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3.69/5 (sur 18 notes)

Nationalité : France
Né(e) à : Quimper , 1953
Biographie :

Romancier, nouvelliste et traducteur, Bruno Krebs est né à Quimper en 1953. Après des études d’anglais, il voyage notamment en Écosse et en Irlande, puis enseigne en Angleterre. Par la suite, il séjourne en Grèce, à Malte, et choisit d’abandonner l’enseignement pour organiser des concerts. De lui, L’Arpenteur a publié trois recueils de nouvelles, Dans la nuit des chevaux (2003), La mer du Japon (2004), Chute libre (2005), un essai, Bill Evans live. Portrait (2006) et des mémoires, La traversée nue. Fragments (2009).
Dans les prairies d'asphodèles, publié par l'atelier contemporain (2017).

Source : L'arpenteur gallimard
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Citations et extraits (63) Voir plus Ajouter une citation
estomac noué
chacun attaque le soufflé langouste et grenade
grand-père somnole dans son fauteuil
le champagne détend les gosiers
grand-mère tricote frénétique
rires et bavardages ont repris
face au potiron flanqué de quatre homards givrés
grand-père d’un coup ranimé se redresse
et levant sa coupe qui tangue et déborde
félicite chaudement fiancés oncles tantes cousines et neveux
les remercie de leur affectueuse présence
les assure tous de son amour éternel
rince son champagne cul sec
puis se rassoit souriant doucement
à travers ses grosses lunettes embuées
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La prière d’insérer de MARC WETZEL :

