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Citations de Claude de Frayssinet (76)


Le Pacte qui me reste


Comment rendre à ma vie la lumière
du matin, les larmes nocturnes,
la frayeur de la mer, les silences du merle,
le temps d’un soirée interminable ?

Et comment rendre leurs différences
à la douleur et au bonheur,
et les aimer tous deux d’égale façon
car ne sont-ils pas le piment de la vie ?

Quand l’âge devient un naufrage,
que le jour est un pétale,
et qu’il reste peu de roses,
il est impossible que le monde soit exhumé.

Trouve-toi deux yeux, évidemment jeunes,
et découvre avec eux le monde que tu as perdu.
Ils te regardent, et ce monde renaît en toi.


//Francisco Brines (1932 -) / Traduit de l’espagnol par Claude de Freyssinet
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Versets de la genèse


Extrait 3

La nuit entre comme un vertige
dans la ville prise au dépourvu,
elle monte les escaliers et les côtes,
elle rampe derrière les lâches,
aveugle la chaux et les couteaux,
et dans les fracas des paroles
la nuit entre aussi.


//José Manuel Caballero Bonald (1926 -)
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Versets de la genèse


Extrait 2

La nuit entre comme une masse
de mer vide et de caverne,
elle se répand sur les bords
de l’alcool et de l’insomnie,
elle mord les mains du malade
et le cœur des mendiants,
et dans la blancheur des pages
la nuit entre aussi.


//José Manuel Caballero Bonald (1926 -)
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Versets de la genèse


Extrait 1

Par les fenêtres, par les trous
de serrure et les racines,
par les orifices et les fentes,
par les dessous de porte,
la nuit entre.

La nuit entre comme un crime
dans les brisants de la vie,
elle parcourt salles d’hôpitaux,
chambres de bordel,
églises, alcôves, cellules, cahutes,
et aux commissures des lèvres
la nuit entre aussi.


//José Manuel Caballero Bonald (1926 -)

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Ma prophétie, c’est ma mémoire


Extrait 3

Je suis seul et mes mains
enfin niées, offertes,
touchent des papiers (cet amour, ce
rêve), silhouettes oubliées, prédictions
perdues. Là, ma vie par à-coups,
la mémoire me transperce chaque jour.
Image finale de mon extermination,
Toute chose morte se réalise à nouveau.
Ma prophétie, c’est ma mémoire :
mon espoir d’être ce que j’ai déjà été.


//José Manuel Caballero Bonald (1926 -)
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Ma prophétie, c’est ma mémoire


Extrait 2

Monde récupérable, le vécu
se concentre et imprègne les murs
où le monde caduc renaît.
Des rafales reconstruites d’histoire
rassemblent l’avenir que je suis. (Ô chambre
dans l’ombre, subitement diaphane
sous le fanal du temps imprécatoire.)
Des traînées de lumière résonnent là-bas dans la nuit.


//José Manuel Caballero Bonald (1926 -)
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Ma prophétie, c’est ma mémoire


Extrait 1

Je reviens dans la chambre où je suis seul
chaque nuit, entrepôt des jours
qui ont sombré dans leur miroir irréparable.
Là, parmi les témoignages ligotés,
ma vie gît, immobile, avec ses papiers
au destin instable.
               Le bois,
le tremblé de la lampe, le cristal
visionnaire, les fragiles
attributions des meubles, conservent
entre leurs rudiments le reflux
incessant de mes années, l’épaisseur
persistante de ma mémoire, toute
l’affluence simultanée
des chiffres et des rêves qui m’assaillent.


//José Manuel Caballero Bonald (1926 -)
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Un livre, un verre, rien


Extrait 2

Chaque nuit je vis inutilement
la frustration du jour, je récupère
les heures mortes de ma liberté,
je suis cela même que j’ai été.

(Une main oubliée entre les draps
déchire des papiers, incinère
les décombres de mon rêve.)


                    Ô possession

sans personne pourquoi
tant de pages vaines, tant
d’hymnes vides ? Regarde
autour de toi, que reste-t-il ? Nous sommes

seuls : toute
la vie est contenue entre la réalité

et le rêve. Ici,
mon obstination c’est mon bonheur :
un livre, un verre, rien.


//José Manuel Caballero Bonald (1926 -)
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Un livre, un verre, rien


Extrait 1

Chaque nuit je laisse
ma solitude dans les livres, j’ouvre
la porte aux oracles,
je brûle mon âme au feu
du psalmiste.


          Ô cette volonté

de danger contrarié qui m’éveille
et rompt l’éclatante
soif de vivre de ma parole


//José Manuel Caballero Bonald (1926 -)
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Tandis que j’ajuste mon âge au temps…


Tandis que j’ajuste mon âge au temps

Combien de fois, en fin de journée,
perdant pied dans les eaux entassées
de mon âge, j’ai vu brûler, gémir
la charge de ma vie qui tenait
au seul fil précaire et tremblant
d’une chose qui encore s’impose
à mon cœur, nom arraché
à coups de mémoire, pour que jamais
je ne puisse dire ce n’est pas vrai
j’attends encore, je suis destiné
à attendre encore et toujours
tandis que j’ajuste mon âge au temps,
pour ainsi me récupérer de la vie
que je destitue jour après jour


//José Manuel Caballero Bonald (1926 -)
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Que faire si soudain tu découvres …


Que faire si soudain tu découvres que tu es habitée
de la tête aux pieds par quelqu’un qui t’est étranger
et qui confond ta langue avec un verbe différent.
D’un côté et de l’autre, le jour il te cherche
en traînant une lampe, et la nuit il sent
ses yeux aveuglés par un soleil d’injustice.

