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Citation de Erik35


Pendant quelques minutes, j'ai été seul dans le salon du Torpedo. Berta, la marchande de pain, est entrée. Je lui ai acheté un petit pain et je l'ai embrassée sur la bouche. Une seconde avant, je n'avais pas la moindre idée que j'agirais de la sorte. Elle non plus. C'est pourquoi c'était beau. Ce baiser, personne ne l'a organisé. Organiserait-on un baiser, il donnerait un mariage, un devoir aigre et sans saveur. Les guerres et les révolutions sont également organisées, aussi sont-elles monstrueusement laides et abjectes. Une rixe au couteau dans la rue, le meurtre ŕ chaud d'une épouse, le massacre parfait d'une famille, c'est beaucoup plus humain. La littérature aussi, c'est l'organisation qui la tue, le copinage, le corporatisme, la critique-maison qui écrit «quelques lignes chaleureuses» sur l'âne en chef de l'écurie. Mais un écrivain qui, dans un café, ŕ proximité des waters, sur une petite table en zinc, gribouille des vers qu'on ne publiera jamais, celui-lŕ sera toujours un saint. L'humanité, les exemples le prouvent, a été menée ŕ la ruine, au sang, ŕ l'ordure, par ceux qui se sont enthousiasmés pour la cause publique, qui ont pris au sérieux leur mission, qui avec ardeur, avec probité, ont veillé, alors que les bienfaiteurs ont été ceux qui ne se sont occupés que de leurs propres affaires, qui ont failli ŕ leur devoir, les indifférents, les dormeurs. Le mal n'est pas que le monde soit gouverné avec si peu de sagesse. Le mal est que, si peu que ce soit, il soit gouverné.
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