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3.59/5 (sur 16 notes)

Nationalité : France
Né(e) le : 15/11/1970
Biographie :

Benoit Jeantet est écrivain et scénariste originaire du pays de Sault.

Il a proposé des courtes chroniques pour le site midi-olympique.fr.

Il a publié "Nos rêves sont priés de prendre une douche froide" en 2015.

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Bibliographie de Benoît Jeantet   (8)Voir plus

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Citations et extraits (22) Voir plus Ajouter une citation
La prairie s'assoupit dans l'attente patiente de l'arrosage. Et sinon peut toujours s'en remettre à la rosée. Une vie de prairie c'est pas bien compliqué. C'est paisible. Monotone.

http://wp.me/p5DYAB-1kC
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Benoît Jeantet
La nuit vide ses poches



La nuit vide ses poches
le matin va
bientôt
s’amener par ici
pour un peu
toujours
la même litanie
des chevauchées
bouseuses et sauvages
au petit trot
pour un peu
chaque fois
la même mort prématurée
du paysage...
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Quelques chiens courent sur la prairie.
Ils courent pour se donner un peu d'exercice. Sautent par-dessus une succession d’enclos vides.
Ne pas trop s'appesantir sur l'anéantissement prochain de la race.
Le train se met à rouler à très grande vitesse.
Quelques étangs menacent encore de leurs yeux noirs. Des puits où se laisser couler d'épuisement. Mais la distance s'est creusée.
Tout pourtant portait à croire que.
Mais c'est passé. Comme tout passe.
Voilà.
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Benoît Jeantet
J’essorais



J’essorais
deux trois
bouts
de salade
quand tes doigts
raboutés
à la sauvette
sur
ma nuque
se sont mis
à tisser
comme ça
des toiles
encore plus
complexes
que
les araignées.
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Benoît Jeantet
La pluie d’automne



La pluie d’automne
et cette façon
d’éplucher
la lumière
de chaque
après-midi
comme
une châtaigne.
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Oui et même à l’autre bout de la salle où je suis en train de débarrasser le petit tas de poussières qui s’amassent sur ma gueule de bois – il me restait cinquante euros à vivre quand le patron du café, un ancien partenaire, m’a tendu la main. je sais bien tout ce qui a pu se dire ou s’écrire sur le marketing à l’œuvre, il faut vivre avec son temps, autour des supposées valeurs du rugby. Je sais aussi toute la quincaillerie de clichés et de fantasmes que ce sport véhicule. Quoi qu’il en soit, mon ancien partenaire m’a tendu la main. On ne s’était pas revu depuis quinze ans. Des clichés ? Il l’a fait sans hésiter en comprenant ma gêne, en lisant dans mes silences, l’angoisse de cette inquiétude fixe où je me morfondais. Et un autre m’héberge chez lui le temps que je me remette à flot. Et peu à peu j’apprends à ne plus pleurer sur hier. À ne plus sombrer aussi facilement dans la misanthropie. À apprécier la vraie mesure de l’amitié comme une pépite impérissable. Du marketing ? – oui, même depuis l’autre bout de la salle, j’arrive à deviner son envie à elle de suspendre ce moment de grâce en caressant le jour à ses côtés. (« Le bonheur, c’est l’aube »)
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« Être heureux prend du temps. » Et je revois le sourire crispé de cet ancien journaliste qui rédige sur un bout de nappe – « une manière comme une autre d’amortir la chute interminable qui commence le jour où vous tombez en retraite » – les résumés de match pour le journal du club. Il y en a, ici, dont la bouche sent le ragot et l’aigre, pour oser prétendre que s’il a accepté de le faire, c’est uniquement parce qu’il « se bourre la gueule à nos frais ». Mais je l’ai toujours vu régler la note. Se tenir au comptoir comme autour de la main courante. Lucide. Toujours. Et surtout à l’écoute. Et lui, au moins, je ne l’ai jamais surpris au point où d’autres s’abaissent avec complaisance en dessous d’une certaine hauteur d’humanité.