Qu’on suppose des esprits lointains : ils connaissent à peine le mot « Terre », savent vaguement qu’il y a là-bas le plus périlleux et contrasté des havres de vie connus, mais n’ont aucune idée de son contenu. On voudrait alors leur donner rapidement, précisément, idée de ce que peut bien être un séjour terrestre. Eh bien, il suffirait de leur tendre L’Ile blanche.
Son auteur, aventureux par principe, se parle à lui-même depuis quatre décennies. Somnolent hyperactif, il n’erre pas – se borne à habiter l’égarement du monde ; en rien solitaire – ne dispose simplement pas de corps de rechange ; perd tout (ses papiers, ses proches, ses espadrilles, ses animaux mêmes), mais retrouve tout au final – car il a l’inconscient prodigue, et jamais n’abandonne son inconscient. Il va partout (à vélo, en taxi, en tortillard, en vol plané, en ferry, en 404), et partout cherche, et dans toutes les langues, le moyen de continuer ailleurs. Il n’a pas seulement l’âme nomade – quelque chose de lui est né avant toutes les frontières.
On l’accuse d’avoir jeté dans un étang des enfants dévorés ; il constate pisser par l’anus ; sa partenaire change de sexe en cours d’étreinte ; il ne décolle d’un parc public, à la force de triceps ailés, que pour effleurer les pointes de ses grilles ; on sert du bouillon de moules dans les michelines qu’il fréquente ; une « fille-chien » aux moignons putrides saute sur ses genoux, exigeant qu’il lui « racle la plante ». Parfois, il encaisse le plus cinglant des encouragements : « Vous irez loin si vous n’y êtes déjà parvenu ». Il n’oublie pas même de devenir pape (puisqu’il lui faut tout devenir) ; mais c’est pour se plaindre alors des courants d’air et des fourmis qui lui mangent les fesses, se divertir à deviner les touffes intimes d’adoratrices, ou discrètement écraser son mégot sous sa semelle. Chaque fois, il garde bien davantage que son sang-froid – à la fois surexposé (car le sommeil le livre à tout), et surprotégé (car il se réveillera de tout), se faufilant partout, tout lui arrive, absolument tout, et donc, aussi, très régulièrement le pire du pire. Il gobe tout – avec le sens professionnel d’une éponge – absorbant, assimilant et recrachant, dès que le réveil l’essore, le tout sensible du monde. Il rend, il restitue comme personne la tiédeur d’un crachat, le parfum d’une impasse, les « dents dispersées » d’un ancêtre. Il fait danser le « squelette parfumé » de sa grand-mère ; il nous engloutit avec lui pour « finir en dauphin pris dans l’hélice » d’un tanker.
Et les morts ressuscitent, à force d’être sans cesse par lui autrement compris, mieux visités. Car ce styliste produit plus d’endorphines qu’un derviche tourneur, et le blâmer de son inépuisable faconde serait comme reprocher son tintamarre à Shakespeare, ou à Rembrandt son indiscrétion.
Quant à L’Île Blanche, je ne sais pas plus que l’auteur ce qu’elle est ; mais on la devine, assez distinctement, deux ou trois fois, depuis les vitres des vedettes où nous embarque le capitaine de cette Odyssée.
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Il faisait si tiède ces derniers temps je n’ai pas senti le vent
tourner, puis fraîchir d’un coup.
Boursouflé d’abord, lourdes bâches frangées de neiges, le
ciel s’est rapidement obscurci, gagné par d’instables ruines,
murailles et citadelles, où valsent tourbillonnantes quelques
bandes d’oiseaux noirs.
Avec la nuit c’est un râle profond qui vient envahir la forêt où
je me suis engagé tardivement, délaissant route puis chemin.
Le vent déboule en grondant sous les futaies dont il froisse et
arrache par pleines brassées les feuilles prématurément brunies.
Mes pieds nus caressent mousses et brindilles. Mains tendues j’écarte les branchages des taillis.
Essoufflé je m’arrête en lisière d’un champ, devant une
crête cendreuse, auréolée d’éclairs.
Les frondaisons s’entrelacent, grincent et gémissent dans
les ténèbres qui se referment brusquement, si opaques, je trébuche au contact des sillons meubles, puis tombe à genoux.
Un souvenir alors me revient.
Enfant déjà quand la lune éclairait les arbres, je quittais ma
petite mansarde, le village et les bois qui le ceinturaient, pour
monter sur la plaine.
Dans les champs j’allais marcher, puis m’agenouiller devant
la lune, les nuages bleus qui s’étageaient comme balcons ou
terrasses d’un palais aérien.
Là je joignais les mains et je priais, la Vierge, notre sainte
Vierge je la priais chuchotant – la priais d’amour, la suppliais
de tendresse, l’entretenais d’espoir et d’affectueuse passion.
Au creux des sillons, guettais le sourire de la lune entre les
nuées, leurs fleuves et leurs rives lactées, où je distinguais
tremblantes car je n’ose les saisir vos bouquets si amoureusement assemblés – cette rose-là, et cette blanche, ces lourds
pétales humides, ces corolles dentelées, je voudrais, ces étamines poudreuses voudrais les caresser, et puis tant caresser
vos joues, tendrement, tendrement – oh, mes petites, mes
adorées – oui, donnez, donnez-moi ces bouquets que je vous
délivre de ce fardeau, que s’épanouissent vos sourires et vos
bouches vos lèvres qui maintenant m’effleurent, m’échauffent
et la joue et le cœur – oh, venez, venez dans mes bras vous serrer parmi les fleurs, et contre vous buvant léchant mes larmes
me laisser pleurer, pleurer à satiété, que plus jamais soif ni
peine d’amour ne nous tourmentent.
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longues tables et nappes blanches
portes-fenêtres donnant sur le parc
voyage retrouvailles nous ont déjà si fatigués
alors quand arrive un premier plat
tarte au tourteau crème fraîche
personne n’a déjà plus trop faim
sur l’estrade on a dévoilé la pièce montée
grande rumeur puis silence
cousin et cousine très enjoués annoncent leurs fiançailles
le fiancé nonchalant ouvre sa braguette pantalon noir lustré
la fiancée en extrait un gros chibre bandé
gland rose pâtissier
puis en deux temps trois vifs mouvements de poignet
en extrait un furieux jet de semence
lequel au lieu d’arroser le gâteau comme prévu
j’imagine asperge le tableau de maître accroché en arrière-plan
une toile de mon père nombre d’or trois mètres sur quatre
barres schisteuses lignes turquoise alternées
tous nous observons ahuris la performance
le sperme qui redescend se ramifie peu à peu
dessinant son arbre généalogique
selon les accidents le grain de la matière

