendre le fond de ma nuit
Je tentais d'atteindre ce formidable secret
du bout de la nuit
Et cette aube légendaire des autres
Et ce cri préparé pour chacun des hommes
Pour tous les hommes moi cherchant
une épaule fraternelle
AVEC TA ROBE …
Avec ta robe sur le rocher comme une aile blanche
Des gouttes au creux de ta main comme une blessure fraîche
Et toi riant la tête renversée comme un enfant seul
Avec tes pieds faibles et nus sur la dure force du rocher
Et tes bras qui t’entourent d’éclairs nonchalants
Et ton genou rond comme l’Ile de mon enfance
Avec tes jeunes seins qu’un chant muet soulève
Pour une vaine allégresse
Et les courbes de ton corps plongeant toutes vers ton frêle secret.
Et ce pur mystère que ton sang guette
Ô toi pareille à un rêve déjà perdu
Ô toi pareille à une fiancée déjà morte
Ô toi mortel instant de l’éternel fleuve
Laisse-moi seulement fermer mes yeux
Laisse-moi seulement poser les paumes de mes mains
Sur mes paupières
Laisse-moi ne plus te voir
Pour ne pas voir dans l’épaisseur des ombres
Lentement s’entrouvrir et tourner
Les lourdes portes de l’oubli
La caravelle de tes songes voguait vers
de plus vastes mers
Et tu me laissais seul avec une âme perdue
Ah toutes ces rues parcourues dans l'angoisse de la pluie
Mes pas poursuivant la chimère d'un asphaltes luisant et sans fin
Le halo des réverbères cernait mes pas dans une nuit prodigieusement fermée
J'étais l'animal haletant dans mille corps et les villes se succédaient
Les rues de milles viles se succédaient toutes pareilles avec le même signe anonyme de la pluie
L'âge des réverbères se marquait a la faiblesse des halos
Mes pas dans la pluie poursuivaient l'usure d'une lueur mystérieusement chimérique
Et soudain l'angoisse bondissait en moi et mon cœur cessait de battre