Que faire sinon te jeter dans le tumulte,
crier sous les vagues, secouer avec des bambous
la racine de ton corps,
désirer la mandragore,
proclamer ta sécheresse pour le restant de tes jours
et dormir pour l’éternité sur l’île de Wight.


//Maria Victoria Atencia (1931 -)
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Ce sont les mouettes mon amour…


Ce sont les mouettes, mon amour.
Les lentes, les hautes mouettes.

Mer hivernale. L’eau grise
laisse un tâche froide sur les rochers.
Tes jambes, tes douces jambes,
attendrissent les vagues.
Un ciel sale se vautre
sur la mer. Le vent efface
le profil des collines
de sable. Les tristes
mares de sel et de froid
copient ta lumière et ton ombre.
Elles crient des choses là-haut
que, trop absorbée, tu n’écoutes pas.

Ce sont les mouettes, mon amour.
Les lentes, les hautes mouettes.


//Angel González (1925 - 2008)
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Synesthésie


Absorbé et révérencieux
avec ses ailes fermées,
le papillon apprend
dans la prose odorante de la rose.

Ensuite, quand il les ouvrira,
il restituera au paysage
son parfum,
métamorphosé en couleurs.


//Angel González (1925 - 2008)
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Monde inquiétant...


Monde inquiétant
surgit brusquement.

J’ai peur de la lune
embaumée
dans les eaux du fleuve
de la forêt silencieuse
qui égratigne de ses branches
le ventre de la pluie,
des oiseaux
qui hurlent dans le tunnel de la nuit
et de tout ce qui subitement
fait un geste et sourit
pour disparaître aussitôt.

Au sein
de la cruelle retraite des choses
qui se précipitent en désordre vers
le néant et la cendre,
mon cœur naufrage dans l’inquiétude
du destin du monde qui la cerne.
Où vont ce vent et cette lumière,
le cri
du rouge coquelicot inattendu,
le chant des mouettes
grises dans les ports ?

Et quelle est cette armée qui m’emporte
dans sa déroute et dans sa fuite
‒ otage, fatigué, prisonnier
sans numéro et sans nom, ligoté
au milieu d’escouades de cris fugitifs –
vers l’ombre où vont les lumières,
vers le silence où la voix se meurt ?


//Angel González (1925 - 2008)
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Lamentation


Nous avons eu tant de choses
à dire, qui n’ont pas été dites !

Prodigieuses paroles jeunes
pour heurter les ouïes vieilles.
Merveilleuses mélodies,
chants inédits.
Nous avons chanté tous ensemble
et nous avons pleuré dans le silence.
Nous avons appris une dure science
au détriment de nos propres rêves.

Nous avons eu tant de choses
à dire, qui n’ont pas été dites !
Nous avons évité si gaiement
les sombres pressentiments !
Nous avons aimé chaque pousse,
chaque froide guenille d’hiver,
chaque goutte de petit matin
avec une avidité si folle, conscients
que nous étions la chair d’une fable
vécue par quelqu’un dans le mystère !
Tant de belles chansons ! des rafales
si ardentes qu’elles nous ont blessés

Musiques d’astres intérieurs
qui naissaient dans notre royaume.
Flûtes jouées, le soir venu,
par les mains vagues du rêve.
Et tant de beautés si limpides
qui sont tombées !
Et tourner sans fin dans l’aube
avec la sombre parole au-dedans,
avec le chant à fleur de vie,
ignorants de la fin lointaine.

Nous avons eu tant de choses
à dire, qui n’ont pas été dites !
Et nous regardons dans l’air
voler la musique sans maître,
sans que nous puissions la saisir
avec nos instruments maladroits.


//José Hierro (1922- 2002)

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Enfant


Roi d’un chant de blé, d’une rivière, d’une vigne :
ainsi devra-t-il se rêver. Et libre. Maître
de soi, bûcher perpétuel où brûle la bûche
de la vérité. Et que l’amour l’enserre.

Il voudra monter jusqu’à voir le ciel apposer
des formes claires sur le bronze de son rêve.
Les ailes font défaut. Il se blessera dans son effort,
et fondra en larmes sur son front d’enfant.

Et il apprendra la vérité. Le chant mourra
dans sa gorge rouge, rouge de cette frayeur
qui entend et qui voit, goûte et touche et hume.

Et il étrennera son cœur lacéré
d’homme acculé, d’homme aux abois,
d’exécuté à l’instant de sa révolte.


//José Hierro (1922- 2002)
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