grand-père ne pipe mot bouche bée plisse le front
écarquillant les yeux derrière ses lunettes dorées
grand-mère près de moi émet un petit rire commente doucement
look at all the jism they’ve spitted on the painting
tout le foutre craché sur la peinture
son anglais lui revenant morte du college for girls de Scutari
ricane coquine en dépit de sa faiblesse et maigreur extrêmes
indigné je me lève et gravissant les marches
houspille cousins et neveux vous n’avez donc nulle honte
un tableau qui vaudra bientôt des millions un trésor national
votre héritage notre patrimoine à tous
ils contemplent la toile un peu gênés
ça représente quoi demande le plus jeune
et il s’appelle comment ce crétin j’enchaîne
à quoi un oncle me répond tristement
celui-là toujours son nom m’échappe
enfin l’aîné décrète pas grave on va lessiver au savon
un autre se récrie jamais le savon n’effacera le foutre
il faut du détachant boulangerie pas loin encore ouverte
elle fait droguerie également
quand la grand-mère soudain réagit fulminant
bande de chenapans et d’ingrats qui jamais ne venez nous visiter
elle parle de l’hôpital du mouroir où comme moi chacun se dit
qu’il y passera la semaine suivante
puis laissant passer les semaines et les mois
plus personne ne sait plus vraiment s’ils vivent encore
depuis le temps des années maintenant
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Fin de jour – le soleil bombe, étoile blanche au terme de son
arc se plante puis explose –
ravivant fenêtres et baies par myriades, en une seule incandescence s’épanouit, s’étend par pans, créneaux et remparts
– chemins de ronde, tours, refends de lumière où mon œil ne
cerne qu’un unique, étroit rectangle d’azur –
mais ce rectangle étiré entre lignes d’ombre et de neige effervescente, je le bois chacun le boit le respire, jusqu’aux branches nues des sophoras sur la place, les vieilles qui se saluent alertes,
coiffées caniches, caniches bleus bondissants marsouins en
laisse – rues diagonales, perpendiculaires zébrées de rayons
jaunes, quand là-haut les barres les tours continuellement
s’embrasent – découpes, damiers blancs et bruns tendus vers
la lumière qui par blocs frissonnants, par éboulis de l’azur se
détache, se déverse inondant verticale la ville, ce faubourg, faîte
de colline où comme d’autres en cette fin d’après-midi mauve,
avec mon café par petites lampées je la goûte, l’ingurgite coulée
blanche peu à peu dorée qui de chaque baie, chaque fenêtre fait
un éclair, et des paroles, rires et rencontres continuel babil de
pouillots, rouges-gorges, fauvettes et merles, dans l’apaisante
clarté de ce caféréverbère où j’ai vu deux jeunes rire en terrasse,
belle jeune fille bien couverte, beau jeune homme aux larges
épaules prenant le frais, lapant comme moi, mais plus près,
plus près encore de ses berges le miel la lumière de ce fleuve –
alors jour comme celui-là ne sais s’il finira, ne sais ne perçois si la lumière se rétracte ou s’étend, quand vastes poumons
les murailles des immeubles en éponges semblent s’imbiber,
inspirer la lumière et indéfiniment pouvoir la conserver puis
la restituer, l’inspirer encore puis la préserver –
pour illuminer le soir peut-être, faire du soir ce soir une
longue fête, grande et longue noria de lumières où baies et
fenêtres remplaceraient lampions, guirlandes et projecteurs,
bleuissant la nuit bleue très pâle.
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mer frigide longue jetée noire
deux trois cargos amarrés
tendent leurs câbles

pâtés en boîte chips et petits pains
rayons obscurs javellisés on piétine
chacun déballe ses devises
les caissières sortent leurs calculettes
fin de journée elles aussi ont pris leurs billets
grand week-end et croisière en perspective

la passerelle mène droit au salon avant
plafonds bas il faut pencher la tête
les fauteuils les tôles tremblent par à-coups
le quai sa muraille s’écartent déjà coques et moules
longues guirlandes d’algues noires
tant de monde nos haleines embuent les vitres
je trébuche m’affale sur une fille entre ses genoux
glisse mes jambes puis mes fesses sur le siège mitoyen
les uns les autres s’interpellent momentanément séparés
la fille fait des mots croisés je m’y plonge aussi
la grille ses définitions
m’alourdissent les paupières
j’effleure son épaule du menton

l’île blanche à peine quitté l’estuaire on l’aperçoit
une haie de pins au sud file débordée
puis les roches rousses du cap
île blanche argentée
vagues brisées inaudibles
les machines labourent un courant ici plus sombre
l’île suspendue danse à l’horizon
rien d’autre après
juste le ciel les flots pailletés
et l’île recule brume légère se fond
s’efface indistincte
j’aurai pris le mauvais navire
des récifs passent livides sous le guano
la houle se creuse asperge les hublots
j’écluse un yaourt avec le doigt
épluche une orange m’essuie la main contre mon pantalon
mer trop forte à présent portes verrouillées
interdisent de gagner le pont
des religieuses papotent avec les caissières
je sors mon vieux policier pages jaunies pelucheuses
coups de théâtre sanguinaires règlements de compte
j’ai beau les connaître chaque fois sursaute