Je revois le sourire de cet ancien journaliste que tous ces on-dit laissent de marbre. « Voyez-vous, jeune homme, celui qui rend service doit se taire, c’est à celui qui l’a reçu de parler. C’est de Sénèque. Connaissez-vous Sénèque ? Les gens parlent. Parler les maintient en vie. Plus ils parlent et plus, au fond, ils espèrent que quelqu’un leur réponde. Mais le grand jeu de questions-réponses auquel se résument parfois nos maigres existences, croyez-moi, c’est comme vivre, à la longue, ça fatigue. »

Et il a ce sourire de vieux tailleur de pierre à qui on ne la fait plus quand ses mains se remettent à trembler au moment où il lève son verre vers le mien.

C’est l’heure où les « gros » repartent, quelques packs de bière à la main, s’isoler dans un coin moite de la buvette. Le match est joué-perdu depuis longtemps et sans doute ressentent-ils le besoin de s’inoculer encore un peu de cette semence amère au creux des reins. Une manière, m’a-t-il expliqué un jour, de se dire « ces choses » qui restent aussi mystérieuses que les les sortilèges de la langue basque et c’est là-bas, à l’abri pudique des regards, qu’ils s’enchaînent à l’amour du combat, ce moment à part où les voix enfin se taisent, où les cœurs à nouveau se tendent, par les liens particuliers de la sagesse tacite qui les unit depuis que ce jeu existe. Si longtemps qu’il existe. Longtemps que les gens y jouent. Qu’ils ne souhaitent rien d’autre. Jouer, c’est tout. Sans justification.

