"L'étatisation de la société passe donc par l'individualisation bureaucratique des individus qui la composent".
Voilà une idée qui aurait pu sembler abstraite avant mars 2020 mais qui ,à présent, est ô combien pratico-vécue !
Et toutes ces perspectives théoriques de l'Etat, venant d'une généalogie, d'une anti-science sociale, d'une philosophie Foucaldienne trouvent ici et maintenant leur point d'accroche :
La déresponsabilisation des gouverne-mentalités, la conduite des conduites des citoyens, le pouvoir stratège moderne, "l'état moderne défini comme une puissance publique détenant le monopole de la contrainte légale sur un territoire et sur une population" (tiens, tiens, ça me rappelle des souvenirs à la pelle), la biopolitique qui régule, qui objective, qui calcule, qui probabilise, qui canalise et qui prescrit, l'état souverain ou la raison d'état ou l'état de droit, la bureaucratisation au plus haut sommet de l'intérêt public, l'état si policé qu'il en devient effrayant..
"L'étatisation de la société passe donc par l'individualisation bureaucratique des individus qui la composent".
Un grand merci à Masse Critique et aux éditions "Les prairies ordinaires" pour ce livre pas facile à lire car crépitant d'une haute concentration réflexive mais qui permet de s'abîmer dans la recherche de la compréhension étatique via les filets de papillon de Michel Foucault.
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Passant des concours de la fonction publique, j’ai été très intéressée par cet ouvrage lorsque je l’ai vu dans l’édition masse critique !
Néanmoins, je pense qu’il aurait été utile voire nécessaire que je me plonge plus ou moins dans les œuvres de Foucault même si l’auteur expose les théories et conceptions de celui-ci d’une manière bien détaillée et développée.
Avant tout, je pense également que ce n’est pas le genre d’ouvrage que l’on se dépêche de lire ; au contraire il faut prendre le temps de comprendre et d’analyser les propos (plusieurs passages sont d’ailleurs surlignés dans mon livre) car la lecture n’est pas des aisées pour ceux qui n’auraient pas l’habitude de ce genre d’ouvrage et du vocabulaire utilisé (beaucoup de référence juridique,philosophique etc)
Ceci étant dit, le travail impressionnant effectué par Arnaud skornicki est à saluer car il ne fait pas que reprendre les théories de Foucault pour définir la notion d’état et de pouvoir ; il théorise lui même ces notions en s’inspirant de l’auteur. Son travail est d’autant plus impressionnant qu’il compare la pensée de Foucault à celle de nombreux auteurs comme Weber,Marx,Nietzsche ou encore Locke,Bodin… ! Tout cela nous montre qu’au delà de la notion juridique, la notion d’état est bien plus complexe, le plus bel exemple donné dans le livre (selon moi) est la comparaison avec le pouvoir pastoral qui nous donne une image suffisamment claire de la relation pouvoir-état ! Un ouvrage fort intéressant que je prendrais le temps de relire à l’occasion d’autant plus qu’il correspond bien à la réalité de notre époque !
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le livre est divisé en cinq parties et développe les principaux objets et thèmes foucaldiens. Le premier chapitre, intitulé « La généalogie est-elle une sociologie comme une autre ? » définie le rôle de Foucault à la sociologie historique . Il s’agit principalement d’une comparaison des concepts de causalité et de pouvoir chez Michel Foucault et des sociologues classiques, en particulier Max Weber. Le deuxième chapitre, « Foucault et la sociogénèse des monopoles » met en perspective l’étude foucaldienne de l’étatisation des rapports de pouvoir et la théorie wébérienne de l’État à travers le concept célèbre de gouvernementalité. Il montre que les deux auteurs décrivent l’accroissement du monopole politique de l’État, ainsi qu’une critique sur le juridisme formel qui réduit l’État à un phénomène légal et du marxisme qui l’inféode totalement à la sphère économique. le troisième chapitre « Mystères et revers de l’ordre juridique » critique foucaldienne de la définition juridique classique de l’État. Occasion de souligner la raison principale de l’opposition de Michel Foucault à ce qu’il percevait comme la sociologie : son insistance sur les mouvements, les ruptures, les transformations. Néanmoins, l’auteur considère que la différence de Michel Foucault est à considérer comme une richesse plutôt que comme une raison de l’exclure du champ des sciences sociales.
Le quatrième chapitre, « Le Roi et le Berger s’intéresse au concept foucaldien de pouvoir pastoral, articulant autorité théologique et politique. explication avec l’influence du protestantisme et des guerres de religion sur les transformations de l’art de gouverner. Le cinquième chapitre, « De la biopolitique considérée comme bureaucratie » . Discussion par l’auteur des questions du libéralisme et de la pensée économique au xviiie siècle avec de bonnes remarques sur l’apparent paradoxe que constitue le développement parallèle de l’individualisation des sujets et du gouvernement des masses
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