////////////
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Jours – je vois sur la ligne d’horizon tu sais là-bas je vois
très loin comme tirés par un fil, sur cette ligne d’horizon qsépare la mer très bleue du ciel tout aussi bleu quoique plus
pâle un peu, mais très scintillant aussi, quoique moins pailleté qu’elle la mer, entre ces deux bleus d’intensité presque
égale finalement je vois, tu sais je vois comme tirés par un fil
invisible (c’est si loin) sur cette ligne toute une procession de
bateaux, très petits bateaux, chalutiers, cargos, ferries, mais
tous très petits à cause de la distance, considérable, et leur
mouvement si infime, quand on croit les voir bouger, les voir
avancer un peu, d’un millimètre, les chalutiers bleus, les cargos noirs, jaunes, rouges, les ferries tout blancs, l’œil pleure
à en scruter les éclats, les taches de couleurs, les reflets de
soleil, pleure mais se dilate encore, malgré l’éblouissement,
pour contempler avec une extase très profonde cette ligne,
cette chaîne de petits bateaux multicolores, dont les fumées
si légères à l’horizon ne ternissent rien, dans ce très mince
halo de brume qui les baigne, ce fil qui les tire, tout doucement, du nord au sud – à l’horizontale maintenant frappés
par l’intense, l’explosive lueur que derrière nous le soleil lève
et déverse, bleuissant, bleuissant toujours le ciel et la mer –
la mer ses fines rides, le ciel ses voiles légers – quand mon
cœur dans ma poitrine s’élargit, comme celui d’un enfant au
cirque devant la grande parade des éléphants, des écuyères et
de leurs chevaux.
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beaucoup repartis nuit tombée
fenêtres grandes ouvertes sur la rivière
quelques invités conversent encore à voix basse
un homme s’assied devant moi croisant les jambes
semble lui aussi goûter le murmure qui remonte des flots
j’hésite un instant puis me penche timide
mister David Jones si je ne m’abuse
son œil vairon sans ciller me fixe
il porte une cigarette à ses lèvres la fait rougir
puis en évacue les cendres d’un coup de pouce
vous êtes un grand poète je murmure
I know me répond-il
quoique sans arrogance excessive
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De la ville lumière, Oslo, au cap le plus septentrional du continent, Nordkapp ; de l'église en bois debout richement sculptée, la stavkirke de Borgund, au plus grand glacier d'Europe, le Jostedal ; du paradis des baleines, les îles Lofoten, au royaume des aurores boréales, l'archipel du Svalbard ; de la kyrielle de fjords du Rogaland aux longues plages de sables dorées de Mandal... le pays du soleil de minuit vous offre une nature éblouissante, des cités chatoyantes et des paysages vertigineux.
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Les lianes, les buissons s’entremêlent, fauves fouillis piquetés de fleurs pâles, poussiéreuses, d’où émergent quelques
murs bas et toits de villas solitaires, aux fenêtres aveugles.
Longtemps inhabitées, ruines bientôt englouties par des
cascades de ronces, lichens et lierres triomphants où s’accroche un rai de soleil, à moi pourtant il semble que ces maisons sommeillent – comme ma propre conscience endormie,
repliée dans les profondes broussailles de l’oubli.
D’elles silencieuses je ne perçois qu’un faible bruissement,
une respiration lente où s’étouffe même le chant des oiseaux.
Et si maintenant avec le soir je distingue plus nettement
l’écho, de leurs voix le délicat murmure, mi-feuillage, mi-torrent, c’est comme du bout des lèvres et sans logique aucune:
leur langage incohérent babil, suite d’ondes et de clapotis, grelots ou vaguelettes chuintantes se heurtent, se fondent, sans
jamais former le moindre sens, ni chercher rime ou raison –
musique doucement, délicatement folle, série de sanglots et de
rires éteints, d’appels ou de chuchotements tantôt sombres,
tantôt gais, qui peu à peu tendres berceuses submergent mon
cœur.
Sans hâte j’ai cueilli des fleurs une à une en ce jardin
funèbre, pour à la nuit tombante rebrousser chemin
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