Éparpillés autour d’un reste fumant de côtelettes, une poignée nettement plus joyeuse de trois-quarts préfère oublier tous ces ballons vomis à la lisière de leurs empreintes digitales. Et dans l’ennui d’une fin de troisième mi-temps qui s’éternise, leurs mains se tordent dans l’impatience qu’ils ont d’aller voir, mais surtout loin d’ici, s’il serait encore possible de prendre quelques dupes au piège de leurs charmes. Je sais bien qu’ils m’attendent mais d’un léger hochement de tête, j’indique que, non, désolé, les gars, ce sera sans moi. Et ce soir peut-être plus encore qu’après chaque défaite, j’ai un goût de crépuscule dans la bouche.
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Décidé ce matin de mettre mes vieux héros sous cloche. Au début, ils avaient l’air plutôt contents de quitter la nuit sans fin du sous-sol où j’entrepose mes souvenirs. Les bons. Les mauvais. Les brutaux. Les truands. Mon sous-sol aux souvenirs ressemble à une immense rue de la truanderie. Une immense rue gisant six pieds sous terre. Les bâtiments qui la bordent de part et d’autre ressortent tous d’une architecture différente. Ici un saloon qui s’ouvre sur une sorte de club-house désuet. Plus loin, un terrain de rugby. (…)
En dehors de ce lieu clos sur lui-même, tous ceux-là n’auraient rien à voir, rien à faire les uns avec les autres. Ensemble. Les classes sociales sont à cette époque beaucoup plus marquées qu’aujourd’hui. Sauf qu’ici une étrange magie opère. Lorsqu’il pousse la porte, qu’il se faufile, pattes douces, le gamin est à chaque fois témoin de cette aventure commune un peu hors sol. une aventure dont chaque nouvel épisode s’écrit, d’un dimanche à l’autre, court sur la semaine, bat les rues, les campagnes, rythme les coeurs au quotidien, le temps d’alimenter les souffles. Le temps de vivre le plaisir et la mâle innocence d’une rencontre. De survivre à l’après-match avec le secours de quelques fables. L’après-match, ce moment si particulier où tout reste souvent à refaire, défaire. Et c’est comme si tous ces hommes aux profils tellement disparates faisaient encore un pas de plus pour ne faire qu’un. Comme si leurs cœurs s’agrégeaient, après la fatigue des corps, par la seule grâce de l’amitié. Cette amitié virile, il y a beau temps que ce garçon en est convaincu, n’a pas son pareil pour cimenter les différences. Surmonter les écarts que la société a toujours pris un malin plaisir à creuser entre les gens. Lorsqu’on vous apprend très tôt qu’il sera toujours plus difficile de remonter d’un cordonnier que de descendre d’un marquis, un club-house a au moins le mérite d’entretenir l’espoir de l’avènement, un jour prochain qui sait, d’un monde sans barrières. (…)
Décidé ce matin de mettre mes vieux héros sous cloche. Au début, ils avaient l’air plutôt contents de quitter la nuit sans fin du sous-sol où j’entrepose mes souvenirs. Les bons. Les mauvais. Les brutaux. Les truands. Mon sous-sol aux souvenirs doit ressembler à une immense rue de la truanderie. Cette rue, c’est Babylone. C’est l’Atlantide. Un stade municipal d’un autre âge. Un stade pour un Règlements de compte à O.K. Corral où se rejoue chaque dimanche une nouvelle version de La Charge héroïque. Un stade de rugby bâti comme une nef très ancienne qui a connu le cœur de bien des ports. Echappé à bien des périls, on s’en doute. Sur la mer ou au large d’îles défendues par des récifs cannibales. Cette nef échouée en cale sèche, comme plantée au milieu d’un désert de souvenirs tel un vieux décor de cinéma. Un bric-à-brac fantôme qui a failli être emporté bien des fois par la violence des vents. Lorsqu’ils soufflent, les vents lèvent une odeur de chose qui ne sert pas. Plus. Une odeur d’âge d’or.
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On appliquait son esprit au moindre texte. Chaque livre portait l’espoir d’un nouveau monde. Tout un champ d’opossums possible. Jeunesse bouillante. Savate. Chausson. Boxe anglaise. Mouille le maillot ou casse-toi. Le nomadisme rendait sensible aux autres. À l’affût dans les salles obscures vous traquiez les moindres éclairs du désir. Ressentiez le manque. Les cœurs volaient en éclats. La vraie vie ça n’existe pas. Le cinéma rien de mieux pour apprendre à finir. À ne plus vivre qu’à brève échéance. Vieillir ne serait rien. Non. Une chute sur la tempe. À travers le temps. Pourtant la longueur du jour est désormais source de larmes. Une lassitude vous enveloppe. Le voyage a perdu son motif. Le cœur n’est plus cet athlète. En forme ou pas. Chaque partie du corps aurait-elle eu droit à son histoire ? Pour ça qu’il se laisse flotter. Le corps. À la dérive. Endormi dans l’onde inerte. Le corps. Pour ça que des bois flottants. À l’approche des derniers rapides. Tout ce que nous sommes…
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Non. Il s'agissait sans doute d'une de ces filles. Non. D'une femme. Enfin. Plutôt d'une de ces dames so Saint-Sulpice sur lesquelles on a pu, dès nos premiers atermoiements d'aoûtats, rêver de se faire les dents-les doigts-la langue-les lèvres-la bouche, oui mais non, essaye encore-oublie ça mon garçon, comme c'était un peu trop méconnaître à quel point ce genre de dames so Sulpice apprécient assez peu en principe les façons qu'on a, vers cet âge frappé de tant d'ingratitudes, de mouliner la confusion des sentiments avec la grâce pataude d'un hélicoptère. Oui. Je crois qu'il devait plutôt s'agir de ce genre de fille. Non. De femme. Enfin. Bref. Et alors il y avait cette ambiance de docks et de lampe tempête et ça faisait une jolie rupture de ton, comme ça, sous les arcades du marché Saint-Sulpice.
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