Christophe Babonneau, en interview pour planetebd.com
Bonjour Jozon ! Tu as eu une fière idée de venir accompagné de ce nourrisson !
Si nous n'avions pas le droit de le priver de baptême, tes os et les siens seraient dispersés parmi les nôtres !
Quand on lui demandait si elle n’avait pas peur de voyager de la sorte, nuitamment, toute seule par les chemins, elle répondait qu’au contraire, c’était les autres qui avaient peur d’elle, car il est vrai que dans l’obscurité, on pouvait, tant l’essieu grinçait, tant les ferrailles cliquetaient et tant le cheval lui-même avait l’air d’une bête de l’autre monde, croire que c’était l’ankou qui passait.
Écoute bien Monik ! Le vieillard que tu as rencontré était le trisaïeul de mon grand-père. Depuis près de trois cents ans qu'il est mort, il languissait faute d'une messe, dans les flammes du purgatoire. Cette messe, il fallait qu'un pauvre le payât spontanément... C'est ce que tu as fait, ainsi qu'en témoigne le billet que tu m'as remis.
Quand on lui demandait si elle n'avait pas peur de voyager de la sorte, nuitamment, toute seule par les chemins, elle répondait qu'au contraire, c'étaient les autres qui avaient peur d'elle, car il est vrai que dans l'obscurité, on pouvait, tant l'essieu grinçait, tant les ferrailles cliquetaient et tant le cheval lui-même avait l'air d'une bête de l'autre monde, croire que c'était l'Ankou qui passait.
-Mais qu'est-ce qui t'a mise dans cet état ? Il t'est donc arrivé quelque chose à toi aussi ?
-Pourquoi à moi aussi ?
-Eh bien... Tu vas me croire fou si je te dis que je viens de rencontrer le vieux Fanchi charruant ses champs sans cheval !
-Ah ! Sainte Anna. Je viens de passer la matinée en compagnie de sa défunte femme !
En ce temps-là, en Basse Bretagne, les jeunes filles de sang noble se mariaient en rouge. Mais l’Église jugeait cette pratique scandaleuse car c'était la couleur qui était attribuée au diable.
La mort avait enfin souri à la petite Rozik, elle lui offrit ce qu'elle semblait avoir toujours souhaité : aller rejoindre sa mère dans l'autre monde.
Le soir du même jour, Jozon du Guern repartait pour Pommerit, une tête de mort dans une main et le nouveau-né dans l'autre.
Tant que l'âme n'a pas accompli sa pénitence, elle doit faire après la mort ce qu'elle avait coutume de faire avant.
Les jours qui suivirent, il ne fit que dépérir, la mort l'avait regardé de trop près... Il ne passa pas l'année...