Citations de Bruno Roy (30)
Pour Ti-Loup, André est un bonheur d’été; pour André, l’été s’appelle Ti-Loup. Chacun pourra se dire qu’il y a eu, dans la même saison, un revirement à partir duquel tout a basculé.
Je dois au langage (la lecture et l’écriture) de m’en être sorti […]. Apprendre à lire a été l’acte le plus important de ma vie. Il m’a permis de me rattraper, non seulement sur le plan de la formation, mais aussi et surtout sur le plan personnel. Lire m’aidait à comprendre la vie, à comprendre le mensonge des autres, à ne pas y croire surtout.
Les enfants de Duplessis ont une version condensée de la Grande Noirceur. (p. 199)
Et nous croyons raisonnable de conclure que la plupart des retardés, qui forment la majorité de nos illégitimes non adoptés, ne le sont pas de naissance mais le deviennent à cause du système. En d'autres mots (...) nos crèches fabriquent des retardés mentaux que nous ne parvenons pas ensuite à rééduquer.
Gérard Pelletier. (p. 77)
Bibliothèque : une muraille contre l'ennui.
Contestation : débourrage de crâne.
je me coule
dans la source même du mouvement
vers l'aurore où je monte
je répartis mes forces
dans la juste part du bonheur
je sais
le seul fait que le soleil existe
ne suffit pas
j'ai pataugé au soleil dur
des boulevards d'été
tourner mon corps à l'ombre
comme dans un accident
d'espace et d'espoir
au matin des routes roses
pour filer tout fin seul
pour rayer le brouillon du ciel
se débrouiller à vie
ailleurs
léchant mon corps
de sa vague d'oubli
j'entends ma lenteur de vivre
comme un bruit d'océan
marcher sur le sable de l'orage
un jour que la mer se plisse
de beaucoup de regrets
entre la faim et l'origine
des tumultes font des rides
à la plage du recours
asséché à jamais
un espoir salé m'érafle les lèvres
je sais le corps que je suis
mais sur quel coeur
nous montions vers les dissonances
de notre insomnie aliénante
nos obsessions tournaient
dans un impossible attachement
ils prenaient tout
ce que nos mains avaient de vide
et nos combats têtus
parcouraient des fleuves de tumultes
assaillis de glaciers pleureurs
nous déchirions nos draps
avec notre peur obscène de la lumière
comme un volcan
l'heure est nue
je cherche un verbe
pour me nommer
fleuve rouge
dans l'infini du ventre
venir au monde
s'est joué dans une noyade
je n'eus d'autre plage
où échouer
je suis plus nu
que le bois mort
je gis
dévasté par la douleur d'une inconnue
grésillement d’accents
sur le disque de l’île
Montréal est un phonographe métissé
qui chante l’invariant de l’oreille
elle trouve sa parole
là où descendent ses rythmes
au fond initial de l’humain
je parle pour garder
ouverte la parole
j’écris pour garder
ouvert le livre
je saigne pour garder
ouvert mon cœur
je pleure pour garder
ouverts mes yeux
je donne pour garder
ouvertes mes mains
je te regarde
pour me garder ouvert
Au milieu de tes lèvres
où je frémis de toi
je t’entends m’aimer
ton cœur
couleur par couleur
ton corps
odeur par odeur
tes pieds
vague par vague
ton âme
élan par élan
j’aime l’offrande de ta bouche
à la hauteur de es falaises
d’où je monte et descends
depuis ton corps de pureté
je goûte au festin d’aimer
tu étais là
au début du monde
le réinventant
pour moi
et le pollen caché de mes doutes
sur un poème fruitier
féconde les baisers de notre avenir
dans ce monde sans certitude
je vous veux pour l’éternité
je veux quitter ce rond-point du cœur
au carrefour improvisé
je ne sais plus si la vie existe
bien avant que ne commence l’ivresse
mais alors le monde
débute-t-il avec mes sens?
de l’herbe où me coucher
de l’horizon ou m’étendre
ce matin-là pour m’approcher
ce soir-là pour m’apaiser
ce vent-là
comme on souffle
me perdre en toi
à chaque fois
le bonheur serait de mourir
en m’élançant vers vous
ma biche ardente
au fond il n’y a pas eu d’attente
seulement un léger bercement du cœur
sur la chaude étendue de nos mains imaginées